L’orientation par l’infirmière : le chaînon manquant du parcours de soins

24 novembre 2024

En France, la profession infirmière se transforme silencieusement. Au-delà des soins traditionnels, une nouvelle expertise émerge : l’orientation des patients. Cette évolution va révolutionner la prise en charge des personnes âgées à domicile, en s’appuyant sur les 140.000 infirmiers libéraux, derniers professionnels de santé à se rendre chaque jour au domicile des patients.

Imaginez une infirmière libérale qui arrive chez Madame Martin, 82 ans. En quelques minutes d’observation, elle détecte une légère déshydratation, note un changement subtil dans la démarche et repère trois nouveaux médicaments sur la table de nuit. Ces détails, invisibles pour les non-initiés, déclenchent une série d’actions coordonnées qui éviteront peut-être une hospitalisation.

Cette expertise clinique, liée aux compétences mobilisées lors de la formation, et fruit d’années d’expérience, permet d’anticiper les complications. L’infirmière repère les signes avant-coureurs d’une dégradation de l’état de santé et va mobiliser les ressources nécessaires : soit faire appel à un professionnel plus qualifié, comme le médecin, soit à un autre professionnel plus spécialisé (kinésithérapeute, ergothérapeute, diététicienne, assistante sociale...).

"Le rôle d’orientation va bien au-delà du simple aiguillage vers d’autres professionnels. Il s’agit d’une véritable orchestration du parcours de santé. L’infirmière évalue l’autonomie, adapte l’environnement, prévient les chutes, coordonne les interventions et accompagne les transitions entre domicile et hôpital. La prévention de la perte d’autonomie devient un enjeu majeur. Chaque visite est l’occasion d’évaluer les capacités cognitives, de vérifier l’alimentation, d’adapter les traitements. Ce travail minutieux permet souvent d’éviter des hospitalisations en urgence et de maintenir la qualité de vie à domicile." précise Thierry Amouroux, le porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI.

Mais cette expertise des 700.000 infirmières généralistes reste encore dans l’ombre. Et la proposition de loi présentée par Mme Nicole DUBRE-CHIRAT et M. Frédéric VALLETOUX qui doit redéfinir la profession infirmière mentionne à peine ce rôle d’orientation. Selon ce projet de loi, "les missions de l’infirmier sont les suivantes :
 1° Dispenser des soins infirmiers préventifs, curatifs, palliatifs, relationnels ou destinés à la surveillance clinique, ainsi qu’à leur évaluation ;
 2° Contribuer à la coordination et à la mise en œuvre du parcours de santé de la personne ;
 3° Participer à la prévention, aux actions de dépistage et à la promotion de la santé et à l’éducation thérapeutique de la personne et, le cas échéant, de son entourage ;
 4° Concourir à la formation initiale et continue des étudiants, des pairs et des professionnels de santé placés sous leur responsabilité ainsi qu’à la recherche en sciences infirmières."

Le mot "orientation" n’apparait pas dans la mission "2° Contribuer à la coordination et à la mise en œuvre du parcours de santé de la personne". Pourtant, sur le terrain, les 700.000 infirmières développent déjà des compétences pointues : évaluation clinique approfondie, communication sensible, gestion de cas complexes, coordination d’équipe, soutien des aidants.

Les enjeux économiques sont considérables. Une orientation précoce et pertinente évite des hospitalisations coûteuses, optimise les ressources de santé et maintient l’autonomie plus longtemps. Dans un système de santé sous tension, cette expertise infirmière devient stratégique.

La reconnaissance officielle de ce rôle d’orientation devient urgente. Elle nécessite une formation renforcée, une valorisation financière et une intégration formelle dans les parcours de soins coordonnés. Les infirmières ne sont plus de simples exécutantes de soins, mais de véritables acteurs du parcours de santé.

Cette évolution répond aux défis du vieillissement de la population. Face à des situations de plus en plus complexes, l’expertise infirmière en orientation devient incontournable. Elle permet d’humaniser les parcours de soins tout en optimisant les ressources du système de santé.

L’avenir de notre système de santé se dessine peut-être là, dans cette capacité des infirmières à détecter précocement les fragilités, à coordonner les interventions et à maintenir l’autonomie. Une révolution silencieuse qui mérite enfin d’être reconnue et valorisée.

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Activités Infirmières pour l’Orientation des Personnes Âgées :

 1. Évaluer la capacité d’autonomie des personnes âgées en termes de mobilité, gestion des activités quotidiennes, etc.
 2. Évaluation cognitive : Utiliser des outils d’évaluation pour mesurer la cognition et détecter d’éventuels problèmes tels que la démence ou la confusion.
 3. Planification des soins : Élaborer des plans de soins personnalisés en fonction des besoins et des capacités spécifiques de chaque personne âgée.
 4. Travailler en collaboration avec d’autres professionnels de la santé, tels que les ergothérapeutes, les kinésithérapeutes et les travailleurs sociaux, pour assurer une prise en charge globale.
 5. Fournir des informations aux personnes âgées et à leurs familles sur les options de soins, les services disponibles et les stratégies pour maintenir l’indépendance.
 6. Évaluer et recommander des adaptations domiciliaires pour réduire les risques de chutes et améliorer la sécurité à domicile.
 7. Évaluer les besoins nutritionnels des personnes âgées et fournir des conseils sur une alimentation équilibrée.
 8. Collaborer avec les personnes âgées pour gérer les maladies chroniques, ajuster les médicaments et surveiller les symptômes.
 9. Aider à la transition entre le domicile, les établissements de soins de courte durée et les établissements de soins de longue durée.
 10. Fournir un soutien psychologique pour aider les personnes âgées à s’adapter aux changements physiques et sociaux liés au vieillissement.

Compétences Infirmières pour l’Orientation des Personnes Âgées :

 1. Evaluer de manière exhaustive les besoins physiques, mentaux et émotionnels des personnes âgées.
 2. Communiquer de manière empathique avec les personnes âgées et leurs familles, en tenant compte des éventuelles difficultés de communication.
 3. Elaborer des plans de soins individualisés qui tiennent compte des préférences, des valeurs et de l’autonomie des personnes âgées.
 4. Savoir gérer des cas complexes, en particulier lorsqu’il s’agit de personnes âgées atteintes de multiples affections.
 5. Etre familiarisé avec les services des collectivités locales disponibles pour les personnes âgées, y compris les programmes sociaux, les groupes de soutien, etc.
 6. Compétence à fournir des informations claires et compréhensibles sur les conditions de santé, les médicaments et les plans de soins.
 7. Capacité à travailler efficacement avec d’autres professionnels de la santé pour offrir des soins intégrés.
 8. Souplesse pour ajuster les plans de soins en fonction de l’évolution des besoins et des circonstances des personnes âgées.
 9. Capacité à identifier et à promouvoir des mesures préventives pour maintenir la santé et la qualité de vie des personnes âgées.
 10. Compréhension des enjeux éthiques liés aux soins aux personnes âgées et engagement envers les principes de dignité et de respect.

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