Compte personnel de prévention de la pénibilité

29 septembre 2013

Réservé aux salariés du secteur privé, limité à un gain maximal de deux ans pour l’âge de départ en retraite.

Le Gouvernement a décidé de créer un « compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité » qui permet de lier pré­ven­tion et répa­ra­tion, dans le cadre de son projet de loi 1376 "garan­tis­sant l’avenir et la jus­tice du sys­tème de retrai­tes" (octo­bre 2013).

L’exposé des motifs pré­cise : http://www.assem­blee-natio­nale.fr/14/pro­jets/pl1376.asp

Le prin­cipe de ce compte est simple : tout sala­rié exposé à au moins un fac­teur de péni­bi­lité (parmi les dix défi­nis à l’arti­cle D. 4121-5 du code du tra­vail1) voit son compte cré­dité d’un point par tri­mes­tre d’expo­si­tion, ou de deux points en cas d’expo­si­tion simul­ta­née à plu­sieurs fac­teurs de péni­bi­lité.

Le sala­rié peut ensuite uti­li­ser ses points, soit pour suivre une for­ma­tion lui per­met­tant d’accé­der à un emploi non péni­ble, soit pour tra­vailler à temps par­tiel à la fin de sa car­rière en conser­vant sa rému­né­ra­tion, soit enfin, pour partir à la retraite jusqu’à deux ans plus tôt que ce que le droit commun lui per­met­trait.

Afin de mettre l’accent sur la pré­ven­tion, le finan­ce­ment des nou­veaux droits accor­dés aux sala­riés repo­sera sur une coti­sa­tion à deux étages : un socle payé par l’ensem­ble des entre­pri­ses, au nom de la soli­da­rité inter­pro­fes­sion­nelle, car l’ensem­ble de l’économie béné­fi­cie de l’acti­vité des sec­teurs plus inten­ses en tra­vail péni­ble et une coti­sa­tion addi­tion­nelle appli­quée à la rému­né­ra­tion des seuls sala­riés expo­sés à un tra­vail péni­ble. L’objec­tif de cette coti­sa­tion addi­tion­nelle est d’inci­ter les entre­pri­ses à réduire le niveau d’expo­si­tion de leurs sala­riés.

Afin d’inci­ter au pre­mier chef à la pré­ven­tion et à la limi­ta­tion des durées d’expo­si­tion, une partie des points acquis par le sala­rié sera réser­vée à une uti­li­sa­tion en vue d’une for­ma­tion, en arti­cu­la­tion étroite avec le compte per­son­nel de for­ma­tion.

Le cha­pi­tre Ier com­porte six arti­cles détaillant les moda­li­tés de fonc­tion­ne­ment et de ges­tion du compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité, son finan­ce­ment, son arti­cu­la­tion avec la fiche de pré­ven­tion des expo­si­tions, comme avec les accords en faveur de la pré­ven­tion de la péni­bi­lité.

Article 5

L’arti­cle 5 modi­fie l’arti­cle L. 4121-3-1 du code du tra­vail rela­tif à la fiche de pré­ven­tion des expo­si­tions. Il pré­voit la défi­ni­tion par décret des seuils d’expo­si­tion aux fac­teurs de risque. En outre, il ins­taure une obli­ga­tion de trans­mis­sion d’infor­ma­tions aux entre­pri­ses de tra­vail tem­po­raire par les entre­pri­ses recou­rant à l’inté­rim afin de faci­li­ter la décla­ra­tion des expo­si­tions des tra­vailleurs inté­ri­mai­res. L’obli­ga­tion de tra­ça­bi­lité des expo­si­tions résul­tant de la tenue des fiches est donc main­te­nue pour l’ensem­ble des employeurs.

Article 6

L’arti­cle 6 ins­ti­tue le compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité dont l’objet est de comp­ta­bi­li­ser les pério­des d’expo­si­tion à un ou plu­sieurs fac­teurs de péni­bi­lité et les droits acquis à ce titre. Ce droit nou­veau est ouvert à l’ensem­ble des sala­riés ayant un contrat de tra­vail de droit privé, excep­tion faite de ceux qui béné­fi­cient déjà, dans leur régime de retraite, d’une prise en compte spé­ci­fi­que de la péni­bi­lité de leur emploi. Il pré­voit également les moda­li­tés de ges­tion et de finan­ce­ment du compte.

La sec­tion 1 concerne les moda­li­tés d’acqui­si­tion des droits. Les pério­des d’expo­si­tion condui­sent à l’accu­mu­la­tion de points sur le compte, le cas échéant majo­rés en cas d’expo­si­tion mul­ti­ple. Le total de points acquis pourra être pla­fonné pour ne pas inci­ter au main­tien dura­ble dans une situa­tion de péni­bi­lité. Une partie de ce total de points ne pourra être mobi­li­sée que pour la for­ma­tion pro­fes­sion­nelle, afin de favo­ri­ser une reconver­sion pro­fes­sion­nelle per­met­tant la sortie de la péni­bi­lité.

