Loi santé, EHPAD et handicapés : déqualification des soins

danger déqualification soins

1er avril 2015

Les personnes les plus fragiles, personnes âgées et handicapées encouraient un risque majeur pour leur sécurité. Suite à la mobilisation des organisations infirmières, le 9 avril les Députés ont supprimés l’amendement de déqualification des soins voté le 19 mars : une victoire pour les patients, grâce aux infirmières !

Le 19 mars 2015, en Commission des Affaires Sociales, les dépu­tés ont adop­tés un arti­cle 30 bis (amen­de­ment AS872) des­tiné à per­met­tre la délé­ga­tion d’actes de soins infir­miers à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux. L’exposé des motifs pré­cise que l’amen­de­ment vise à per­met­tre à des pro­fes­sion­nels sala­riés non soi­gnants de réa­li­ser des actes tels que l’admi­nis­tra­tion de valium en cas de crise d’épilepsie convul­sive chez une per­sonne han­di­ca­pée ou encore des aspi­ra­tions tra­chéa­les.

Le SNPI a dénoncé aus­si­tôt le fait qu’un tra­vailleur social comme l’auxi­liaire de vie puisse mani­pu­ler des médi­ca­ments : http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Logique-par­le­men­taire-mefions-nous.html

Le diplôme d’Etat d’auxi­liaire de vie sociale (DEAVS) est de niveau CAP, la for­ma­tion a lieu en alter­nance et aucun diplôme n’est requis.

Suite à la mobi­li­sa­tion des orga­ni­sa­tions infir­miè­res, le 9 avril les Députés ont sup­pri­més l’amen­de­ment de déqua­li­fi­ca­tion des soins voté le 19 mars : http://www.assem­blee-natio­nale.fr/14/cri/2014-2015/20150208.asp#P507164

Article 30 bis

M. le pré­si­dent. Je suis saisi de deux amen­de­ments iden­ti­ques, nos 1409 et 2258.

La parole est à M. Philippe Vigier, pour sou­te­nir l’amen­de­ment no 1409.

M. Philippe Vigier. Par cet amen­de­ment, je vou­drai reve­nir sur l’arti­cle 30 bis, qui a été intro­duit lors de l’examen de ce projet de loi en com­mis­sion. Il risque de sou­le­ver un cer­tain nombre de dif­fi­cultés dans les établissements médico-sociaux dans les­quels la pré­sence d’une infir­mière n’est pas sys­té­ma­ti­que­ment assu­rée. Chacun sait que c’est assez fré­quent.

Cet arti­cle permet à cer­tains per­son­nels non médi­caux et non-soi­gnants d’effec­tuer, dans cer­tains cas, des actes infir­miers en l’absence même de per­son­nel infir­mier.

En pre­mier lieu, il convient de sou­li­gner que ces établissements médico-sociaux, notam­ment ceux qui sont char­gés d’accueillir des enfants et des ado­les­cents, ont l’obli­ga­tion régle­men­taire de dis­po­ser d’une infir­mière à temps plein. La légis­la­tion pour­suit ainsi un objec­tif de sécu­ri­sa­tion des soins qui me paraît aller dans le bon sens. S’il est vrai que l’absence d’infir­mière s’avère pro­blé­ma­ti­que, elle ne peut être pal­liée de cette manière.

En second lieu, la nou­velle dis­po­si­tion auto­rise les per­son­nels non-soi­gnants à effec­tuer des actes inva­sifs d’admi­nis­tra­tion de sub­stan­ces toxi­ques à des enfants et des ado­les­cents en dehors de tout contrôle des pro­fes­sion­nels de santé. C’est la raison pour laquelle nous sou­hai­tons par cet amen­de­ment sup­pri­mer cette dis­po­si­tion intro­duite en com­mis­sion.

M. le pré­si­dent. La parole est à Mme Dominique Orliac, pour sou­te­nir l’amen­de­ment no 2258.

Mme Dominique Orliac. Il est défendu.

