Utilité de l’Ordre National des Infirmiers

10 octobre 2010

Position de Roselyne Bachelot expri­mée au Sénat le 5 octo­bre 2010 :

M. le pré­si­dent. La parole est à M. Alain Milon, auteur de la ques­tion n° 961, adres­sée à Mme la minis­tre de la santé et des sports.

M. Alain Milon. Madame la minis­tre, créé par la loi du 21 décem­bre 2006 résul­tant d’une ini­tia­tive par­le­men­taire sou­te­nue très lar­ge­ment par le gou­ver­ne­ment de l’époque, l’ordre natio­nal des infir­miers s’est pro­gres­si­ve­ment mis en place.

Après la publi­ca­tion dans le cou­rant de l’année 2007 des prin­ci­pa­les dis­po­si­tions régle­men­tai­res indis­pen­sa­bles à son fonc­tion­ne­ment, les pre­miè­res élections des conseillers ordi­naux se sont tenues à la fin de l’année 2008.

Cette ins­ti­tu­tion s’est vu confier une mis­sion de ser­vice public fon­da­men­tale : garan­tir la com­pé­tence, la mora­lité et la qua­lité de l’exer­cice pro­fes­sion­nel des infir­miers. Plus de 500 000 dans notre pays, ceux-ci assu­rent une mis­sion sani­taire et sociale de pre­mier plan.

Les soins infir­miers ont connu depuis plu­sieurs décen­nies des évolutions majeu­res liées à celles de notre sys­tème de santé, fai­sant du métier de soi­gner une véri­ta­ble pro­fes­sion. Qu’une ins­ti­tu­tion telle que l’ordre puisse garan­tir la déon­to­lo­gie et la qua­lité des pra­ti­ques des soins infir­miers est une néces­sité à mes yeux incontour­na­ble.

Pourtant, depuis sa mise en place, l’ordre natio­nal des infir­miers n’a cessé de subir l’obs­truc­tion des pou­voirs publics et les invec­ti­ves des syn­di­cats. Encore récem­ment, une pro­po­si­tion de loi, qui a reçu, semble-t-il, un sou­dain sou­tien verbal du minis­tère de la santé, a été dépo­sée à l’Assemblée natio­nale afin de réser­ver l’ordre aux seuls infir­miers d’exer­cice libé­ral, en dépit des prin­ci­pes d’unité et de garan­tie de l’exer­cice pro­fes­sion­nel qui jus­ti­fient l’exis­tence d’une ins­ti­tu­tion ordi­nale.

L’ordre des infir­miers est le délé­ga­taire de mis­sions et de tâches que les ser­vi­ces de l’État, notam­ment en région, enga­gés dans un pro­ces­sus de restruc­tu­ra­tion au tra­vers de la créa­tion des agen­ces régio­na­les de santé par la loi du 21 juillet 2009, ne peu­vent plus et ne veu­lent plus assu­mer : il s’agit de l’ins­crip­tion des pro­fes­sion­nels au tableau, de la vali­da­tion des diplô­mes étrangers, du recen­se­ment ou du suivi démo­gra­phi­que.

Pour assu­mer ses mis­sions, un ordre ne peut comp­ter que sur les coti­sa­tions des pro­fes­sion­nels concer­nés. Malgré une coti­sa­tion faible, fixée à soixante-quinze euros, l’ordre des infir­miers a subi, de la part des ser­vi­ces du minis­tère de la santé et des syn­di­cats, des pres­sions et une cam­pa­gne de déni­gre­ment sans pré­cé­dent.

Les employeurs, publics notam­ment, ne contri­buent pas au res­pect de la loi, se ren­dant par ce fait com­pli­ces de l’exer­cice illé­gal des pro­fes­sion­nels qui refu­sent de s’ins­crire. L’État n’inter­vient pas, laisse faire, voire cau­tionne cet état de fait. Force est pour­tant de reconnaî­tre qu’un ordre ne fait aucu­ne­ment appel aux deniers publics pour assu­rer la mis­sion de ser­vice public qui lui a été délé­guée, ce qui, en la période actuelle d’exi­gence de rigueur bud­gé­taire, devrait être salué et sou­tenu.

En consé­quence, madame la minis­tre, je vous demande de bien vou­loir m’indi­quer les mesu­res que compte pren­dre le Gouvernement pour faire res­pec­ter tant par les pro­fes­sion­nels que par leurs employeurs la loi en la matière.

M. le pré­si­dent. La parole est à Mme la minis­tre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, minis­tre de la santé et des sports. Monsieur le séna­teur, j’ai, en effet, trouvé en héri­tage la créa­tion de l’ordre infir­mier. Dès sa mise en place, le niveau de coti­sa­tion de 75 euros annuels a posé pro­blème.

Vous avez rap­pelé que la coti­sa­tion en cause n’avait pas d’influence sur les deniers publics. Encore heu­reux ! Car, par défi­ni­tion, un ordre ne fait pas appel à une sub­ven­tion de l’État ! Sinon ce ne serait plus un ordre… Ce serait même un désor­dre ! (Sourires.)