L’attri­bu­tion des points est réa­li­sée sur la base des infor­ma­tions conte­nues dans la fiche de pré­ven­tion des expo­si­tions et de la décla­ra­tion des don­nées socia­les de l’employeur.

La sec­tion 2 pré­cise les condi­tions d’uti­li­sa­tion des points accu­mu­lés. Les points accu­mu­lés sur le compte peu­vent être mobi­li­sés par le titu­laire pour par­ti­ci­per au finan­ce­ment d’une action de for­ma­tion pro­fes­sion­nelle per­met­tant une reconver­sion, pour assu­rer un com­plé­ment de rému­né­ra­tion lors d’un pas­sage à temps par­tiel en fin de car­rière ou encore pour finan­cer l’acqui­si­tion de tri­mes­tres sup­plé­men­tai­res majo­rant la durée d’assu­rance vieillesse. Le barème de trans­for­ma­tion des points acquis en droits ouverts sera fixé par décret.

Le barème d’acqui­si­tion des points et leurs moda­li­tés d’uti­li­sa­tion pour­ront être amé­na­gés afin de faci­li­ter le recours au temps par­tiel de fin de car­rière et à la majo­ra­tion de durée d’assu­rance pour les assu­rés pro­ches de l’âge de la retraite au moment de la créa­tion du compte.

La sec­tion 3 pré­voit les prin­ci­pes de ges­tion du compte et le trai­te­ment des récla­ma­tions. La ges­tion du compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité est attri­buée à la Caisse natio­nale de l’assu­rance vieillesse (CNAV) et au réseau des cais­ses régio­na­les d’assu­rance vieillesse et de la santé au tra­vail (CARSAT).

La CNAV enre­gis­tre au fur et à mesure les points du sala­rié cor­res­pon­dant aux don­nées décla­rées par l’employeur ; simul­ta­né­ment à la trans­mis­sion à la caisse, l’employeur com­mu­ni­que également les infor­ma­tions au sala­rié.

L’orga­nisme ges­tion­naire est également chargé de l’infor­ma­tion du tra­vailleur rela­tive aux points dont il dis­pose et aux uti­li­sa­tions pos­si­bles de ces points.

La CNAV sera par ailleurs en charge des décais­se­ments cor­res­pon­dant aux dif­fé­ren­tes moda­li­tés d’uti­li­sa­tion des points, à savoir le ver­se­ment aux finan­ceurs de la for­ma­tion pro­fes­sion­nelle, le rem­bour­se­ment aux employeurs des com­plé­ments de rému­né­ra­tion des sala­riés passés à temps par­tiel et le ver­se­ment au régime de retraite com­pé­tent des sommes cor­res­pon­dant aux points que le sala­rié sou­haite uti­li­ser pour anti­ci­per son départ.

L’arti­cle L. 4162-11 défi­nit les pou­voirs des CARSAT en matière de contrôle des expo­si­tions. Les contrô­les peu­vent être opérés jusqu’à trois années après l’année au cours de laquelle a eu lieu l’expo­si­tion. Les cais­ses peu­vent pro­cé­der direc­te­ment au redres­se­ment des coti­sa­tions dues par l’employeur et modi­fier le nombre de points du sala­rié. En cas de décla­ra­tion inexacte, l’employeur s’expose à une péna­lité.

L’arti­cle L. 4162-12 pré­voit que les recours rela­tifs au compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité sont du res­sort du conten­tieux géné­ral de la sécu­rité sociale, avec des amé­na­ge­ments pré­conten­tieux spé­ci­fi­ques prévus à l’arti­cle L. 4162-13. En cas de désac­cord du sala­rié por­tant sur le recen­se­ment de ses expo­si­tions à la péni­bi­lité, la caisse ne peut être saisie d’une contes­ta­tion qu’après recours préa­la­ble auprès de l’employeur. Les CARSAT sai­sis­sent alors une com­mis­sion ad hoc, char­gée de rendre un avis et ren­dent leur déci­sion, au vu de cet avis.

En cas de recours contre la déci­sion des cais­ses, le sala­rié et l’employeur sont par­ties à la cause.

La sec­tion 4 porte sur le finan­ce­ment du compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité. Elle ins­ti­tue un fonds, établissement public de l’État, en charge du finan­ce­ment des droits liés au compte.

Elle recense les dif­fé­ren­tes caté­go­ries de dépen­ses du fonds, cor­res­pon­dant aux dif­fé­ren­tes uti­li­sa­tions pos­si­bles du compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité, aux frais d’exper­tise expo­sés par les com­mis­sions inter­ve­nant en cas de litige et au rem­bour­se­ment des frais de ges­tion des comp­tes, ainsi que les sour­ces de recet­tes du fonds. La pre­mière source de finan­ce­ment est une coti­sa­tion géné­rale des employeurs rele­vant du champ d’appli­ca­tion du compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité. La deuxième est une coti­sa­tion addi­tion­nelle appli­quée uni­que­ment aux employeurs expo­sant au moins un de leurs sala­riés à la péni­bi­lité. La troi­sième source de finan­ce­ment peut être cons­ti­tuée par toute autre recette auto­ri­sée par les lois et règle­ments. Les four­chet­tes dans les­quel­les peu­vent être fixés, par décret, les taux des deux coti­sa­tions finan­çant le fonds sont pré­ci­sées à l’arti­cle L. 4162-19.

