Couverture santé : jurisprudence du 13.01.09
8 juin 2009
Maintien des couvertures frais de santé en faveur des anciens salariés : les dernières précisions de la jurisprudence
L’arrêt de renvoi du 13 janvier 2009 de la Cour d’appel de Lyon confirme l’arrêt rendu par la Cour
de cassation le 7 février 2008. Cette jurisprudence de principe signe une interprétation très
rigoureuse de l’article 4 de la loi Evin relatif au maintien des couvertures santé en cas de rupture
du contrat de travail.
La loi du 31 décembre 1989 n°89-1009 dite loi Evin organise un régime très protecteur, en
matière de protection sociale complémentaire, au bénéfice des assurés. Elle permet en effet aux
salariés (ainsi qu’aux ayants droits d’un salarié décédé) qui bénéficient d’une prévoyance santé
collective, et dont le contrat de travail est rompu, de conserver le bénéfice de la couverture de
frais de santé dès lors que le régime a un caractère obligatoire pour les actifs.
L’article 4 de la loi Evin met à la charge de l’organisme assureur (institution de prévoyance,
mutuelle, compagnie d’assurance) à l’égard des anciens salariés bénéficiaires d’une couverture
santé collective obligatoire l’obligation :
de maintenir aux anciens salariés les garanties prévues au contrat des actifs dans une
certaine limite tarifaire. En effet, un décret2 précise que le montant à la charge de
l’ancien salarié ne peut excéder 150 % de la cotisation (part patronale et salariale des
actifs) ;
de faire figurer dans le contrat d’assurance et la notice, la faculté et les conditions du
maintien des garanties.
L’article 4 de la loi Evin prévoit en effet que le lien de droit entre l’organisme assureur et l’ancien
salarié n’est pas le prolongement du contrat collectif mais un nouveau contrat dont les
caractéristiques sont d’être facultatif et distinct du contrat groupe des actifs.
D’où la question posée par l’arrêt du 13 janvier 2009 de savoir quel devait être le contenu de
garanties dont peuvent bénéficier les anciens salariés ou leur ayants droits.
Dans un premier temps les juridictions de première instance et d’appel ont considéré que la loi
Evin laisse au contrat le soin de préciser les modalités de ce maintien. Les juridictions ont en
effet jugé que la loi Evin offre une certaine latitude à l’organisme assureur, à condition que cette
couverture soit de nature sensiblement similaire à celle du contrat collectif.
C’est ce que sanctionne la Cour de cassation dans son arrêt du 7 février 2008 .La Cour d’appel
de Lyon fait application son arrêt de renvoi du 13 janvier 2009 de la décision de la haute Cour.
Désormais la couverture doit être identique à celle dont bénéficiait le salarié au moment
de son départ de l’entreprise.
Quelles vont être les conséquences de cette jurisprudence ?
Outre le fait qu’il ne sera plus possible de déroger par voie de convention aux dispositions d’ordre
public de la loi Evin, l’arrêt pose la question de savoir comment pourra être maintenu l’identité
des couvertures entre actifs et inactifs alors qu’il existe une limitation tarifaire imposée par la loi.
Beaucoup d’organismes assureurs, en raison des incidences financières qui découlent des
obligations de l’article 4, ont, jusqu’à présent, élaboré des contrats standards qui sont destinés
aux inactifs qui quittent l’entreprise. Ces contrats comportent des garanties remodelées afin de
tenir compte de la particularité des besoins de cette population.
Avec l’âge, les prestations dont ont besoin les retraités peuvent être bien différentes de celles
dont ils disposaient du temps de leur activité.
Or, il va être très difficile pour les organismes assureurs de revenir sur cette pratique pour
pouvoir garantir aux anciens salariés une couverture identique à celle dont ils bénéficient lors de
leur départ de l’entreprise...bien qu’il ne soit pas certain que les anciens salariés (notamment
retraités) trouvent un intérêt au dispositif.
En outre le maintien à l’identique de la garantie des prestations santé en contrepartie d’une
augmentation maximum de 150 % pose le problème du décalage entre le plafonnement du tarif
pour l’ancien salarié et le coût réel du risque.
La surcharge du risque pourra vraisemblablement conduire à une forte augmentation des
cotisations. S’il est en effet difficile d’envisager une augmentation du tarif des retraités, il y a fort à
parier que l’assureur jouera sur le tarif des actifs afin de parvenir à équilibrer le poids des
retraités.
A terme, c’est le rapport actif/inactifs qui risque d’être déséquilibré.
Cette jurisprudence vient donc bouleverser le paysage de la complémentaire santé.
Gageons que les organismes assureurs pèseront de tout leur poids pour inciter le législateur à
revisiter une loi qui a déjà vingt ans.
Détails :
La loi n°89-1009 du 31 décembre 1989, article 4 dispose que « Lorsque des salariés sont garantis collectivement,
dans les conditions prévues à l’article 2 de la présente loi, en vue d’obtenir le remboursement ou l’indemnisation des frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, le contrat ou la convention doit prévoir, sans
condition de période probatoire ni d’examen ou de questionnaires médicaux, les modalités et les conditions tarifaires des nouveaux contrats ou conventions par lesquels l’organisme maintient cette couverture :
1° au profit des anciens salariés bénéficiaires d’une rente d’incapacité ou d’invalidité, d’une pension de retraite ou, s’ils sont privés d’emploi, d’un revenu de remplacement, sans condition de durée, sous réserve que les intéressés en fassent la demande dans les six mois qui suivent la rupture de leur contrat de travail ;
2°au profit des personnes garanties du chef de l’assuré décédé, pendant une durée minimale de douze mois à
compter du décès, pendant une durée minimale de douze mois à compter du décès, sous réserve que les intéressés en
fassent la demande dans les six mois suivant le décès. Le nouveau contrat ou la nouvelle convention doit prévoir que
la garantie prend effet, au plus tard, au lendemain de la demande. Les tarifs applicables aux personnes visées par le
présent article peuvent être supérieurs aux tarifs globaux applicables aux salariés actifs dans des conditions fixées
par décret.