Avant même que ce taux ne soit arrêté, j’avais conseillé â l’ordre de fixer une coti­sa­tion d’un mon­tant sym­bo­li­que, d’envi­ron 20 euros par an. Ce mon­tant était d’ailleurs, à quel­ques euros près, celui qui avait été évoqué lors des débats par­le­men­tai­res.

Il m’appa­raît essen­tiel, pour les infir­miers et infir­miè­res, mais aussi pour l’ordre lui-même, que le mon­tant de la coti­sa­tion ne repré­sente pas un obs­ta­cle pour les per­son­nes que cette ins­ti­tu­tion a voca­tion à défen­dre.

Je n’ai cessé, depuis, de conseiller â l’ordre de révi­ser ce mon­tant. J’ai aussi intro­duit dans la loi du 21 juillet 2009, la loi por­tant réforme de l’hôpi­tal et rela­tive aux patients, à la santé et aux ter­ri­toi­res, dite loi HPST, une dis­po­si­tion per­met­tant à l’ordre de modu­ler le mon­tant des coti­sa­tions. J’espé­rais qu’il pour­rait ainsi pro­po­ser une coti­sa­tion réduite pour les sala­riés qui dis­po­sent déjà de struc­tu­res de régu­la­tion et de sanc­tion.

Malheureusement, l’ordre infir­mier n’a pas suivi ce conseil de bon sens, que je n’ai d’ailleurs pas été la seule à lui donner.

Depuis, les dif­fi­cultés se sont accu­mu­lées. La majo­rité des infir­miers refu­sent de payer la coti­sa­tion de 75 euros annuels, dis­pro­por­tion­née par rap­port à leurs reve­nus, mais aussi par rap­port à ce qu’ils atten­dent de cette ins­ti­tu­tion.

Contrairement à ce que vous dites, l’ordre n’a fait l’objet d’aucune cam­pa­gne de déni­gre­ment, ni de ma part ni de la part du Gouvernement.

Les ser­vi­ces du minis­tère ont tou­jours été pré­sents et à l’écoute, notam­ment lors des conseils natio­naux de l’ordre infir­mier. J’ai reçu, ainsi que les mem­bres les plus éminents de mon cabi­net, les ins­tan­ces de l’ordre, notam­ment sa pré­si­dente, et cela à plu­sieurs repri­ses. La der­nière ren­contre remonte à quel­ques jours seu­le­ment.

Je tiens aussi à rendre hom­mage aux efforts que les par­le­men­tai­res ont consen­tis, avec le Gouvernement, pour per­met­tre à l’ordre infir­mier de trou­ver ses mar­ques.

Malgré ces efforts, malgré les deman­des insis­tan­tes de la pro­fes­sion, malgré les appels à la raison des orga­ni­sa­tions syn­di­ca­les, dont les prises de posi­tion à l’égard de l’ordre sont très res­pec­ta­bles, aucun geste n’a été fait par l’ordre infir­mier jusqu’à ce jour pour se faire accep­ter par les infir­miers.

Le mon­tant de la coti­sa­tion est resté, comme en 2009, fixé â 75 euros.

Pourtant, je le répète, au-delà de la contrainte intro­duite par la loi, un ordre doit se faire accep­ter aussi par ceux qu’il repré­sente. Je regrette de cons­ta­ter que tel n’est pas encore le cas chez les infir­miers, comme le prouve le faible nombre d’adhé­sions.

Or les infir­miers peu­vent adhé­rer et coti­ser sans aucune contrainte, direc­te­ment sur le site inter­net de l’ordre infir­mier. Il n’y a et il n’y a jamais eu aucune obs­truc­tion des pou­voirs publics ! Je vous mets au défi de trou­ver la moin­dre obs­truc­tion dans ce domaine !

En outre, l’ordre a lui-même assuré une com­mu­ni­ca­tion mas­sive. Compte tenu des ris­ques juri­di­ques qu’ils encou­rent, les employeurs n’encou­ra­gent abso­lu­ment pas l’exer­cice illé­gal. Je me féli­cite des choix mesu­rés que les déci­deurs hos­pi­ta­liers font au quo­ti­dien.

Comme vous pouvez le cons­ta­ter, mon­sieur le séna­teur, je suis ce dos­sier quo­ti­dien­ne­ment. Je suis cer­taine que l’ordre enten­dra nos appels et que, ensem­ble, nous allons trou­ver une solu­tion accep­ta­ble pour tous les acteurs.

M. Roland Courteau. Pas sûr !

M. le pré­si­dent. La parole est à M. Alain Milon.

M. Alain Milon. Je remer­cie Mme la minis­tre de sa réponse. Pour en avoir suf­fi­sam­ment dis­cuté ici dans le cadre de la loi HPST, je le sais, le véri­ta­ble pro­blème, c’est la coti­sa­tion.

Ce que je crains le plus, c’est que cette dif­fi­culté ne finisse par mettre en cause l’exis­tence même de l’ordre et qu’à un moment ou à un autre cela ne fasse tache d’huile mena­çant la péren­nité d’autres ordres.

Source : Sénat séance du 5 octo­bre 2010
http://www.senat.fr/sean­ces/s201010/s20101005/s20101005003.html

Position du SNPI sur le mon­tant ina­dapté de la coti­sa­tion ordi­nale :
http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Cotisation-ordi­nale-cons­ter­na­tion.html

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