(Les amen­de­ments iden­ti­ques nos 1409 et 2258, accep­tés par la com­mis­sion et le Gouvernement, sont adop­tés et l’arti­cle 30 bis est sup­primé.)

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Les syn­di­cats d’infir­miers libé­raux ont également com­mu­ni­qué :

Délégation d’actes de soins infir­miers à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux : le Sniil œuvre à la sup­pres­sion de cette mesure

Paris, 1er avril 2015.- Prévoyant de pou­voir délé­guer des actes de soins infir­miers à des pro­fes­sion­nels des établissement et ser­vi­ces médico-sociaux, l’arti­cle 30 bis du projet de loi rela­tif à la Santé a été rajouté en cati­mini et sur la seule pro­po­si­tion de cinq dépu­tés lors de l’examen du texte par la Commission des Affaires Sociales.

Le Sniil, comme l’ensem­ble des syn­di­cats infir­miers libé­raux, s’insurge évidemment contre cette dis­po­si­tion et dénonce une mesure par­ti­cu­liè­re­ment grave pour la popu­la­tion fran­çaise.

En effet, dans l’exposé des motifs de ce qui est devenu l’arti­cle 30 bis, il est indi­qué que cette clause vise, notam­ment, « à per­met­tre à des pro­fes­sion­nels sala­riés non soi­gnants de réa­li­ser des actes tels que l’admi­nis­tra­tion de valium en cas de crise d’épilepsie convul­sive chez une per­sonne han­di­ca­pée ». Ce qui revient, au final, à per­met­tre à des auxi­liai­res de vie sociale dont 79% ne sont titu­lai­res d’aucun diplôme (Rapport d’infor­ma­tion déposé par le comité d’évaluation et de contrôle des poli­ti­ques publi­ques sur l’évaluation du déve­lop­pe­ment des ser­vi­ces à la per­sonne pré­senté par Mmes Pinville et Poletti, Assemblée natio­nale, décem­bre 2014) de pro­cé­der à des actes inva­sifs et/ou d’admi­nis­tra­tion de sub­stan­ces véné­neu­ses

Et que tout ceci pourra s’effec­tuer en dehors de tout contrôle de pro­fes­sion­nels de santé puisqu’une pré­sence d’infir­mière n’est pas obli­ga­toire ni auto­ma­ti­que dans cer­tains des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux men­tion­nés à l’arti­cle L. 312-1 (ceux pré­ci­sés dans l’arti­cle 30 bis).

Ne se conten­tant pas de dénon­cer publi­que­ment cette mesure, mais pré­fé­rant tou­jours asso­cier des actes à ses prises de posi­tion, le Sniil, pre­mier syn­di­cat infir­mier libé­ral, a donc aus­si­tôt réagi : œuvrant au sein du Collège Infirmier Français, où il est le seul repré­sen­tant de l’exer­cice libé­ral, pour qu’un amen­de­ment de sup­pres­sion de cet arti­cle 30 bis soit déposé à l’Assemblée Nationale.

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Fédération Nationale des Infirmiers : Citoyens, mobi­li­sez-vous !
Avec les nou­vel­les mesu­res du projet de loi, vous serez soi­gnés à vos ris­ques et périls.

Les nou­vel­les mesu­res du projet de loi santé déman­tè­lent le métier d’infir­mière en confiant les actes qui leurs sont réser­vés aux per­son­nels des établissements médico-sociaux. Les per­son­nes les plus fra­gi­les, per­son­nes âgées et han­di­ca­pées encou­rent un risque majeur pour leur sécu­rité.

La Fédération Nationale des Infirmiers (FNI) appelle à la résis­tance et au réveil citoyen pour sau­ve­gar­der les inté­rêts et la sécu­rité des patients.

Une nou­velle dis­po­si­tion (¹) du projet de loi de santé pré­voit que « les actes de soins infir­miers peu­vent être délé­gués à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux ».
Cette nou­velle dis­po­si­tion du projet de loi de santé expose les patients à des ris­ques pour leur santé inac­cep­ta­bles autant qu’elle sonne le glas du métier d’infir­mière.

