Laïcité et liberté religieuse au travail

1er avril 2013

Par deux arrêts rendus le 19 mars 2013, la Cour de cas­sa­tion vient de se pro­non­cer sur le prin­cipe de laï­cité et sur les condi­tions d’exer­cice de la liberté reli­gieuse au tra­vail.

Dans les deux cas, il s’agis­sait d’une sala­riée qui contes­tait son licen­cie­ment, fondé sur le refus d’ôter, sur son lieu de tra­vail, son fou­lard isla­mi­que, lais­sant voir le visage mais cou­vrant les che­veux.

Dans un cas la sala­riée tra­vaillait pour une crèche privée, dans l’autre pour une caisse d’assu­rance mala­die.

Dans l’affaire de la crèche privée, la Cour de cas­sa­tion rap­pelle que le prin­cipe de laï­cité et de neu­tra­lité ins­tauré par la Constitution n’est pas appli­ca­ble aux sala­riés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un ser­vice public. Malgré sa mis­sion d’inté­rêt géné­ral une crèche privée ne peut être consi­dé­rée comme gérant un ser­vice public. Dans ces condi­tions, estime la Cour, les res­tric­tions à la liberté reli­gieuse ne sont pos­si­bles que si elles se jus­ti­fient par la nature de la tâche à accom­plir, répon­dent à une exi­gence pro­fes­sion­nelle essen­tielle, et sont pro­por­tion­nées au but recher­ché. Ce n’est pas le cas d’une clause géné­rale de laï­cité figu­rant dans le règle­ment inté­rieur de la crèche, et appli­ca­ble à tous les emplois de celle-ci. Le licen­cie­ment a été annulé.
http://www.legi­france.gouv.fr/affi­ch­Ju­ri­Judi.do?oldAc­tion=rech­Ju­ri­Judi&idTexte=JURITEXT000027209800&fas­tRe­qId=244071661&fast­Pos=1

En revan­che dans un ser­vice public, le prin­cipe de laï­cité l’emporte. Ainsi dans l’affaire concer­nant la Caisse pri­maire d’assu­rance mala­die, la Cour a jugé que les prin­ci­pes de neu­tra­lité et de laï­cité sont appli­ca­bles à l’ensem­ble des ser­vi­ces publics, même lors­que ceux-ci sont gérés par des orga­nis­mes de droit privé, ce qui est le cas d’une caisse pri­maire de sécu­rité sociale. De ce fait ses agents, même ceux n’étant pas en contact avec les usa­gers, sont soumis à des contrain­tes spé­ci­fi­ques leur inter­di­sant notam­ment de mani­fes­ter leurs croyan­ces reli­gieu­ses par des signes exté­rieurs, en par­ti­cu­lier ves­ti­men­tai­res. Le licen­cie­ment a été validé.
http://www.legi­france.gouv.fr/affi­ch­Ju­ri­Judi.do?oldAc­tion=rech­Ju­ri­Judi&idTexte=JURITEXT000027209863&fas­tRe­qId=432513614&fast­Pos=1

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt sui­vant :

Sur les deux moyens, réunis :

Attendu, selon l’arrêt atta­qué (Paris, 9 novem­bre 2011), que Mme X...a été enga­gée par contrat de tra­vail à durée indé­ter­mi­née le 4 sep­tem­bre 2001 par la caisse pri­maire d’assu­rance mala­die de Seine-Saint-Denis en qua­lité de tech­ni­cienne pres­ta­tions mala­die ;
- que le règle­ment inté­rieur de la caisse a été com­plété le 10 février 2004 par une note de ser­vice inter­di­sant « le port de vête­ments ou d’acces­soi­res posi­tion­nant clai­re­ment un agent comme repré­sen­tant un groupe, une ethnie, une reli­gion, une obé­dience poli­ti­que ou quel­que croyance que ce soit » et notam­ment « le port d’un voile isla­mi­que, même sous forme de bonnet » ;
- qu’elle a été licen­ciée pour cause réelle et sérieuse le 29 juin 2004 aux motifs qu’elle por­tait un fou­lard isla­mi­que en forme de bonnet ; qu’elle a saisi la juri­dic­tion prud’homale le 24 mai 2005 en nul­lité de son licen­cie­ment en sou­te­nant que celui-ci était dis­cri­mi­na­toire au regard de ses convic­tions reli­gieu­ses ;

