Actes de violence en milieu hospitalier : bilan 2008
21 mars 2009
L’Observatoire National des Violences en milieu Hospitalier a rendu en mars 2009 son "bilan national des remontées des signalements d’actes de violence en milieu hospitalier" :
La circulaire du 15.12.2000 a défini les grands axes d’une politique de prévention des situations de violence, déclinés sur le terrain par les établissements dans le cadre des appels à projets organisés par les Agences Régionales de l’Hospitalisation, mais il est apparu nécessaire de créer une structure ministérielle permettant de coordonner et d’évaluer les politiques mises en œuvre par les différents acteurs sur l’ensemble du territoire, afin de garantir la sécurité des personnes et des biens à l’intérieur des établissements concernés.
La mission de l’Observatoire National des Violences en milieu Hospitalier, issu de la circulaire du 11 juillet 2005 relative au recensement des actes de violence dans les établissements de santé, centralise l’ensemble des informations relatives à des faits de violence telles qu’ils sont signalés via le logiciel Netsurvey dont le lien électronique est diffusé aux établissements via les ARH.
Le logiciel, opérationnel à partir de septembre 2005, a permis de recenser 800 fiches entre septembre 2005 et décembre 2005. Cependant le recul était très insuffisant et le système trop récent pour permettre une analyse sérieuse et asseoir des conclusions crédibles.
Un premier bilan des remontées des faits de violence a donc été rédigé à l’issue de l’année 2006, portant sur la période septembre 2005-décembre 2006, soit 3289 signalements.
Le bilan DHOS-ONVH 2007 a permis d’affiner les analyses initialement établies et d’établir un comparatif entre l’année civile 2006 et l’année civile 2007. Pour ce faire l’ensemble des statistiques portant exclusivement sur l’année 2006 a été recalculé afin de permettre un comparatif parlant.
A l’issue de l’année 2008 l’Observatoire National des Violences Hospitalières se propose d’analyser non seulement l’ensemble des évènements de violence portés à sa connaissance, au cours de l’année 2008, mais aussi de dégager les tendances qui apparaissent au travers des statistiques comparées sur 3 années :
ANNEE 2006 : 2690 faits signalés
ANNEE 2007 : 3253 faits signalés
ANNEE 2008 : 3433 faits signalés
Ces données permettent d’affirmer que parler de la violence au sein des établissements de soins n’est plus un épiphénomène tant cette dimension a intégré les établissements de santé et les conditions de travail des personnels qui y sont attachés. L’actualité nous rappelle parfois dramatiquement cette réalité.
Mais parler de violence impose prudence et définitions préalables car la violence est protéiforme et subjective. Chaque acteur confronté à cette notion en donne une définition propre et ce constat doit impérativement être pris en compte avant toute tentative d’analyse, afin de définir un langage commun à partir duquel chacun pourra puiser les éléments de communication et d’informations qu’il recherche.
L’Observatoire National des Violences en milieu Hospitalier a initialement développé une version du logiciel de remontée des faits de violence (Netsurvey) (septembre 2005), laquelle a rapidement conduit à une modification des critères des informations recueillies (avril 2006), afin notamment de définir un langage plus commun à tous les utilisateurs, et dès lors plus objectif.
Au cours de l’année 2009 ce logiciel devrait connaitre certaines modifications et de nouveaux référentiels devraient y être intégrés afin d’affiner plus encore les points d’analyses.
Cependant le parallélisme avec le Code Pénal a été justement adopté, reprenant la distinction : violence aux biens / violence aux personnes, et au sein de chaque catégorie, définissant des niveaux d’agression selon l’échelle de gravité retenue par le Code Pénal :
Atteintes aux biens :
Niveau 1 : Vols sans effraction, dégradations légères, dégradations de véhicules sur parking intérieur de l’établissement (hors véhicules brûlés), tags, graffitis
Niveau 2 : Vols avec effraction
Niveau 3 : Dégradations ou destruction de matériel de valeur (médical, informatique, imagerie médicale,...), dégradations par incendie volontaire (locaux, véhicules sur parking intérieur de l’établissement), vols à main armée ou en réunion (razzia dans le hall d’accueil,...).
Atteintes aux personnes :
Niveau 1 : Injures, insultes et provocations sans menaces (propos outrageants, à caractère discriminatoire ou sexuel), Consommation ou trafic de substances illicites (stupéfiants) ou prohibées en milieu hospitalier (alcool), Chahuts, occupations des locaux, nuisances, salissures
Niveau 2 : Menaces d’atteinte à l’intégrité physique ou aux biens de la personne, menaces de mort, Port d’armes (découverte d’armes lors d’un inventaire ou remise spontanée ou présence indésirable dans les locaux)
Niveau 3 : Violences volontaires (atteinte à l’intégrité physique, bousculades, crachats, coups), menaces avec arme par nature ou par destination (arme à feu, arme blanche, scalpel, rasoir, tout autre objet dangereux), agression sexuelle
Niveau 4 : Violences avec arme par nature ou par destination (armes blanches, armes à feu, scalpels, rasoir, tout objet dangereux), viol et tout autre fait qualifié de crime (meurtre, violences volontaires entraînant mutilation ou infirmité permanente,...)
Après plus de deux années d’utilisation, il apparait de nouveau opportun de faire évoluer l’outil de recueil d’informations, ce besoin étant exprimé par les établissements eux-mêmes, mais résulte aussi des nécessités statistiques qui se doivent d’être les plus affinées possible.
