Cancer de la prostate : rôle de l’infirmière praticienne spécialisée

infirmière praticienne spécialisée

11 novembre 2015

"Le rôle de l’infirmière praticienne spécialisée en première ligne dans la trajectoire des soins reliés au cancer de la prostate", Julie Roussel, Faculté des Sciences Infirmières, Université Laval, Québec.

Dans cet essai de maî­trise, Julie Roussel exa­mine com­ment l’infir­mière pra­ti­cienne spé­cia­li­sée en soins de pre­mière ligne (IPSPL) peut contri­buer à chaque étape de la tra­jec­toire de soins du cancer de la pros­tate et quelle forme peut revê­tir le rôle de l’IPSPL dans trois domai­nes d’inter­ven­tion : la pra­ti­que cli­ni­que pré­ven­tive, le dépis­tage du cancer ainsi que l’accom­pa­gne­ment des per­son­nes attein­tes du cancer et ses pro­ches.

La nette aug­men­ta­tion de l’inci­dence et de la pré­va­lence des can­cers, notam­ment celui de la pros­tate, entraîne des chan­ge­ments dans la pres­ta­tion des soins. Les acteurs de pre­mière ligne, dont l’IPSPL fait partie, ont besoin d’adap­ter leur pra­ti­que en lien avec cette pré­va­lence. Ils doi­vent tra­vailler en amont du pro­blème par l’inté­gra­tion des pra­ti­ques cli­ni­ques pré­ven­ti­ves (PCP) et ajus­ter leurs inter­ven­tions pour qu’elles soient cohé­ren­tes avec les don­nées pro­ban­tes.

En outre, des chan­ge­ments sont sur­ve­nus en lien avec la pres­ta­tion des PCP. Autrefois, le cli­ni­cien pro­fi­tait du moment de l’examen médi­cal pério­di­que pour évaluer les fac­teurs de risque du patient, pro­cé­der à l’examen phy­si­que exhaus­tif et for­mu­ler ses recom­man­da­tions quant à l’adop­tion de com­por­te­ments pro­pi­ces à la santé. Toutefois, les nou­vel­les lignes direc­tri­ces du CMQ (2015) recom­man­dent à ses mem­bres de ne plus exer­cer d’EMP. Ces recom­man­da­tions sont basées sur les don­nées pro­ban­tes qui sug­gè­rent que l’exer­cice de l’EMP chez des per­son­nes en bonne santé n’aurait pas d’impact sur la réduc­tion du taux de mor­bi­dité et de mor­ta­lité.

L’IPSPL doit révi­ser sa pra­ti­que et l’adap­ter à ces nou­vel­les recom­man­da­tions. Elle doit opti­mi­ser l’inté­gra­tion des PCP démon­trées effi­ca­ces par les études autre­ment que dans la pres­ta­tion de l‘EMP. Elle doit saisir toutes les occa­sions avec ses patients pour parler pré­ven­tion et offrir le dépis­tage.

L’IPSPL pos­sède les com­pé­ten­ces pour conseiller, coa­cher et guider le patient afin qu’il adopte de saines habi­tu­des de vie. En uti­li­sant le modèle Transthéorique de Prochaska (1992), l’infir­mière adapte son dis­cours aux pro­ces­sus de chan­ge­ment du patient afin de l’amener vers le stade sui­vant. Bien que ce modèle connaisse une grande popu­la­rité auprès des inter­ve­nants de la pre­mière ligne, il a été peu validé par des preu­ves scien­ti­fi­ques. L’entre­tien moti­va­tion­nel serait la tech­ni­que à pri­vi­lé­gier, en com­bi­nai­son avec le MTT, afin de faire émerger la moti­va­tion intrin­sè­que du client pour effec­tuer un chan­ge­ment de com­por­te­ment per­sis­tant dans le temps. Il faut donc maxi­mi­ser le rôle de l’IPSPL en pro­mo­tion de la santé et en pré­ven­tion des mala­dies.