Attendu que Mme X...fait grief à l’arrêt de reje­ter sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que les prin­ci­pes de laï­cité et de neu­tra­lité n’ont voca­tion à s’appli­quer qu’à l’Etat, aux col­lec­ti­vi­tés publi­ques, aux per­son­nes mora­les de droit public et à leurs agents ; qu’en affir­mant que ces prin­ci­pes jus­ti­fiaient en l’espèce le licen­cie­ment de Mme X..., en ce que ceux-ci lui inter­di­saient, dans le cadre de ses fonc­tions, de porter un « fou­lard en bonnet » mani­fes­tant son appar­te­nance à la reli­gion musul­mane quand celle-ci n’était pas un agent de l’Etat, d’une col­lec­ti­vité publi­que ou d’une per­sonne morale de droit public, mais une sala­riée de droit privé tra­vaillant pour le compte d’une per­sonne morale de droit privé, la cour d’appel a violé, par fausse appli­ca­tion, l’arti­cle 1er de la Constitution et par refus d’appli­ca­tion les arti­cles 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, 9 de la Convention euro­péenne de sau­ve­garde des droits de l’homme et des liber­tés fon­da­men­ta­les et l’arti­cle L. 1132-1 du code du tra­vail ;

2°/ qu’aux termes de l’arti­cle L. 1121-1 du code du tra­vail, nul ne peut appor­ter aux droits des per­son­nes et aux liber­tés indi­vi­duel­les de res­tric­tions qui ne seraient pas jus­ti­fiées par la nature de la tâche à accom­plir et pro­por­tion­nées au but recher­ché ; qu’en affir­mant que le licen­cie­ment de Mme X..., lequel trou­vait son unique cause dans le fait que celle-ci por­tait, dans l’exer­cice de ses fonc­tions un « fou­lard en bonnet » mani­fes­tant son appar­te­nance reli­gieuse, sans recher­cher, ainsi que cela lui était demandé, si au regard des fonc­tions qu’elle exer­çait, les­quel­les ne la condui­saient pas à être en contact avec les assu­rés, l’inter­dic­tion qui lui était ainsi faite de porter un « fou­lard en bonnet », était jus­ti­fiée au regard de la nature des tâches qu’elle avait à accom­plir et pro­por­tion­née au but recher­ché, la cour d’appel a privé sa déci­sion de base légale au regard de l’arti­cle L. 1121-1 du code du tra­vail et des arti­cles 1er de la Constitution, 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 9 de la Convention euro­péenne des droits de l’homme et des liber­tés fon­da­men­ta­les ;

3°/ qu’en disant que le licen­cie­ment était jus­ti­fié quand elle avait elle-même relevé que la sala­riée por­tait un simple « fou­lard en bonnet », ce dont il résul­tait que l’inter­dic­tion qui lui avait été faite n’était pas pro­por­tion­née au but recher­ché, la cour d’appel a violé l’arti­cle L. 1121-1 du code du tra­vail et les arti­cles 1er de la Constitution, 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 9 de la Convention euro­péenne des droits de l’homme ;

4°/ qu’aux termes de l’arti­cle L. 1321-3 du code du tra­vail, un règle­ment inté­rieur ne peut appor­ter aux droits des per­son­nes et aux liber­tés indi­vi­duel­les et col­lec­ti­ves des res­tric­tions qui ne seraient pas jus­ti­fiées par la tâche à accom­plir et pro­por­tion­nées au but recher­ché ; qu’à cet égard, un règle­ment inté­rieur ne sau­rait appor­ter de res­tric­tion géné­rale à l’exer­cice d’une liberté fon­da­men­tale ; qu’en déci­dant que le licen­cie­ment de Mme X...était fondé dès lors que celle-ci n’avait pas res­pecté le règle­ment inté­rieur de la caisse pri­maire d’assu­rance mala­die, lequel inter­di­sait pour­tant, de façon géné­rale, aux sala­riés de la caisse le port de vête­ments ou d’acces­soi­res mani­fes­te­ment leur appar­te­nance à un groupe, une ethnie, une reli­gion, une obé­dience poli­ti­que ou quel­que croyance que ce soit et com­por­tait ainsi une res­tric­tion géné­rale à l’exer­cice d’une liberté fon­da­men­tale, la cour d’appel a violé l’arti­cle L. 1321-3 du code du tra­vail, ensem­ble les arti­cles 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 9 de la Convention euro­péenne de sau­ve­garde des droits de l’homme et des liber­tés fon­da­men­ta­les ;

