Haut Conseil des Professions Paramédicales du 10 mars 2010

22 mars 2010

Déclaration liminaire de Thierry Amouroux, au titre de la CFE-CGC, au HCPP Haut Conseil des Professions Paramédicales du 10 mars 2010

La fédé­ra­tion santé-social CFE-CGC est oppo­sée à l’arti­cle 30 du projet de loi rela­tif à la réno­va­tion du dia­lo­gue social dans la fonc­tion publi­que, qui remet en cause pour les para­mé­di­caux :
 la caté­go­rie active et l’âge de départ en retraite
 le béné­fice de la majo­ra­tion de durée d’assu­rance prévue par les dis­po­si­tions de l’arti­cle 78 de la loi Fillon n° 2003-775 du 21 août 2003 por­tant réforme des retrai­tes.

Les infir­miè­res sont for­mées en trois ans après le bac depuis 1979 : la reconnais­sance de leur cursus de for­ma­tion en 2009 dans le cadre du sys­tème LMD, débou­che sur une légère reva­lo­ri­sa­tion finan­cière qui fait l’objet du pro­to­cole minis­té­riel pré­senté le 2 février der­nier, dont les trois volets concer­nant les pro­fes­sion­nels infir­miers n’ont été signés par aucun des sept syn­di­cats de sala­riés.

La contre­par­tie de cette reva­lo­ri­sa­tion sala­riale (étalée entre décem­bre 2010 et juillet 2015) fait l’objet de l’arti­cle 30 :
 Le para­gra­phe I reclasse les infir­miers en caté­go­rie séden­taire, ce qui impli­que un départ à la retraite à 60 ans, avec une limite d’âge portée à 65 ans.
 Le para­gra­phe II orga­nise le droit d’option qui sera ouvert aux agents déjà en poste : la reva­lo­ri­sa­tion sala­riale s’accom­pa­gne d’un choix, ouvert aux fonc­tion­nai­res déjà en poste, entre le main­tien dans leur situa­tion actuelle ou l’inté­gra­tion dans la caté­go­rie A, avec une durée de car­rière pro­lon­gée.

Le para­gra­phe III pré­cise ce à quoi devront renon­cer les agents déjà en place qui feraient le choix de l’inté­gra­tion en caté­go­rie A :
 1) même s’ils ont passé 15 ans en caté­go­rie active, ils ne pour­ront plus se pré­va­loir de ces quinze années pour béné­fi­cier d’un départ à 55 ans, contrai­re­ment à ce que pré­voit l’arti­cle L. 24 du code des pen­sions civi­les et mili­tai­res de retraite. Il s’agit là de la prin­ci­pale dif­fé­rence avec le dis­po­si­tif adopté lors de la trans­for­ma­tion du corps des ins­ti­tu­teurs en celui des pro­fes­seurs des écoles.
 2) ils ne pour­ront plus béné­fi­cier de la majo­ra­tion de durée d’assu­rance d’une année par période de dix ans passée en caté­go­rie active, prévue par l’arti­cle 78 de la loi n° 2003-775 por­tant réforme des retrai­tes.
 3) ils seront exclus du dis­po­si­tif qui permet aux per­son­nels, ayant inté­gré un corps dont la limite d’âge est de 65 ans et ayant passé quinze ans dans un corps classé en caté­go­rie active, de conti­nuer à béné­fi­cier de la limite d’âge de leur ancien corps, c’est-à-dire 55 ans, en par­ti­cu­lier au regard de la décote.

Selon le minis­tère l’impact finan­cier de cette réforme sera de 100 mil­lions d’euros en 2011, puis 200 mil­lions d’euros en 2012 : c’est un faible inves­tis­se­ment, qui ne pro­duira pas de grands résul­tats. Au regard des besoins de santé de la popu­la­tion, des pro­blè­mes d’attrac­ti­vité et de fidé­li­sa­tion d’une pro­fes­sion en pénu­rie chro­ni­que, il aurait été néces­saire d’attri­buer une grille A type pour les pro­fes­sion­nels infir­miers des trois fonc­tions publi­ques.