Une contro­verse per­siste dans les PCP et concerne le dépis­tage du cancer de la pros­tate. Étant donné le tableau géné­ra­le­ment asymp­to­ma­ti­que du cancer de la pros­tate au stade loca­lisé et le peu de fac­teurs de risque pou­vant être modi­fié, le dépis­tage du cancer de la pros­tate peut paraî­tre un bon moyen de détec­ter ce cancer à un stade pré­coce. Cependant, ce dépis­tage à l’aide du test san­guin APS et le tou­cher rectal est remis en doute, car la majo­rité des études ne sont pas par­ve­nues à démon­trer son impact sur la réduc­tion de la mor­ta­lité reliée à ce cancer. De plus, le dépis­tage sys­té­ma­ti­que entraîne des ris­ques de sur­diag­nos­tic et de sur­trai­te­ment.

Les recom­man­da­tions des dif­fé­ren­tes orga­ni­sa­tions médi­ca­les diver­gent quant à la pra­ti­que du dépis­tage du cancer de la pros­tate semant ainsi la confu­sion dans la pra­ti­que de cette inter­ven­tion chez les cli­ni­ciens. Malgré les conclu­sions de l’USPSTF basées sur les don­nées pro­ban­tes, le Collège des Médecins recom­mande à ses mem­bres d’offrir le dépis­tage aux hommes âgés de 55 à 70 ans.

L’IPSPL doit se posi­tion­ner devant ce dilemme. Toutefois, il appa­rait judi­cieux de suivre les recom­man­da­tions du Collège en inté­grant à cette recom­man­da­tion les prin­ci­pes de la prise de déci­sion par­ta­gée. Conséquemment, l’IPSPL doit être infor­mée sur les dif­fé­rents ris­ques asso­ciés au dépis­tage et du peu de béné­fi­ces pos­si­bles, puis trans­met­tre les résul­tats des dif­fé­ren­tes études aux patients. Elle peut également uti­li­ser les divers outils d’aide à la prise de déci­sion sur le dépis­tage du cancer de la pros­tate afin de bien conseiller ses patients. Ainsi, le patient impli­qué dans la prise de déci­sion opte pour l’alter­na­tive inhé­rente à ses valeurs.

Les hommes atteints du cancer de la pros­tate et leurs pro­ches expé­ri­men­tent plu­sieurs défis aux­quels ils doi­vent s’adap­ter. Les symp­tô­mes phy­si­ques et psy­cho­lo­gi­ques reliés au cancer et à ses trai­te­ments sont fré­quents. L’IPSPL doit être à l’affût des besoins du patient et de ses pro­ches et de les recher­cher dans son ques­tion­naire à chaque consul­ta­tion.

L’outil de dépis­tage de la détresse peut être utile afin d’évaluer l’état psy­cho­lo­gi­que du patient. Suite à son ana­mnèse et son examen phy­si­que, elle peut sug­gé­rer dif­fé­rents trai­te­ments phar­ma­co­lo­gi­ques ou non phar­ma­co­lo­gi­ques et effec­tuer des réfé­ren­ces avec d’autres pro­fes­sion­nels de la santé si elle le juge néces­saire.

En conclu­sion, l’IPSPL peut jouer un rôle déter­mi­nant à chaque étape de la tra­jec­toire de soins du cancer, de la pré­ven­tion à l’accom­pa­gne­ment et peut contri­buer à mieux sou­te­nir le patient et ses pro­ches dans cette expé­rience.

Source : "Le rôle de l’infir­mière pra­ti­cienne spé­cia­li­sée en pre­mière ligne dans la tra­jec­toire des soins reliés au cancer de la pros­tate", Julie Roussel, Faculté des Sciences Infirmières, Université Laval, Québec. http://www.sidiief.org/le-role-de-lin­fir­miere-pra­ti­cienne-spe­cia­li­see-en-pre­miere-ligne-dans-la-tra­jec­toire-des-soins-relies-au-cancer-de-la-pros­tate/?utm_source=Openfield&utm_medium=email&utm_cam­paign=B2721208

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