HCSP : évaluation du Plan cancer
26 avril 2009
Le 24 février 2009, le Haut Conseil de la santé publique a remis son rapport sur l’évaluation du Plan cancer.
Le 24 février 2009, le Haut Conseil de la santé publique (qui avait été mandaté en janvier 2008) a remis son rapport sur l’évaluation du Plan cancer (2003-2007) à la ministre en charge de la Santé. Le rapport du HCSP complète les travaux de la Cour des comptes sur la mise en oeuvre du plan dont le rapport a été publié en juillet 2008.
Si les auteurs du rapport du HCSP soulignent des progrès dans le domaine du dépistage de certains cancers, d’une meilleure organisation de la prise en charge et de l’innovation thérapeutique, ils constatent des insuffisances, notamment dans la prise en compte des inégalités sociales et géographiques (accès aux progrès thérapeutiques).
Ils remarquent également que certaines données ne sont pas encore disponibles (expositions environnementales aux cancérigènes...) et que certaines mesures ont tardé à être mises en route et de ce fait, ne produiront leurs effets qu’au-delà de la période du plan (dispositifs d’agrément des établissements de soins...).
Étant donné le manque de recul et les délais de mise à disposition des données épidémiologiques, les auteurs du rapport observent que les effets et les impacts du plan sur la population sont difficiles à évaluer à ce stade et préconisent d’effectuer des mesures complémentaires à échéance plus lointaine.
Recommandations et pistes d’amélioration
Axe 1 : Système d’observation des cancers
Réaliser une analyse des besoins, au-delà des registres et du système multi sources,
notamment sur les pratiques de soins et les questions sociales, en évaluant le coût associé ;
Mettre en place un système épidémiologique à trois niveaux, registres, système multisource,
simple appariement de fichiers (PMSI-ALD-RNIPP) correspondant à la nécessité de
précision et de réactivité des différentes situations à résoudre. Le premier niveau serait
fondé sur le réseau des registres actuellement en place, fournissant des données détaillées,
mais avec des délais importants, principalement pour la recherche, mais aussi pour fournir
les éléments de référence des estimations d’incidence et de survie. Le second niveau serait
constitué par le système multi-sources, permettant la couverture épidémiologique de
l’ensemble du territoire. Enfin, le dernier niveau serait simplement constitué d’un
appariement du PMSI et des ALD, auquel on peut adjoindre le statut vital issu du RNIPP ou
des registres de l’Assurance maladie
Promouvoir et faciliter l’accès aux données médicales et administratives, en apportant des
réponses à la conciliation entre les besoins de connaissance épidémiologique et la
préservation des libertés individuelles dans un cadre réglementaire. Au-delà de la
surveillance épidémiologique, les besoins d’information, notamment en matière sociale,
doivent pouvoir reposer sur une exploitation régulière des causes de décès appariées à l’EDP
[Echantillon démographique permanent] et sans doute d’enquêtes régulières en population
Axe 2 : Facteurs de risque de cancer et prévention
Elargir, dans un futur plan, les modalités d’intervention pour gagner en efficacité, en
privilégiant notamment les actions d’éducation pour la santé, et en développant la recherche
dans le domaine Les évaluateurs préconisent de poursuivre la mise en oeuvre de mesures
préventives dans un futur plan cancer pour les facteurs de risque de cancer présents dans le
premier plan (tabac, alcool, alimentation et rayonnements UV) ainsi que pour l’activité
physique et les agents infectieux.
Mettre en cohérence les objectifs du futur plan avec ceux des plans abordant les mêmes
facteurs de risque (PNNS2, plan addictions 2...). Le choix et la formulation des objectifs,
des mesures et des actions doivent être articulés, et, au-delà, co-élaborés, avec les autres
plans nationaux et européens, construits sur des approches maladies, facteurs ou population.
Inclure la problématique des inégalités dans la formulation des objectifs (intégrer des
objectifs qui tiennent compte des écarts et/ou de populations jugées prioritaires ou plus
vulnérables) ;
Insérer, dès la conception du plan, un tableau de bord de suivi des objectifs, des indicateurs
et des actions mises en oeuvre, d’en préciser le pilotage et le financement.
Axe 3 : Lutte contre les cancers environnementaux et professionnels
Développer la recherche de façon coordonnée, dans une perspective de potentialisation des
efforts consentis au niveau international, notamment en liaison avec l’Union européenne et
avec le CIRC ;
Améliorer le dispositif de connaissance sur les expositions aux agents cancérogènes et leurs
impacts ;
Renforcer la prévention ;
Améliorer la prise en charge en rendant obligatoire la déclaration du mésothéliome, et en
organisant davantage le suivi post-professionnel.
Axe 4 : Dépistage
Un renforcement du pilotage, à la fois sur le plan national, permettant d’adapter les
stratégies aux évolutions des connaissances pour chacun des dépistages sur la base
d’indicateurs opérationnels, et régional, en particulier pour assurer une bonne interface avec
le système de soins ;
Une stabilisation de l’organisation des dépistages, passant par la consolidation des
structures de gestion et la mutualisation d’un certain nombre de fonctions, tout en
préservant le travail de proximité, tant auprès des populations que des professionnels ; La
place et le rôle du médecin traitant doivent également être renforcées ;
Un ciblage de la communication en direction des professionnels de santé et des populations
cibles, afin en premier lieu d’atteindre les personnes qui ne bénéficient pas d’un dépistage ;
L’étude systématique de la question des inégalités, afin de mieux en comprendre les
déterminants, et d’élaborer des stratégies de lutte adaptées, en lien étroit avec les partenaires
locaux.
