68% des infirmières refusent une première année d’étude commune aux professions paramédicales

10 novembre 2015

Du 2 au 9 novembre 2015, 20.585 infirmières, cadres infirmiers ou infirmières spécialisées ont répondu pour anticiper les travaux de la Grande Conférence de Santé de février 2016.

Dans le cadre des tra­vaux de la "Grande Conférence de Santé", le minis­tère oriente les débats des grou­pes de tra­vail « for­ma­tion » et « métiers » vers un pos­si­ble « tronc commun » dans le cadre de la for­ma­tion de l’ensem­ble des pro­fes­sion­nels médi­caux et para­mé­di­caux, au nom de l’inter­dis­ci­pli­na­rité.

Le SNPI CFE CGC, syn­di­cat des infir­miers sala­riés, a sou­haité lancer une consul­ta­tion auprès des pro­fes­sion­nels, au tra­vers de son site inter­net. Du 2 au 9 novem­bre 2015, 20.585 infir­miè­res, cadres infir­miers ou infir­miè­res spé­cia­li­sées ont répondu : 68 % de ces pro­fes­sion­nels infir­miers sont hos­ti­les à une pre­mière année com­mune aux for­ma­tions para­mé­di­ca­les (14.018 répon­ses contre, 6.567 répon­ses pour).

Des mil­liers d’infir­miè­res répon­daient chaque jour, signe d’un inté­rêt cer­tain sur la ques­tion. Les répon­ses se fai­saient par mail, ce qui per­met­tait d’éviter les dou­blons (un seul vote comp­ta­bi­lisé par adresse mail). La syn­thèse est en télé­char­ge­ment en bas de page. Il est tou­jours pos­si­ble de voter jusqu’en fin d’année : http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Consultation-infir­miere-pour-ou,2295.html

Une très large consul­ta­tion : 20.585 répon­ses !

Déjà en 2013, lors du débat par­le­men­taire sur la loi rela­tive à l’ensei­gne­ment supé­rieur et la recher­che, un amen­de­ment sou­tenu par le député Olivier Véran visait à créer, à titre expé­ri­men­tal, une pre­mière année com­mune à cer­tai­nes for­ma­tions para­mé­di­ca­les, sur le même modèle de l’actuelle Première année com­mune des études de santé (PACES) mise en place à la ren­trée uni­ver­si­taire 2010-2011 pour les for­ma­tions médi­ca­les, odon­to­lo­gi­ques, phar­ma­ceu­ti­ques et de maïeu­ti­que.

Grâce à la mobi­li­sa­tion du SNPI, en 2013 les séna­teurs avaient alors expres­sé­ment écarté les étudiants en soins infir­miers du dis­po­si­tif d’une pre­mière année com­mune au motif que « compte tenu de ses spé­ci­fi­ci­tés, la pro­fes­sion d’infir­mier fait l’objet d’une régle­men­ta­tion impor­tante au sein du Code de la santé publi­que, qui semble dif­fi­ci­le­ment com­pa­ti­ble avec les exi­gen­ces de for­ma­tion appli­ca­bles à d’autres pro­fes­sions de santé » et que dans ces condi­tions « il ne paraît pas sou­hai­ta­ble qu’elle soit concer­née par l’expé­ri­men­ta­tion de nou­vel­les moda­li­tés d’admis­sion dans les for­ma­tions para­mé­di­ca­les ». Les syn­di­cats de kinés (FFMKR, SMKRP) s’étant ensuite mobi­li­sés contre la "L1 para­mé­di­cale" et pour passer en PACES, aucun texte d’appli­ca­tion n’est paru.

Le SNPI CFE-CGC avait déjà posé la même ques­tion en juin 2013, et 20.213 infir­miè­res, cadres infir­miers ou infir­miè­res spé­cia­li­sées avaient répondu. A l’époque, 64,65 % de ces pro­fes­sion­nels infir­miers étaient déjà hos­ti­les à une pre­mière année com­mune aux for­ma­tions para­mé­di­ca­les (13.068 répon­ses contre, 7.145 répon­ses pour). Ce rejet s’est donc ren­forcé. Nous ne sou­hai­tons pas que cer­tains se retrou­vent dans telle filière par dépit, au vu de ses résul­tats sco­lai­res. Nos pro­fes­sions doi­vent se faire par choix.

