Dépeçage de l’AP-HP : plan stratégique de fermetures d’hôpitaux

22 janvier 2010

L’Hôtel Dieu en dispensaire ? Fermeture de Beaujon, Paul Brousse, Fernand Widal, St Vincent de Paul ? Trousseau dépecé pour ne laisser que deux CHU de pédiatrie sur Paris ?

Dans le cadre de la pré­pa­ra­tion du plan stra­té­gi­que 2010-2014, le conseil exé­cu­tif de l’AP-HP (com­posé à parité de direc­teurs et de méde­cins) vient de déci­der la fer­me­tu­res de plu­sieurs hôpi­taux dans les années à venir :
 fusion des hôpi­taux Bichat et Beaujon, en "un seul hôpi­tal moderne au nord du Grand Paris", selon Benoît Leclercq le DG de l’AP-HP.
 « toutes les acti­vi­tés lour­des qui sont à l’Hôtel-Dieu seront concen­trées à Cochin ». Avec humour, le grand fos­soyeur le l’AP-HP pré­cise que les urgen­ces y res­te­ront, avec un pla­teau tech­ni­que ambu­la­toire. Sans blocs ni chi­rur­gie ? De qui se moque t-on ?
 Paul Brousse va être dépecé en faveur de Bicêtre, en atten­dant sa fer­me­ture.
 les acti­vi­tés de Fernand-Widal pas­se­ront à Lariboisière.
 les ser­vi­ces de pédia­trie spé­cia­li­sée de Trousseau (70 % de son acti­vité) vont partir sur les deux autres grands pôles pédia­tri­ques que sont Robert Debré et Necker. Ne res­te­raient sur Trousseau que la mater­nité et la pédia­trie géné­rale. Les parents qui atten­dent déjà des heures aux urgen­ces et doi­vent patien­ter des semai­nes pour des consul­ta­tions dans les trois CHU pédia­tri­ques res­tant vont être ravis d’appren­dre que demain il n’y en aura plus que deux pour une "meilleure effi­cience" !

Quel est l’objec­tif affi­ché de ces "restruc­tu­ra­tions" : « per­mette à tous les patients d’accé­der à la fois à des soins de proxi­mité et à des soins de pointe de qua­lité » expli­que le direc­teur géné­ral. Cyniquement votre !

Est ce la réponse de l’AP-HP à la publi­ca­tion du rap­port du Médiateur de la République sur la mal­trai­tance ordi­naire à l’hôpi­tal du fait du manque de moyens et des sup­pres­sions de postes de soi­gnants ?

Les hôpi­taux de Paris se pré­pa­rent à une véri­ta­ble sai­gnée en 2010 : après une dimi­nu­tion de 700 postes en 2009, l’AP-HP devrait sup­pri­mer 1.000 emplois de soi­gnants(infir­miè­res, aides-soi­gnan­tes, secré­tai­res médi­ca­les) et 150 postes de méde­cins. Dans une inter­view accor­dée à Le Parisien-Aujourd’hui en France le 23 jan­vier der­nier, le Directeur géné­ral (DG) de l’Assistance publi­que-hôpi­taiux de Paris (AP-HP), Benoît Leclercq, est revenu sur son projet de regrou­pe­ment des 37 établissements en 12 grou­pes de soins, que le conseil exé­cu­tif vient d’approu­ver. Il a confirmé la sup­pres­sion, d’ici 2012, de 3 000 à 4 000 postes sur un total de 92 000. "La moitié envi­ron concer­nera les soi­gnants et les méde­cins, l’autre moitié le per­son­nel admi­nis­tra­tif", pré­cise-t-il.

"Supprimer des postes, fermer des ser­vi­ces et des hôpi­taux, va encore réduire l’offre de soins alors que nous fonc­tion­nons déjà à flux tendus. En agis­sant ainsi, l’admi­nis­tra­tion va créer les condi­tions pour conduire à des erreurs médi­ca­les : étant en pre­mière ligne, les infir­miè­res sont mises en situa­tion de com­met­tre des erreurs." pré­cise Thierry Amouroux, le Secrétaire Général du SNPI, le syn­di­cat infir­mier de la CFE-CGC.

"Chaque jour, à chaque geste, chaque infir­mière vit avec cette épée de Damoclès au dessus de la tête. Nous sommes des êtres humains, et l’erreur est humaine. Nous exer­çons une pro­fes­sion à haut risque, et nous por­tons la plus grande res­pon­sa­bi­lité qui soit : celle de la vie d’autrui."

Les condi­tions de tra­vail à l’hôpi­tal se sont consi­dé­ra­ble­ment dégra­dées car les établissements doi­vent faire des économies, alors on rogne sur tout, et de nom­breux postes sont sup­pri­més, les pre­miè­res années chez les admi­nis­tra­tifs et les tech­ni­ques, main­te­nant chez les soi­gnants. La dégra­da­tion des condi­tions de tra­vail est telle que l’effec­tif normal est pra­ti­que­ment sem­bla­ble à l’effec­tif mini­mum du week-end, les repos dûs s’accu­mu­lent, et lors des vacan­ces sco­lai­res nous attei­gnons le point de rup­ture.

L’AP-HP doit en moyenne 19 jours de congés à son per­son­nel(situa­tion en décem­bre 2009). L’AP-HP doit à ses agents l’équivalent de 2.500 postes en jours de récu­pé­ra­tion, et les soi­gnants sont épuisés. Congés mala­dies, congés de mater­nité, for­ma­tion : l’absen­téisme repré­sente envi­ron 10 % des jours ouvrés tandis que les cré­dits de rem­pla­ce­ment repré­sen­tent 5 % de la masse sala­riale. Le ter­rain souf­fre de ce dif­fé­ren­tiel.

Le regrou­pe­ment des réa­ni­ma­tions de l’hôpi­tal Ambroise Paré, déci­dée par le siège, a abou­tit à la fer­me­ture le 4 novem­bre 2009 de la réa­ni­ma­tion chi­rur­gi­cale. L’acti­vité est désor­mais concen­trée sur le local de la réa­ni­ma­tion médi­cale : cette restruc­tu­ra­tion soit incom­pa­ti­ble avec la qua­lité des soins et la sécu­rité que les patients sont sus­cep­ti­bles d’atten­dre, en raison du niveau de concen­tra­tion des patients par
cham­bre. Les patients ayant besoin d’une réa­ni­ma­tion post opé­ra­toire ne vont pas dans le ser­vice actuel de réa­ni­ma­tion médi­cale mais res­tent au sein de la salle de réveil.

Selon l’Observatoire des ris­ques médi­caux (ORM), en 2006, sur 735 dos­siers, les actes de soins ont été la pre­mière cause d’acci­dent (80 %) après les actes de diag­nos­tic (11 %).

Plus d’infor­ma­tions :
 Comment l’erreur arrive : le point de rup­ture est atteint,
 Les patients paient le prix du manque de per­son­nel et des sur­char­ges de tra­vail,

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