Aides opératoires : régularisation inacceptable !

24 janvier 2006

Accréditation, lutte contre les infections nosocomiales d’un coté, déqualification des soins de l’autre !

La publi­ca­tion, au cours de l’été 2005, de deux textes d’appli­ca­tion per­met­tant la mise en œuvre des épreuves de véri­fi­ca­tion des connais­san­ces des aides opé­ra­toi­res et aides ins­tru­men­tis­tes, béné­vo­les ou indé­pen­dan­tes (décret n°2005-975 du 10/08/05 et son arrêté) a sou­levé de vives pro­tes­ta­tions de la part des pro­fes­sion­nels de santé.

Les asso­cia­tions d’infir­miè­res de bloc UNAIBODE et AEEIBO ont déposé contre ces textes un référé en sus­pen­sion et un recours en annu­la­tion pour non confor­mité aux direc­ti­ves euro­péen­nes.

Même la FHF (Fédération Hospitalière de France) a dénoncé la dis­tor­sion de régle­men­ta­tion qui règne entre les 2 sec­teurs d’acti­vité public et privé : « une fois de plus le sec­teur privé est dis­pensé de cer­tai­nes obli­ga­tions impo­sées au sec­teur public alors qu’ils sont au ser­vice des mêmes assu­rés sociaux. Les établissements publics de santé ne pou­vant, en effet, employer que des per­son­nels aux qua­li­fi­ca­tions requi­ses, ce qui est un gage de qua­lité et de sécu­rité pour l’usager. Ils sont tenus de les rému­né­rer ».

Le 22 août, alarmé par l’inté­rêt sou­dain des médias (arti­cles de France Soir, Le Figaro, Libération ...) à la ques­tion de la régu­la­ri­sa­tion des aides opé­ra­toi­res béné­vo­les, le Ministère expli­que « que les textes publiés au JO le 11 août der­nier ont pour objet d’enca­drer cette situa­tion en orga­ni­sant des épreuves des­ti­nées à véri­fier les connais­san­ces théo­ri­ques et tech­ni­ques des per­son­nes concer­nées ».

Selon lui, depuis la mise en place des dis­po­si­tions ini­tia­les, 2.600 per­son­nes auraient été ainsi régu­la­ri­sées et ces textes du 11/08/05 ne devraient per­met­tre de régu­la­ri­ser que 300 à 400 per­son­nes sup­plé­men­tai­res.

Certes, depuis des années, des chi­rur­giens du privé font tenir le rôle d’aide opé­ra­toire et aide ins­tru­men­tiste à leur épouse ou à leur secré­taire pour des rai­sons finan­ciè­res.
Les cli­ni­ques ne veu­lent pas tou­jours inves­tir dans la for­ma­tion, et ce sont sou­vent les chi­rur­giens qui paient leur aide opé­ra­toire.

Mais les gestes à effec­tuer ne sont pas ano­dins, les aide-opé­ra­toi­res liga­tu­rent pen­dant l’inter­ven­tion, sutu­rent les plaies, tien­nent les écarteurs. Aussi, les chi­rur­giens ten­tent de faire régu­la­ri­ser cette situa­tion, dans le but évident de se pro­té­ger contre d’éventuelles pour­sui­tes en jus­tice.

Le Ministère de la Santé prône la qua­lité des soins, la lutte contre les infec­tions noso­co­mia­les, la sécu­rité, et dans le même temps, il régu­la­rise des per­son­nes sans aucune for­ma­tion en hygiène dans un sec­teur autant à risque que les blocs !

Le patient peut être opéré par un chi­rur­gien com­pé­tent, mais entouré de per­son­nels incom­pé­tents ou dan­ge­reux. Pire, une fois auto­ri­sés à exer­cer, rien n’empê­chera ces béné­vo­les de venir exer­cer dans les hôpi­taux, à l’occa­sion d’un rap­pro­che­ment public/privé.

Le 2 sep­tem­bre, suite aux dif­fé­rents recours dépo­sés contre le décret et l’arrêté du 10/08/05, le Conseil d’Etat prend la déci­sion de sus­pen­dre une partie seu­le­ment du décret, celle concer­nant l’exten­sion du dis­po­si­tif aux aides autres que chi­rur­gi­ca­les (aides endo­sco­pi­ques, etc...). Cette déci­sion, objet de vives contro­ver­ses, ne règle donc rien, car elle n’entraîne pas l’annu­la­tion des épreuves orga­ni­sées pour les aides opé­ra­toi­res, mais juste une res­tric­tion d’accès aux épreuves.

Faute de se faire enten­dre, l’UNAIBODE et l’AEEIBO ont déposé plainte dans deux régions (Bretagne et Centre) pour « exer­cice illé­gal de la pro­fes­sion et mise en danger de la vie d’autrui » contre les cli­ni­ques, les chi­rur­giens et les aides opé­ra­toi­res.

Face à un Ministère qui cède au lobby des chi­rur­giens, espé­rons que la jus­tice saura défen­dre l’inté­rêt des patients.

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