Au contraire, par peur de voir sa pen­sion dimi­nuer, les effets « retraite » de l’arti­cle 30 ris­quent d’accé­lé­rer les départs en retraite d’infir­miè­res qui seraient res­tées encore quel­ques années en exer­cice au sein de la fonc­tion publi­que si la reva­lo­ri­sa­tion avait été consé­quente.

La lec­ture de l’avis 2346 pré­senté au nom de la Commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale nous montre que la mesure de reva­lo­ri­sa­tion sala­riale des infir­miè­res est auto­fi­nan­cée à 90 % par une baisse du mon­tant de leur retraite !

Selon la page 16 du rap­port du Député Jacques Domergue : "L’appli­ca­tion de la réforme, induira une charge pour les établissements publics de santé à raison du gain indi­ciaire résul­tant du reclas­se­ment des infir­miers dans les nou­veaux corps de caté­go­rie A et de l’effet de la créa­tion du nouvel espace indi­ciaire en caté­go­rie B. Une montée en charge pro­gres­sive est anti­ci­pée :
 envi­ron 100 mil­lions d’euros en 2011,
 puis 200 mil­lions d’euros en 2012
 pour attein­dre un rythme annuel de 500 mil­lions d’euros en 2015 quand la réforme pren­dra plei­ne­ment effet."

Selon la page 17 du rap­port : "Inversement, la sup­pres­sion de la caté­go­rie active aura pour effet de retar­der le départ à la retraite des agents et donc de géné­rer des économies impor­tan­tes pour le régime de retraite de la fonc­tion publi­que hos­pi­ta­lière, la CNRACL Caisse natio­nale de retrai­tes des agents des col­lec­ti­vi­tés loca­les. On assis­tera en effet à d’une part une moin­dre charge de pen­sions, liée au déca­lage des départs, pour les régi­mes de retraite ; d’autre part un sup­plé­ment de coti­sa­tion au titre des infir­miers qui pro­lon­gent leur acti­vité."

Selon l’objec­tif visé par le minis­tère d’un taux d’option pour la caté­go­rie A de 75 % parmi les infir­miers sus­cep­ti­bles de liqui­der leur retraite dans la décen­nie, « l’impact annuel de la mesure sur les comp­tes de la CNRACL serait un gain total de :
 90 mil­lions en 2011
 184 mil­lions en 2012
 439 mil­lions en 2015"

En résumé, ce docu­ment de la Commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale, réa­lisé à partir des chif­fres de la DHOS, nous montre que l’on nous prend d’une main ce que l’on nous donne de l’autre !

Cette mesure ne répond pas aux besoins de fidé­li­sa­tion et d’attrac­ti­vité des para­mé­di­caux, et aura pour seul effet de bais­ser leurs pen­sions de retrai­tes, alors qu’elles sont déjà fai­bles, car la pen­sion com­plète n’est atteinte qu’avec 41 ans de coti­sa­tions (soit 62 ans) alors que les infir­miè­res par­tent en moyenne épuisées à 57 ans.

La fédé­ra­tion santé-social CFE-CGC estime que l’âge de départ en retraite doit être fonc­tion de la péni­bi­lité, or selon les études objec­ti­ves de la caisse de retraite CNRACL, 1 infir­mière sur 4 part à la retraite en inva­li­dité, et leur espé­rance de vie est infé­rieure à celle d’une femme fran­çaise. Par ailleurs, la caisse de retraite CNRACL est lar­ge­ment excé­den­taire : 2.3 coti­sants pour un retraité. C’est elle qui par­ti­cipe à la soli­da­rité natio­nale en ren­flouant les cais­ses défi­ci­tai­res par des mesu­res de com­pen­sa­tions.

La fédé­ra­tion santé-social CFE-CGC ne com­prend donc pas l’urgence de l’arti­cle 30, alors que le dos­sier « retraite » doit être traité par le gou­ver­ne­ment au deuxième semes­tre 2010 pour l’ensem­ble des sala­riés. Nous deman­dons le retrait de cet arti­cle, qui n’a rien à faire dans le projet de loi rela­tif à la réno­va­tion du dia­lo­gue social dans la fonc­tion publi­que.

Déclaration limi­naire de Thierry Amouroux, au titre de la CFE-CGC, au HCPP du 10 mars 2010

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HCPP 10.03.10 - (334.9 kio) - PDF
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