Mais attendu que la cour d’appel a retenu exac­te­ment que les prin­ci­pes de neu­tra­lité et de laï­cité du ser­vice public sont appli­ca­bles à l’ensem­ble des ser­vi­ces publics, y com­pris lors­que ceux-ci sont assu­rés par des orga­nis­mes de droit privé et que, si les dis­po­si­tions du code du tra­vail ont voca­tion à s’appli­quer aux agents des cais­ses pri­mai­res d’assu­rance mala­die, ces der­niers sont tou­te­fois soumis à des contrain­tes spé­ci­fi­ques résul­tant du fait qu’ils par­ti­ci­pent à une mis­sion de ser­vice public, les­quel­les leur inter­di­sent notam­ment de mani­fes­ter leurs croyan­ces reli­gieu­ses par des signes exté­rieurs, en par­ti­cu­lier ves­ti­men­tai­res ;

Et attendu qu’ayant retenu que la sala­riée exerce ses fonc­tions dans un ser­vice public en raison de la nature de l’acti­vité exer­cée par la caisse, qui consiste notam­ment à déli­vrer des pres­ta­tions mala­die aux assu­rés sociaux de la Seine-Saint-Denis, qu’elle tra­vaille en par­ti­cu­lier comme « tech­ni­cienne de pres­ta­tions mala­die » dans un centre accueillant en moyenne six cent cin­quante usa­gers par jour, peu impor­tant que la sala­riée soit ou non direc­te­ment en contact avec le public, la cour d’appel a pu en déduire que la res­tric­tion ins­tau­rée par le règle­ment inté­rieur de la caisse était néces­saire à la mise en oeuvre du prin­cipe de laï­cité de nature à assu­rer aux yeux des usa­gers la neu­tra­lité du ser­vice public ;

D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses bran­ches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pour­voi ;

Condamne Mme X...aux dépens ;

Vu l’arti­cle 700 du code de pro­cé­dure civile, rejette les deman­des ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cas­sa­tion, cham­bre sociale, et pro­noncé par le pré­si­dent en son audience publi­que du dix-neuf mars deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au pré­sent arrêt

Moyens pro­duits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infir­ma­tif atta­qué d’AVOIR débouté Mrne X...de sa demande ten­dant à voir annu­ler son licen­cie­ment et à voir la CPAM de Seine-Saint-Denis et la DRASSIF condam­nées à lui payer une somme de 70. 000 € à titre de dom­ma­ges-inté­rêts

AUX MOTIFS QUE : « il res­sort des pièces ver­sées aux débats que Madame X..., titu­laire d’une licence en droit et d’un DEUG admi­nis­tra­tion Economique et sociale, a été embau­chée à la CPAM de Seine Saint Denis comme tech­ni­cienne de pres­ta­tions mala­die le 4 sep­tem­bre 2001 après avoir subi des épreuves écrites et un entre­tien d’embau­ché ; qu’elle a été affec­tée au centre 152 à Saint Denis Basilique ;
- qu’à une date non déter­mi­née mais pos­té­rieure à son embau­che, la sala­riée est venue tra­vailler coif­fée d’un fou­lard porté sous forme de bonnet ;
- qu’au cours de l’année 2003, malgré les ten­ta­ti­ves de conci­lia­tion ou les inci­ta­tions de sa hié­rar­chie, Madame X...a refusé de reti­rer son fou­lard pen­dant ses heures et sur son lieu de tra­vail, même après que la CPAM 93 ait com­plété son règle­ment inté­rieur par une note de ser­vice (numéro 1/ 2004 du 10fé­vrier 2004) pro­hi­bant « le port de vête­ments pu d’acces­soi­res posi­tion­nant clai­re­ment un agent comme repré­sen­tant un groupe une ethnie une reli­gion une obé­dience poli­ti­que ou quel­que croyance que ce soit », et notam­ment « le port d’un voile isla­mi­que, même sous forme de bonnet ».