Article 7

L’arti­cle 7 pré­voit l’ali­men­ta­tion du compte per­son­nel de for­ma­tion par les points ins­crits sur le compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité.

Article 8

L’arti­cle 8 modi­fie les dis­po­si­tions, intro­dui­tes par la réforme des retrai­tes de 2010, ins­ti­tuant une obli­ga­tion pour les entre­pri­ses ou grou­pes de 50 sala­riés et plus d’être cou­verts par un accord ou un plan d’action rela­tif à la pré­ven­tion de la péni­bi­lité. Cette obli­ga­tion pré­vaut lors­que plus de la moitié des sala­riés de l’entre­prise sont expo­sés à un fac­teur de risque pro­fes­sion­nel. Comme pour la fiche de pré­ven­tion des expo­si­tions, l’expo­si­tion d’un sala­rié est décomp­tée lorsqu’elle dépasse les seuils défi­nis par décret et non plus sur la base de la seule appré­cia­tion de l’employeur. Ces accords ou plans d’action per­met­tront notam­ment l’appro­pria­tion par les entre­pri­ses du nouvel outil que cons­ti­tue le compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité dans leurs pra­ti­ques de ges­tion des res­sour­ces humai­nes. En outre, la cou­ver­ture par un plan d’action ne sera pos­si­ble qu’après échec effec­tif d’une négo­cia­tion conduite en vue d’un accord conven­tion­nel.

Article 9

L’arti­cle 9 pré­cise les moda­li­tés d’uti­li­sa­tion au titre de la retraite des droits acquis au titre de l’expo­si­tion à des fac­teurs de péni­bi­lité. Les tri­mes­tres de retraite acquis grâce au compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité per­met­tent d’avan­cer l’âge de départ à la retraite et aug­men­tent la durée d’assu­rance afin de déter­mi­ner le taux de pen­sion. Ils sont de plus répu­tés coti­sés pour le béné­fice du dis­po­si­tif de départ anti­cipé pour car­riè­res lon­gues.

Article 10

L’arti­cle 10 abroge deux dis­po­si­tions de la loi de 2010 por­tant réforme des retrai­tes, la pos­si­bi­lité de conclure des accords de com­pen­sa­tion de la charge de tra­vail des sala­riés occu­pés à des tra­vaux péni­bles et l’ins­tau­ra­tion d’un comité scien­ti­fi­que, dis­po­si­tions ren­dues super­flues par l’ins­tau­ra­tion du compte per­son­nel de pré­ven­tion de la péni­bi­lité.

Article 11

L’arti­cle répond aux préoc­cu­pa­tions du Gouvernement vis-à-vis de l’emploi des seniors et plus par­ti­cu­liè­re­ment vis-à-vis de ceux qui, en fin de car­rière, éprouvent le besoin d’une tran­si­tion douce entre l’emploi et la retraite. La retraite pro­gres­sive, en met­tant fin à la cou­pure bru­tale entre acti­vité et retraite, vise à encou­ra­ger la pro­lon­ga­tion d’acti­vité rému­né­rée en faci­li­tant la tran­si­tion entre emploi et retraite.

Fin 2012, la retraite pro­gres­sive concerne peu d’assu­rés (2 409 béné­fi­ciai­res au régime géné­ral). C’est un dis­po­si­tif peu connu et sou­vent mal com­pris, que le Gouvernement a sou­haité réno­ver pour l’adap­ter à la réa­lité de la fin de car­rière des seniors.

Cette période de cumul d’une acti­vité à temps par­tiel et d’une frac­tion de la pen­sion de retraite est favo­ra­ble aux assu­rés, à qui elle permet de pour­sui­vre l’acqui­si­tion des droits à retraite et de liqui­der à terme une retraite majo­rée.

Une réforme struc­tu­rante du dis­po­si­tif est prévue par le pré­sent arti­cle, qui, pour en étendre le champ, abaisse la condi­tion d’âge à partir duquel les assu­rés pour­ront entrer en retraite pro­gres­sive. Actuellement fixée à l’âge légal (soixante-deux ans en 2017, pour la géné­ra­tion née en 1955), la condi­tion d’âge est abais­sée de deux ans, afin de favo­ri­ser l’accès au dis­po­si­tif des sala­riés ayant com­mencé à tra­vailler tôt.

Pour suivre l’évolution du texte :
http://www.assem­blee-natio­nale.fr/14/dos­siers/avenir_jus­tice_sys­teme_retrai­tes.asp

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