Axe 5 : Organisation des soins
Clarifier les rôles au niveau institutionnel. Plutôt que d’aborder les solutions sous l’angle de
l’organisation, il est préconisé de définir au niveau national des objectifs à atteindre, chaque
région pouvant adopter l’organisation qui lui parait la plus pertinente, sous l’autorité des
Agences régionales de santé (ARS) ;
Maintenir et développer les actions engagées en pérennisant le financement et les moyens
humains, en mettant en place un système d’information fiable, en développant les outils
d’accompagnement (référentiels et recommandations notamment), en développant des
indicateurs de résultats plutôt que de moyens ;
Au niveau national (INCa, directions centrales du ministère) et régional, améliorer
l’accompagnement des évolutions organisationnelles et culturelles des professionnels
concernés, par des recommandations nationales, mais également par la mutualisation des
bonnes pratiques dans le domaine ;
Tenir compte des problèmes spécifiques de démographie médicale sur les spécialités liées à
la prise en charge des cancers, notamment dans certaines régions particulièrement
vulnérables ;
Consolider les RCP et en améliorer le fonctionnement, afin d’optimiser le temps soignant et
de systématiser leur impact sur les stratégies thérapeutiques ;
Améliorer le dispositif autour du patient en accélérant sa prise en charge globale et
coordonnée (dispositif d’annonce, programme personnalisé de soins, soins de support) ;
Définir un dispositif de sortie, incluant le médecin traitant, pour permettre une meilleure
articulation des prises en charge à domicile.
Favoriser l’ensemble des dispositifs alternatifs ou complémentaires à l’hospitalisation, en
clarifiant le rôle du médecin traitant.
Axe 6 : Qualité des pratiques et innovation
Dynamiser le processus et production des référentiels et s’attacher à leur actualisation ;
Suivre les effets de la mise en place du dispositif d’autorisation des établissements. Les
effets de la mise en place du dispositif d’autorisation doivent être suivis avec beaucoup
d’attention car il va avoir des conséquences très importantes sur l’organisation des soins et
un risque existe d’un glissement vers une concentration de l’offre sans forcément
d’augmentation de la qualité des soins ;
Clarifier les critères d’inscription des médicaments sur la liste hors GHS et les procédures ;
Poursuivre les efforts de promotion des dispositifs et techniques innovants ;
Mener une réflexion quant à la régulation des dépenses associées aux molécules innovantes
et onéreuses ;
Soutenir et développer les tumorothèques, en améliorant leur coordination et leur gestion
afin de rationaliser leurs moyens - notamment leur système d’information - et par la
normalisation des pratiques grâce à la mise en place de standards d’utilisation des
échantillons et de pratique qualité.
Axe 7 : Accompagnement social
Mettre en place une évaluation périodique des mesures d’accompagnement social. Les
effets et le ressenti au niveau des malades et de leur entourage, ne peuvent être immédiats.
La réédition périodique de l’enquête DREES permettrait de suivre l’évolution qualitative
des réalisations et leurs impacts ;
Proposer, à partir des réflexions et projets de recherche financés sur la période du plan
cancer, notamment sur les thématiques de l’emploi et des proches de malades du cancer, de
nouveaux objectifs et modalités d’accompagnement du malade et de son entourage ;
Assurer les moyens de développement du dispositif d’annonce et mettre en place des
instances de suivi ;
Mettre en place des équipes mobiles d’accompagnement social : un soutien social doit être
disponible pour les malades « à risque social » (isolement, difficultés économiques,
difficultés domestiques...). Cette équipe - ou personne référente - pourrait orienter, et
suivre, les personnes en difficulté vers les dispositifs existants et les organismes
compétents ;
Mettre en place un dispositif de sortie : maladie grave, le cancer ne s’arrête pas à la fin des
traitements mais est présent dans les projets de vie de la personne malade ou ayant été
malade. Un dispositif de sortie pourrait faire le point sur les difficultés que le malade est
susceptible de rencontrer, dont le retour à l’emploi ;
Assurer le maintien et le retour à l’emploi, en respectant les souhaits des malades, en
impliquant davantage le médecin du travail et en sensibilisant les employeurs à cette
problématique.
Axe 8 : Formation des personnels médicaux et soignants
Suivre la mise en oeuvre de l’agrément des services formateurs et la mise en oeuvre des
modifications de la formation initiale ;
Mettre en oeuvre la commission de qualification en cancérologie ;
Renforcer et coordonner la formation médicale et paramédicale continue en cancérologie.
Axe 9 : Pilotage du plan cancer
Conception du plan : renforcer la concertation et la cohérence des plans de santé publique.
Organisation : clarifier les rôles et les périmètres d’intervention des parties prenantes,
renforcer le pilotage interministériel.
Outils : structurer la stratégie, définir et quantifier les indicateurs de suivi.
Évaluation : définir les acteurs et structurer la méthodologie.