Il n ‘ est pas contesté que la conven­tion Européenne des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales pro­tège en son arti­cle 9 la liberté de pensée, de cons­cience et de reli­gion ; que l’arti­cle 10 de la décla­ra­tion des Droits de l’Homme et du Citoyen pré­voit que « nul ne doit être inquiété pour ses opi­nions, même reli­gieu­ses, pourvu que leur mani­fes­ta­tion ne trou­ble pas l’ordre public établi par la loi » ; que la liberté de cons­cience est également garan­tie par le préam­bule de la cons­ti­tu­tion du 27 octo­bre 1946 repris par la cons­ti­tu­tion de 1958, que le droit du tra­vail pro­hibe (en son arti­cle L 1132-1 du tra­vail) toute dis­cri­mi­na­tion envers un sala­rié en raison notam­ment de ses convic­tions reli­gieu­ses.

Mais il résulte également des textes cons­ti­tu­tion­nels et légis­la­tifs que les prin­ci­pes de laï­cité de l’Etat et de neu­tra­lité des ser­vi­ces publics s’appli­quent à l’ensem­ble de ceux-ci ; que si les agents des ser­vi­ces publics béne­fi­cient de la liberté de cons­cience qui inter­dit toute dis­cri­mi­na­tion ‘ dans l’accès aux fonc­tions comme dans le dérou­le­ment de la car­rière qui serait fondée sur leur reli­gion, le prin­cipe de laï­cité fait obs­ta­cle à ce qu’ils dis­po­sent dans le cadre du ser­vice public, du droit de mani­fes­ter leurs croyan­ces reli­gieu­ses.

Dans une déci­sion du n° 82-148 du 14 décem­bre 1982 le Conseil Constitutionnel a consi­déré que les Caisses du régime géné­ral de sécu­rité sociale assu­raient la ges­tion d’un ser­vice public et qu’il appar­te­nait au légis­la­teur de déter­mi­ner les prin­ci­pes fon­da­men­taux de la sécu­rité sociale.

S’il est exact qu’en matière de ges­tion du per­son­nel les dis­po­si­tions du code du tra­vail s’appli­quent pour l’essen­tiel aux agents des CPAM ces der­niers sont tou­te­fois soumis à des contrain­tes spé­ci­fi­ques liées au fait qu’ils par­ti­ci­pent à une mis­sion de ser­vice public.

En l’espèce, bien que Madame X...soit liée à la CPAM par un contrat de droit privé, il n ‘ est pas contes­ta­ble que celle-ci-tra­vaille dans un ser­vice public en raison de la nature de l’acti­vité exer­cée par la Caisse, qui consiste notam­ment à déli­vrer des pres­ta­tions mala­die aux assu­rés sociaux de la Seine Saint Denis ; qu’elle tra­vaille en par­ti­cu­lier comme « tech­ni­cienne de pres­ta­tions mala­die » dans un centre employant 68 per­son­nes et accueillant en moyenne 650 usa­gers par jour parmi les­quels se trou­vent des per­son­nes sou­mi­ses à des condi­tions de grande pré­ca­rité, peu impor­tant que la sala­riée soit ou non en contact direct avec le public.

A ce titre, elle doit ; en dépit de ses convic­tions reli­gieu­ses et de sa liberté de cons­cience qui ne lui ont jamais été repro­chées, se confor­mer au res­pect du prin­cipe de laï­cité et de neu­tra­lité s ‘ appli­quant à l’ensem­ble des ser­vi­ces publics, exi­gen­ces de nature cons­ti­tu­tion­nelle com­man­dée par la néces­sité de garan­tir les droits des usa­gers des ser­vi­ces publics et l’égalité de tous devant la loi, prin­ci­pes réaf­fir­més par le règle­ment inté­rieur de la Caisse, lequel a été com­plété par la note annexée du 10 février 2004. Il convient d’obser­ver que la mise en place de ces dis­po­si­tions du règle­ment inté­rieur s’est faite après consul­ta­tion du comité d’entre­prise, dépôt du docu­ment au greffe du conseil des Prud’homn­mes et com­mu­ni­ca­tion à l’ins­pec­tion du tra­vail et qu’il n’y a eu aucun recours sur ce texte.