Aujourd’hui, seule une infir­mière diplô­mée d’État est habi­li­tée à inter­ve­nir auprès d’un patient pour réa­li­ser toute une série d’actes tech­ni­ques (injec­tions, per­fu­sions, réa­li­sa­tion et sur­veillance de pan­se­ments spé­ci­fi­ques, pose de sonde, soins de bouche, prise de sang, soins pal­lia­tifs…).

En confiant ces actes aux seules infir­miè­res (²), les pou­voirs publics enten­daient jusqu’à pré­sent garan­tir la sécu­rité des soins par des pro­fes­sion­nels titu­lai­res d’un diplôme d’État obtenu après 3 ans d’études. Ce n’est plus le cas.

Peut-on nous faire croire que des pro­fes­sion­nels formés tout au mieux de façon suc­cincte et ponc­tuelle pour­ront rem­pla­cer des infir­miè­res spé­cia­le­ment for­mées « à la sur­veillance cli­ni­que et à l’appli­ca­tion des pres­crip­tions médi­ca­les conte­nues » (²) ?
Demain, si cette mesure est adop­tée, tout aide-soi­gnant, voire auxi­liaire de vie, pourra inter­ve­nir pour accom­plir des actes aujourd’hui réser­vés aux infir­miè­res.

La FNI affirme que per­sonne ne peut garan­tir qu’au-delà du geste tech­ni­que lui-même, ces pro­fes­sion­nels aides-soi­gnants ou appa­ren­tés sau­ront détec­ter les symp­tô­mes d’alerte chez les per­son­nes par­ti­cu­liè­re­ment fra­gi­les.

Ce danger concerne notam­ment les per­son­nes admi­ses en Service de Soins Infirmiers À Domicile (Ssiad), struc­tu­res qui comme leur nom ne l’indi­que pas, emploient des aides-soi­gnants pour les toi­let­tes et font aujourd’hui appel à des infir­miè­res libé­ra­les pour les soins infir­miers.

Ce danger concerne les per­son­nes héber­gées en maison de retraite médi­ca­li­sée (Ehpad) ou dans les établissements pour per­son­nes han­di­ca­pées.

La FNI dénonce les argu­ments de façade et les faux pré­tex­tes qui condui­sent à des mesu­res dont le seul objet est de sou­la­ger les dépen­ses d’assu­rance mala­die en bra­dant les soins.

La FNI sou­li­gne que dans un sys­tème de soins ultra-admi­nis­tré, les erreurs com­mi­ses et leurs consé­quen­ces seront effec­ti­ve­ment beau­coup plus faci­le­ment occultées que dans le sys­tème actuel où chaque infir­mière libé­rale est juri­di­que­ment res­pon­sa­ble de ses actes.

Aucun argu­ment ne peut jus­ti­fier de relé­guer la sécu­rité des patients au second plan, après des impé­ra­tifs comp­ta­bles ou de com­mo­dité.

La FNI main­tient que si d’un point de vue finan­cier les tutel­les peu­vent espé­rer des économies, la réa­lité sera tout autre. Mais d’ici là, les patients, leur famille et les infir­miè­res paie­ront les pots cassés.

La FNI invite la pro­fes­sion, les asso­cia­tions de patients, les corps inter­mé­diai­res, les relais d’opi­nion et le grand public à réagir avec elle pour sau­ve­gar­der la santé des plus fra­gi­les.