Une nouvelle version du logiciel pour la déclaration des évènements survenus au sein des établissements de soins devrait donc être proposée en fin d’année 2009.
CONCLUSION - PERSPECTIVES
Le bilan national des remontées des signalements d’actes de violence en milieu hospitalier analyse l’ensemble des situations de violence subies ou vécues au sein des établissements de santé, et déclarées à l’Observatoire National des Violences Hospitalières via le logiciel Netsurvey, conçu et diffusé en septembre 2005, remanié en avril 2006 selon les termes de la circulaire n° DHOS/2005/327 du 11 juillet 2005.
Cependant le besoin croissant d’affiner les analyses nécessite un recueil des données toujours plus détaillé (telles que les catégories du personnel le plus exposé, si les victimes concernées sont davantage féminines ou masculines, et pour quel type de violence, les causes de la manifestation de la violence lorsqu’elle est identifiable, ect....).
C’est la raison pour laquelle le logiciel Netsurvey devrait encore évoluer au cours de l’année 2009.
L’année 2008 enregistre 3433 déclarations de faits de violence, soit une hausse de 5.6 % de faits supplémentaire par rapport à 2007 (Rappel : 21% entre 2006 et 2007).
Cependant l’ensemble de ces données reste soumis à la diligence des chefs d’établissements, à l’adhésion et l’utilisation du logiciel de remontée d’information vers l’Observatoire au sein de leurs établissements de santé, et à la politique relative à la gestion et la prévention des situations de violence, menée par les Agences Régionales de l’Hospitalisation.
Il est donc primordial que les termes de la circulaire du 11 juillet 2005 soient le plus largement possible diffusés et respectés.
C’est à ce prix que les études menées par l’ONVH seront les plus fiables possibles et le reflet de la réalité quotidienne vécue et/ou subie par les praticiens sur le terrain, plus juste.
La violence s’est réellement installée au sein des établissements de santé, qu’elle soit endogène (patients) ou exogène, qu’elle soit involontaire (expression d’une pathologie) ou recherchée et ciblée (invasion de bandes, règlement de compte entre bandes rivales, manifestation d’un énervement ou d’une angoisse).
Les analyses développées traduisent :
Une grande disparité des déclarations de violence selon les régions, disparité qui n’est pas nécessairement en lien avec la situation de la délinquance générale enregistrée au sein de cette même région ;
Les établissements psychiatriques sont moins nombreux à déclarer des évènements survenus au sein de leurs structures, mais les déclarations faites par établissement ont augmenté en moyenne de 80 %, avec 38 fiches par établissement en 2008 contre 21 en 2007 ;
Les services de psychiatrie déclarent 52.61 % des situations de violence enregistrées par l’Observatoire, soit une hausse de plus de 5% par rapport à 2007, plaçant ces services spécialisés au même niveau que 2006 et comme étant les services les plus exposés aux manifestations de violence ;
Parmi l’ensemble des violences signalées, tout service et tout établissement confondu, les atteintes aux personnes restent très largement majoritaires avec près de 90 % des actes commis, constante en hausse depuis 3 ans. Le niveau de violence est élevé (niveau 3 sur 4), avec pour 2008 une aggravation du niveau de violence nettement enregistrée. Il s’agit essentiellement de coups volontaires.
Quant aux atteintes aux biens, si celles-ci restent au niveau le plus faible (niveau 1 sur 3), s’agissant essentiellement de vols sans effraction et de dégradations légères, le phénomène de vols à main armée ne doit pas être ignoré en raison de son accroissement au cours de l’année 2008.
Les conséquences des violences subies ou vécues au sein des établissements ont peu d’incidence sur le fonctionnement même du service concerné, dans la mesure où le personnel, 1ère victime de ces manifestations dans 80 % des cas, dépose très peu plainte : 13 % des situations en 2008, et que les arrêts de travail ou les incapacités de travail qui en découlent demeurent exceptionnels (< à 5 %).
Ces informations et analyses sur 2008 et la tendance dégagée pour les 3 années écoulées, doivent conduire à développer au mieux les structures, les actions et les formations afin de pouvoir apporter une réponse adaptée, efficace et protectrice des patients et du personnel.
C’est aussi le sens du protocole Santé-Sécurité mis en place le 12 août 2005 signé entre le Ministère de la Santé et le Ministère de l’Intérieur.
A ce jour près de 500 protocoles ont été signés entre les établissements de santé, la Police ou la Gendarmerie Nationale.
Parfaire les partenariats entre les différents acteurs concernés relève aussi des missions de l’Observatoire National des Violences Hospitalières. C’est la raison pour laquelle ce protocole devrait être complété au cours de l’année 2009 afin de permettre au Ministère de la Justice d’intégrer le dispositif, et que soit apportée une aide technique supplémentaire aux directeurs des établissements hospitaliers dans la réalisation d’un diagnostic de sécurité efficient.
Ce nouveau partenariat devrait également permettre de décliner localement la mise en œuvre de moyens adéquats pour faciliter les dépôts de plaintes des victimes d’actes de violence, et assurer le suivi de ces plaintes sur le plan pénal.
Le sentiment de sécurité qui doit prévaloir au sein des établissements de santé doit s’accompagner d’un recul du sentiment d’impunité pour les auteurs. Ce n’est qu’en coordonnant les actions de chaque partenaire et acteur (Santé, Intérieur, Justice) que nous pourrons tendre vers cet objectif.