« On nous pousse vers l’inter­dis­ci­pli­na­rité au motif que les pro­fes­sion­nels de santé doi­vent se connaî­tre davan­tage, observe Thierry Amouroux, secré­taire géné­ral du SNPI. Outre le fait que cette orien­ta­tion nous semble davan­tage liée à des impé­ra­tifs économiques qu’à une amé­lio­ra­tion de l’effi­ca­cité de notre for­ma­tion, nous sou­hai­tons le res­pect des trois filiè­res pro­fes­sion­nel­les : soins infir­miers, médico-tech­ni­que, réé­du­ca­tion. Ces cours en commun seraient sur­tout utiles en 3ème année, car là les étudiants de chaque filière ont une meilleure connais­sance de leur futur métier, et la col­la­bo­ra­tion inter­pro­fes­sion­nelle y aurait tout son sens". »

Le main­tien des filiè­res pro­fes­sion­nel­les

Les infir­miè­res sont hos­ti­les à l’idée d’une "L1 para­mé­di­cale" sur le modèle de cette "L1 santé" créée par la loi du 7 juillet 2009 : il n’est pas néces­saire de faire une année com­mune pour mettre en place quel­ques cours trans­ver­saux, ou donner des notions de base concer­nant chaque métier afin de mieux pren­dre en charge le patient et de mieux com­pren­dre le tra­vail de chacun.

Ces for­ma­tions ont réflé­chi à leurs conte­nus : une nou­velle modi­fi­ca­tion ne ferait qu’ajou­ter de la confu­sion dans les dif­fé­ren­tes filiè­res. Les moda­li­tés ne sont pas les mêmes, les socles des métiers ne sont pas les mêmes, les fina­li­tés ne sont pas les mêmes ! Il serait sans doute plus inté­res­sant de ren­for­cer dans chaque filière, l’inter­dis­ci­pli­na­rité, la trans­dis­ci­pli­na­rité. Mais il faut res­pec­ter le cœur de métier.

Pour Thierry Amouroux, le Secrétaire Général du SNPI CFE-CGC, "cela irait à l’encontre de l’appro­che par com­pé­ten­ces des nou­veaux réfé­ren­tiels de for­ma­tion issus de la réforme LMD des pro­fes­sions de santé. En scien­ces humai­nes, les étudiants en socio­lo­gie, scien­ces de l’éducation ou psy­cho­lo­gie ont des UE trans­ver­sa­les (métho­do­lo­gie, sta­tis­ti­que, anglais, etc) ce n’est pas pour autant que l’on a créé une pre­mière année com­mune de scien­ces humai­nes !"

Par contre, qu’en 3ème année de for­ma­tion il y ait des troncs com­muns avec les autres étudiants arri­vant eux aussi en fin de for­ma­tion, serait un plus. Ceci per­met­trait cer­tains cours et réflexions com­mu­nes sur des sujets com­muns (éthique, tra­vail en équipe, réflexions sur le tra­vail plu­ri­dis­ci­pli­naire…) et amé­lio­re­rait sure­ment les rela­tions par la suite, pour le plus grand béné­fice des soi­gnés.

Dans les autres pays de l’Union Européenne et dans les pays anglo-saxons, il y a depuis des décen­nies des filiè­res en scien­ces infir­miè­res : pour­quoi un tel retard en France ? Lors de la réforme de 2009, la France a déjà été le 24ème pays sur 27 à entrer dans le sys­tème LMD ! Nous de sou­hai­tons pas la dis­so­lu­tion des IFSI dans des ins­ti­tuts régio­naux de for­ma­tion para­mé­di­cale for­mant les 14 pro­fes­sions de santé régle­men­tées.

Le SNPI réclame une véri­ta­ble filière LMD en scien­ces infir­miè­res :
 avec une vrai Licence infir­mière, débou­chant en 6 semes­tres sur un diplôme de Licence, et non une simple reconnais­sance de grade comme aujourd’hui (Licence pour les IDE, master pour les IADE)
 un vrai master pour les infir­miè­res spé­cia­li­sées, les cadres de santé (option ges­tion ou péda­go­gie) et les infir­miè­res de pra­ti­ques avan­cées (loi de santé), mais aussi en santé men­tale et en santé au tra­vail.