(1) L’arti­cle 30 bis du projet de loi santé dis­pose que : « L’arti­cle L. 313-26 du code de l’action sociale et des famil­les est com­plété par un alinéa ainsi rédigé : « Un décret pré­cise les condi­tions dans les­quel­les les actes de soins infir­miers peu­vent être délé­gués à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux men­tion­nés à l’arti­cle L. 312-1. »

(2) La régle­men­ta­tion actuelle pré­cise que :
- « Les soins infir­miers, pré­ven­tifs, cura­tifs ou pal­lia­tifs, intè­grent qua­lité tech­ni­que et qua­lité des rela­tions avec le malade » ;
- L’infir­mier par­ti­cipe « à la pré­ven­tion, à l’évaluation et au sou­la­ge­ment de la dou­leur et de la détresse phy­si­que et psy­chi­que des per­son­nes » ;
- « L’infir­mier ou l’infir­mière a com­pé­tence pour pren­dre les ini­tia­ti­ves et accom­plir les soins qu’il juge néces­sai­res ».
Décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 rela­tif aux par­ties IV et V (dis­po­si­tions régle­men­tai­res) du code de la santé publi­que.

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PL Santé – arti­cle 30 bis : Délégation d’actes infir­miers à des pro­fes­sion­nels non soi­gnants des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux

L’Ordre infir­mier conteste vigou­reu­se­ment une mesure non concer­tée intro­duite par voie d’amen­de­ment en Commission des Affaires socia­les, et confirme avoir entre­pris, dès le 20 mars, les démar­ches néces­sai­res auprès du Ministère et du Parlement pour s’assu­rer de sa sup­pres­sion.

L’amen­de­ment, d’ini­tia­tive par­le­men­taire, intro­duit par la Commission des Affaires socia­les sous la forme d’un arti­cle addi­tion­nel après l’arti­cle 30 sou­lève une ques­tion grave pour la sécu­rité des soins. Dans cer­tains établissements sociaux et médico-sociaux, la pré­sence d’infir­mière n’est pas sys­té­ma­ti­que­ment assu­rée. Il vise donc à per­met­tre que cer­tains pro­fes­sion­nels non médi­caux et non soi­gnants puis­sent effec­tuer des actes infir­miers en l’absence d’un infir­mier ou d’un méde­cin.

« On ne peut sacri­fier la sécu­rité des patients à des objec­tifs d’économie et de ration­ne­ment des soins » affirme Didier BORNICHE, Président de l’Ordre natio­nal des infir­miers. « J’ai rap­pelé fer­me­ment aux Parlementaires à l’ini­tia­tive de la mesure que les établissements médico-sociaux - notam­ment ceux char­gés d’accueillir les enfants et ado­les­cents - ont l’obli­ga­tion régle­men­taire, en vertu du Code de l’action sociale et des famil­les de dis­po­ser d’une infir­mière à temps plein » et d’ajou­ter « Cette norme a un évident objec­tif de garan­tie de sécu­rité des rési­dants de ces établissements et doit être appli­quée ».

Dans les faits, ce nouvel arti­cle revient « à auto­ri­ser à des per­son­nels non soi­gnants d’effec­tuer des actes inva­sifs et d’admi­nis­tra­tion de sub­stan­ces véné­neu­ses à des enfants et des ado­les­cents en dehors de tout contrôle par les pro­fes­sion­nels » pré­cise Didier BORNICHE. L’Ordre Infirmier, qui dans le cadre de l’examen du texte, a pro­posé de nom­breux amen­de­ments allant dans le sens de la sécu­rité et de la qua­lité des prises en charge, a lar­ge­ment informé les par­le­men­tai­res des consé­quen­ces de l’adop­tion d’une telle mesure. Des contacts ont été enga­gés avec le Ministère et les grou­pes poli­ti­ques depuis le vote du texte par la Commission des affai­res socia­les, afin d’expli­quer les dan­gers d’une telle mesure. D’ores et déjà des garan­ties ont été trans­mi­ses sur la sup­pres­sion de cet arti­cle, soit en séance publi­que, soit lors de la navette par­le­men­taire avec le Sénat.

Cependant, au cours de l’examen du texte, l’Ordre entend main­te­nir son action jusqu’à la sup­pres­sion offi­cielle de l’arti­cle. Le CNOI conti­nuera donc d’infor­mer de façon péda­go­gi­que ses inter­lo­cu­teurs ins­ti­tu­tion­nels.

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