La qua­lité du tra­vail fourni par la sala­riée, et sa dis­cré­tion sou­li­gnée par les attes­ta­tions ver­sées aux débats ne peu­vent faire dis­pa­raî­tre les exi­gen­ces rela­ti­ves à la neu­tra­lité et à la laï­cité du ser­vice public, rap­pe­lées dans le règle­ment inté­rieur de la Caisse, prin­ci­pes fai­sant obs­ta­cle à ce que les agents de la CPAM dis­po­sent du droit, pen­dant leur ser­vice et sur le lieu de leur tra­vail de mani­fes­ter leur appar­te­nance reli­gieuse par un acces­soire ves­ti­men­taire osten­ta­toire, ce qui était le cas du fou­lard en forme de bonnet que por­tait Madame X....

Ces éléments sont suf­fi­sants pour établir que la déci­sion de licen­cie­ment de la CPAM était fondée sur des éléments objec­tifs étrangers à toute dis­cri­mi­na­tion, la sala­riée n’ayant pas été licen­ciée en raison de ses convic­tions reli­gieu­ses comme elle le sou­tient,- mais en raison de la mani­fes­ta­tion (par le port d’un acces­soire ves­ti­men­taire osten­ta­toire) de ses croyan­ces reli­gieu­ses dans le cadre de l’exé­cu­tion d’un ser­vice public dans lequel doit pré­va­loir le res­pect du prin­cipe de laï­cité et de neu­tra­lité.
Dans ces condi­tions il y a lieu d’infir­mer la déci­sion de pre­mière ins­tance en ce qu’elle a déclaré que le licen­cie­ment de Madame X...était dis­cri­mi­na­toire et de débou­ter la sala­riée de sa demande en nul­lité du licen­cie­ment ».

ALORS, D’UNE PART, QUE les prin­cipe de laï­cité et de neu­tra­lité n’ont voca­tion à s’appli­quer qu’à l’Etat, aux col­lec­ti­vi­tés publi­ques, aux per­son­nes mora­les de droit public et à leurs agents : qu’en affir­mant que ces prin­ci­pes jus­ti­fiaient en l’espèce le licen­cie­ment de Mrne X..., en ce que ceux-ci lui inter­di­saient, dans le cadre de ses fonc­tions, de porter un « fou­lard en bonnet » mani­fes­tant son appar­te­nance à la reli­gion musul­mane quand celle-ci n’était pas un agent de l’Etat, d’une col­lec­ti­vité publi­que ou d’une per­sonne morale de droit public, mais une sala­riée de droit privé tra­vaillant pour le compte d’une per­sonne morale de droit privé, la cour d’appel a violé, par fausse appli­ca­tion, l’arti­cle 1er de la Constitution et par refus d’appli­ca­tion les arti­cles 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, 9 de la Convention euro­péenne de sau­ve­garde des droits de l’Homme et des liber­tés fon­da­men­ta­les et l’arti­cle L. 1132-1 du code du tra­vail ;