Méthodologie uti­li­sée :
 envoi d’une news­let­ter à 33.085 abon­nés le 2 novem­bre 2015
 le site du SNPI enre­gis­tre 2714 connexions par jour, le son­dage étant en une

Quelques réac­tions de ter­rain, dans le cadre de la consul­ta­tion SNPI :

Arguments des pour :
 Les infir­miè­res en seraient les prin­ci­pa­les béné­fi­ciai­res en rele­vant le niveau de leurs études, qui est en deçà des autres para­mé­di­caux.
 cela per­met­trait peut être d’éviter tous les "abon­dons" au cours de la pre­mière année
 POUR une pre­mière année com­mune aux for­ma­tions para­mé­di­ca­les.... à la condi­tion que cette année vienne en PLUS des 3 années d’études (soit 4 années d’études comme les kinés)
 Votre argu­ment de choix par dépit et en fonc­tion des résul­tats se pra­ti­que mal­heu­reu­se­ment déjà : on s’ins­crit à l’IFSI par échec en méde­cine ou en kiné…
 ce qui per­met­trait aux étudiants de peau­fi­ner leur choix et de s’orien­ter en meilleure connais­sance

Arguments des contre :
 il faut conser­ver nos spé­ci­fi­ci­tés et non se faire noyer dans la masse !!!
 Avec un tronc commun, la pre­mière année serait consa­crée à la décou­verte de tous ces métiers, le risque pour les deux années sui­van­tes serait le manque de temps pour pou­voir abor­der tout le pro­gramme et/ou une insuf­fi­sance d’appro­fon­dis­se­ment des thèmes abor­dés. Il fau­drait alors aug­men­ter d’une année sup­plé­men­taire la for­ma­tion.
 Devenir Infirmière doit être un choix réflé­chi et non un " lot de conso­la­tion" !!!
 l’argu­ment des aban­dons de pre­mière année est fal­la­cieux : ils seront encore plus nom­breux et for­cé­ment repor­tés sur la 2ème année, ces aban­dons fai­sant en prin­cipe suite aux stages qui per­met­tent aux étudiant de se confron­ter à la réa­lité du ter­rain...
 Pour une filière propre ! Il faut arrê­ter de tout mélan­ger !
 les 3 années actuel­les de for­ma­tion sont déjà insuf­fi­san­tes pour per­met­tre aux étudiants d’acqué­rir l’ensem­ble des connais­san­ces et des com­pé­ten­ces néces­sai­res à l’exer­cice du métier d’infir­mier. Il me semble que ce dis­po­si­tif rédui­rait encore ce temps. Dans ce cas, quid de l’acqui­si­tion des com­pé­ten­ces et des savoirs "cœur de métier" ?
 la plu­ri­dis­ci­pli­na­rité et la coor­di­na­tion avec d’autres pro­fes­sion­nels sont déjà inclu­ses dans le pro­gramme dans le cadre de l’UE 3.3 " Rôles infir­miers, orga­ni­sa­tion du tra­vail et inter­pro­fes­sion­na­lité" et sont vécues lors des 6 stages cli­ni­ques.
 Même si notre objec­tif commun est la prise en charge de qua­lité du patient, gar­dons nos spé­ci­fi­ci­tés de for­ma­tions et retrou­vons nous dans un cadre d’échange des pra­ti­ques par exem­ple
 la for­ma­tion d’infir­mière doit être un choix réflé­chi et bien struc­turé

Si vous avez reçu notre news­let­ter, merci d’uti­li­ser la fonc­tion "répon­dre au mail". Autrement, vous pouvez nous écrire à snpic­fecgc@ yahoo.fr, en indi­quant sim­ple­ment (par copier/coller) :

POUR une pre­mière année com­mune aux for­ma­tions para­mé­di­ca­les

CONTRE une pre­mière année com­mune aux for­ma­tions para­mé­di­ca­les

Bien entendu, vous pouvez aussi nous faire par­ta­ger nos réflexions.

Merci de votre par­ti­ci­pa­tion à cette consul­ta­tion infir­mière, que vous soyez IDE, cadre infir­mier ou infir­mière spé­cia­li­sée.

Pour plus de détails :
 Formation para­mé­di­cale : une pre­mière année com­mune pour dis­sou­dre la filière infir­mière ? http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Formation-para­me­di­cale-une.html
 Groupe for­ma­tion de la Grande confé­rence de la santé GCS http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Groupe-for­ma­tion-de-la-Grande.html
 Métiers – com­pé­ten­ces - res­pon­sa­bi­li­tés GCS http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Metiers-com­pe­ten­ces.html

Document(s) joint(s) à l'article
Bilan consultation tronc commun - (329.1 kio) - PDF
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