FEHAP : vous êtes 275.000 dans la CCN 51
17 décembre 2012
Lettre aux salariés à qui s’appliquait la convention collective nationale de travail du 31 octobre 1951 (CCN 51).
Vous êtes 200 000 à travailler dans un établissement ou service adhérent de la FEHAP.
Vous êtes 75 000 à travailler dans un établissement ou service non-adhérent de la FEHAP mais qui a fait le choix d’appliquer volontairement la CCN 51.
Depuis le 02 décembre 2012 vous êtes 275 000 à ne plus bénéficier des principales garanties collectives qu’offrait la CCN 51 !
Certains d’entre vous, dans le moins pire des cas, se verront appliquer, à compter du 02 décembre 2012, les dispositions d’une simple recommandation patronale…
Pour les autres, ce sera peut-être le code du travail !
Comment en est-on arrivé là ?
La FEHAP propose une révision inacceptable…
En mai 2010, la FEHAP (Fédération des Etablissements Hospitaliers et d’Aide à la Personne), dans le cadre d’un processus de révision, proposait aux organisations syndicales plusieurs évolutions conventionnelles (les fameux « 15 points ») touchant essentiellement aux éléments de la rémunération.
Ces évolutions avaient pour but de dégager des marges de manœuvre financières devant permettre aux établissements d’adapter leur activité aux conditions locales et de pouvoir être attractifs face à la concurrence des établissements privés commerciaux et des établissements publics.
En clair, il s’agissait de réduire la masse salariale conventionnelle…Liberté étant laissée aux établissements de redistribuer, ou non, la manne financière ainsi dégagée !
Dans la mesure où la FEHAP entendait réviser à la baisse la totalité des « 15 points », et comme il fallait s’y attendre dans un contexte de quasi gel des salaires depuis plusieurs années, l’initiative patronale a échoué.
Aucune signature pour l’avenant proposé par les employeurs, nous sommes fin juin 2011…
La FEHAP sort l’arme lourde…
Le 1er septembre 2011, la FEHAP dénonce alors les 15 points qu’elle voulait réviser ainsi que les autres dispositions conventionnelles juridiquement liées à ces 15 points. Près de 90% des garanties sociales sont concernées !
La quasi-totalité de la CCN 51 est donc menacée de disparition pure et simple (voir encadré)…
A partir de là, les partenaires sociaux disposaient de 15 mois pour trouver un accord, faute de quoi la dénonciation deviendrait effective après le 1er décembre 2012.
Un simulacre de négociation et la FEHAP siffle la fin de partie !
Après un an de négociations stériles, la FEHAP met un avenant de substitution à la signature le 28 août 2012 et décide que la négociation a assez duré (Plus de 3 mois avant le terme !).
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, ce nouvel avenant ne recueille aucune signature…
Le 4 septembre 2012, le Conseil d’Administration de la FEHAP décide alors d’adresser à ses adhérents une recommandation patronale d’application impérative afin de compenser, autant que faire se peut, le « vide conventionnel » qu’elle a elle-même créé !
Cette décision unilatérale des employeurs, déposée au ministère pour agrément, est dans son contenu encore plus défavorable aux salariés que l’avenant non signé du 28 août !
La mobilisation des salariés permet le déblocage de la situation…
C’est ensuite, Mesdames et Messieurs les salariés, qu’à l’appel des organisations syndicales vous avez manifesté votre colère le 15 octobre 2012. Vous n’étiez peut-être pas 275.000 mais la manifestation a été spectaculaire.
Dès le lendemain, lors d’une audition au Sénat, la ministre des affaires sociales et de la santé, Madame Marisol Touraine, appelait les « parties prenantes » à retrouver la voie du dialogue social en reprenant les négociations dans le cadre d’une commission mixte paritaire sous l’égide du ministère du travail.
Quatre réunions plus tard, la FEHAP mettait un avenant de substitution à la signature le 12 novembre 2012. En comparaison avec la recommandation patronale du 4 septembre et même vis-à-vis de l’avenant du 28 août, les avancées faites par la FEHAP étaient conséquentes. Pour la première fois depuis 2 ans et demi des contreparties aux concessions étaient accordées.
La CFE-CGC et la CFDT décidèrent cette fois de signer cet avenant, qui, outre les modifications relatives aux « 15 points » devenues acceptables, avait l’immense qualité de rétablir la CCN 51 dans toutes ses dimensions.
Quand les organisations syndicales opposantes portent le coup de grâce à la CCN 51
FO, la CGT et la CFTC décidèrent alors d’exercer leur droit d’opposition à cet avenant du 12 novembre 2012 qui de ce fait devenait inapplicable car réputé non écrit…
Ces organisations vous ont probablement expliqué que cet avenant était inacceptable, que la FEHAP devait poursuivre les négociations et que de son coté, la ministre Marisol Touraine, subitement dotée de tous les pouvoirs, pouvait l’y contraindre le cas échéant !
Et là, vous êtes en droit de vous poser la seule question qui vaille : nos intérêts ont-ils été pris en compte par ces organisations ?
Vous pouvez en douter si vous faites un rapide constat au moment où ces lignes sont écrites :
La CCN 51 n’existe plus pour 80 à 90% de ses dispositions.
Le dialogue social et le paritarisme volent en éclat.
Vos garanties sociales sont devenues précaires, instaurées seulement par une recommandation patronale que les employeurs seront seuls autorisés à modifier.
Vos salaires ne connaitrons plus aucune évolution et seront gelés au niveau atteint au 1er décembre 2012…
Maigre consolation, les salariés présents à l’effectif au 1er décembre 2011 pourront conserver, au titre des avantages individuels acquis, le bénéfice des dispositions touchant aux jours fériés et aux heures supplémentaires effectuées la nuit, les dimanches et jours fériés.
La CFE-CGC, en signant, avec la CFDT, l’avenant de substitution du 12 novembre 2012, n’aura regardé que les seuls intérêts des salariés : sauver la CCN 51 et le paritarisme au prix de quelques concessions d’autant plus acceptables socialement que des contreparties non négligeables avaient été obtenues.
Les conséquences désastreuses de cette opposition majoritaire ne porteront directement préjudice qu’à vous-mêmes, les salariés.
Pas aux syndicats, pas à vos employeurs et pas à la ministre !
Vous êtes bien en droit de vous demander si vous n’avez pas été sacrifiés quelque part sur l’autel de considérations tactiques, stratégiques, voire politiques, dans le cadre d’une négociation où auront dominé les arrière-pensées et les règlements de compte.
Ce n’est bien sûr pas la fin du monde…Et la CFE-CGC Santé-Social mettra tout en œuvre pour reconstruire, avec les partenaires sociaux, un statut conventionnel attractif et motivant.
Mais dans le contexte de crise économique que vous connaissez, cette quasi mise à mort (provisoire ?) de la CCN 51 est difficile à digérer et ce qui s’est passé sera difficile à oublier…
Claude DUMUR
Vice-président CFE-CGC Santé-Social
Le 13 décembre 2012