ALORS, D’AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, OU’aux termes de l’arti­cle L. 1121- l du code du tra­vail, nul ne peut appor­ter aux droits des per­son­nes et aux liber­tés indi­vi­duel­les de res­tric­tions qui ne seraient pas jus­ti­fiées par la nature de la tâche à accom­plir et pro­por­tion­nées au but recher­ché ; qu’en affir­mant que le licen­cie­ment de Mme X..., lequel trou­vait son unique cause dans le fait que celle-ci por­tait, dans l’exer­cice de ses fonc­tions un « fou­lard en bonnet » mani­fes­tant son appar­te­nance reli­gieuse, sans recher­cher, ainsi que cela lui était demandé, si au regard des fonc­tions qu’elle exer­çait. les­quel­les ne la condui­saient pas à être en contact avec les assu­rés, l’inter­dic­tion qui lui était ainsi faite de porter un « fou­lard en bonnet », était jus­ti­fiée au regard de la nature des tâches qu’elle avait à accom­plir et pro­por­tion­née au but recher­ché, la cour d’appel a privé sa déci­sion de base légale au regard de l’arti­cle L. 1121-1 du code du tra­vail et des arti­cles 1d1 de la Constitution, 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen et 9 de la Convention euro­péenne des droits de l’Homme et des liber­tés fon­da­men­ta­les

ALORS, EN OUTRE, QU’en disant que le licen­cie­ment était jus­ti­fié quand elle avait elle-même relevé que la sala­riée por­tait un simple « fou­lard en bonnet ». ce dont il résul­tait que l’inter­dic­tion qui lui avait été faite n’était pas pro­por­tion­née au but recher­ché, la cour d’appel a violé l’arti­cle L. 1121-1 du code du tra­vail et les arti­cles 1e de la Constitution, 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen et 9 de la Convention euro­péenne des droits de l’Homme.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infir­ma­tif atta­qué d’AVOIR débouté Mme X...de ses deman­des ten­dant à faire juger son licen­cie­ment sans cause réelle et sérieuse et à voir la CPAM de Seine-Saint-Denis et la DRASSIF condam­nées à lui payer une somme de 70. 000 € à titre de dom­ma­ges-inté­rêts ;

AUX MOTIFS QUE : « En l’espèce, le règle­ment inté­rieur de la caisse, au nom des prin­ci­pes de laï­cité et de neu­tra­lité et d’égalité de l’ensem­ble des usa­gers, avait notam­ment pro­hibé pour ses agents dans le cadre de leur exer­cice pro­fes­sion­nel dans un ser­vice public, le port de vête­ments ou d’acces­soi­res le posi­tion­nant clai­re­ment comme repré­sen­tant un groupe, une ethnie, une reli­gion ou une obé­dience poli­ti­que ou quel­que croyance que ce soit, le fait pour la sala­riée de ne pas renon­cer au port du fou­lard, signe osten­ta­toire mani­fes­tant ses croyan­ces reli­gieu­ses, pen­dant ses heures de tra­vail et sur son lieu de tra­vail alors qu’elle par­ti­ci­pait à l’exé­cu­tion d’un ser­vice public soumis au res­pect du prin­cipe de laï­cité et de neu­tra­lité cons­ti­tuait une cause réelle et sérieuse de licen­cie­ment ».

ALORS QU’aux termes de l’arti­cle L. 1321-3 du code du tra­vail, un règle­ment inté­rieur ne peut appor­ter aux droits des per­son­nes et aux liber­tés indi­vi­duel­les et col­lec­ti­ves des res­tric­tions qui ne seraient pas jus­ti­fiées par la tâche à accom­plir et pro­por­tion­nées au but recher­ché ; qu’à cet égard, un règle­ment inté­rieur ne sau­rait appor­ter de res­tric­tion géné­rale à l’exer­cice d’une liberté fon­da­men­tale ; qu’en déci­dant que le licen­cie­ment de Mme X...était fondé dès lors que celle-ci n’avait pas res­pecté le règle­ment inté­rieur de la caisse pri­maire d’assu­rance mala­die, lequel inter­di­sait pour­tant, de façon géné­rale, aux sala­riés de la caisse le port de vête­ments ou d’acces­soi­res mani­fes­te­ment leur appar­te­nance à un groupe, une ethnie, une reli­gion, une obé­dience poli­ti­que ou quel­que croyance que ce soit et com­por­tait ainsi une res­tric­tion géné­rale à l’exer­cice d’une liberté fon­da­men­tale, la cour d’appel a violé l’arti­cle L. 1321-3 du code du tra­vail, ensem­ble les arti­cles 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen et 9 de la Convention euro­péenne de sau­ve­garde des droits de l’Homme et des liber­tés fon­da­men­ta­les.


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