Haut Conseil des Professions Paramédicales du 14 mai 2014

15 mai 2014

Déclaration liminaire de la CFE-CGC, au HCPP du 14.05.14

Il sem­ble­rait que Marisol Touraine soit fas­ci­née par le lac de Lamartine : « Ô Temps, sus­pends ton vol »…

En effet, depuis des mois nous sommes dans l’attente d’arbi­tra­ges minis­té­riels qui blo­quent tous les dos­siers pro­fes­sion­nels. Comment expli­quer le blo­cage de la réin­gé­nie­rie des para­mé­di­caux, alors que Marisol Touraine et Geneviève Fioraso ont fina­le­ment conser­vés les mêmes por­te­feuilles minis­té­riels ? Tout a été sus­pendu au fameux rap­port des ins­pec­tions géné­ra­les, puis au ver­dict des élections muni­ci­pa­les, à l’attente du rema­nie­ment,… Au final, comme le Cabinet de la Ministre est resté inchangé, les arbi­tra­ges devraient être rendus.
 Quand aurons-nous le calen­drier des réin­gé­nie­ries, demandé par le Haut Conseil à chaque réu­nion ?
 Quand les tra­vaux sur le réfé­ren­tiel de for­ma­tion des IBODE, bloqué depuis 2009 vont-ils repren­dre ?
 Quand aurons les arbi­tra­ges sur la for­ma­tion cadre : un Master ? une for­ma­tion en Y ? avec quel opé­ra­teur : IFCS ? Université ? Haute Ecole ? un sys­tème mixte ?

La pre­mière pro­mo­tion uni­ver­si­ta­risé d’IADE va sortir : auront-ils une reconnais­sance de grade Master ? On cons­tate une réti­cence des uni­ver­si­tés à signer les conven­tions sans avoir l’assu­rance d’une com­pen­sa­tion des salai­res des uni­ver­si­tai­res inter­ve­nant dans la nou­velle for­ma­tion. Et faute de conven­tion­ne­ment effec­tif de toutes les écoles d’IADE, on ne pour­rait pas publier le texte attri­buant le grade de Master ! Mais qui doit veiller au res­pect de la parole de l’Etat ? Qui com­mande, la minis­tre ou le club des rec­teurs ?

La Fédération Santé Social de la CFE-CGC est par­ti­cu­liè­re­ment inquiète des nou­vel­les mesu­res d’économies pré­vues sur les établissements hos­pi­ta­liers dans le cadre du plan de rigueur. Aujourd’hui, l’hôpi­tal est déjà malade des trai­te­ments comp­ta­bles infli­gés ces der­niè­res années. Les poli­ti­ques et l’admi­nis­tra­tion sont passés d’une logi­que qua­li­ta­tive à une logi­que faus­se­ment sécu­ri­taire. Les ARS soi­gnent les indi­ca­teurs, nous des patients.

Deux décen­nies d’études natio­na­les et inter­na­tio­na­les ont établi, de façon cons­tante, un lien très clair entre la charge de tra­vail des pro­fes­sion­nels infir­miers et la santé des patients, y com­pris une aug­men­ta­tion du taux de mor­ta­lité, des infec­tions hos­pi­ta­liè­res et des erreurs médi­ca­les. L’étude parue en février dans le Lancet montre que chaque patient ajouté à la charge de tra­vail quo­ti­dienne d’une infir­mière en chi­rur­gie aug­mente le risque de décès de 7% (sur 420.000 patients de 300 hôpi­taux de 9 pays euro­péens). Une étude simi­laire publiée en 2002 dans le jour­nal de l’American Medical Association (menée sur 800 hôpi­taux de 11 états amé­ri­cains) était arri­vée exac­te­ment au même chif­fre de 7%.

Le résul­tat de ces études devrait conduire à agir immé­dia­te­ment pour régler les pro­blè­mes liés à la charge de tra­vail du per­son­nel soi­gnant. Pourtant, les pou­voirs publics lais­sent les choses empi­rer, avec 100.000 lits fermés en 10 ans. Il en découle une aug­men­ta­tion du risque de mor­bi­dité et de mor­ta­lité à l’hôpi­tal : mau­vaise ges­tion de la dou­leur, mau­vaise ges­tion des dou­leurs tho­ra­ci­ques aigues, retard dans l’admi­nis­tra­tion d’anti­bio­ti­ques par rap­port aux pro­to­co­les recom­man­dés, aug­men­ta­tion du nombre de réad­mis­sions à l’hôpi­tal, et dimi­nu­tion du degré de satis­fac­tion des patients.

La Fédération Santé Social de la CFE-CGC estime qu’il est du rôle et de la res­pon­sa­bi­lité du HCPP de tra­vailler sur de telles don­nées scien­ti­fi­ques pour faire des recom­man­da­tions de bonnes pra­ti­ques sur des ratios d’infir­miè­res par patients dans telles patho­lo­gies, afin de garan­tir la qua­lité et la sécu­rité des soins.

Dans sa der­nière étude publiée le 25 février 2014 et inti­tu­lée "Le méde­cin géné­ra­liste face au paie­ment à la per­for­mance et à la coo­pé­ra­tion avec les infir­miers", la Direction de la recher­che, des études, de l’évaluation et des sta­tis­ti­ques (DREES) s’est pen­chée sur la coo­pé­ra­tion entre méde­cins et infir­miers, qui relè­vent de l’arti­cle 51 de la loi HPST. Les 2/3 des méde­cins sont contre, ce qui tombe bien, vu que 87% des infir­miè­res refu­sent ces trans­ferts de tâches. Leur méconnais­sance de la pro­fes­sion infir­mière est telle que 20% des méde­cins géné­ra­lis­tes ne sou­hai­tent pas délé­guer des actes ou des com­pé­ten­ces qui relè­vent pour­tant du rôle propre infir­mier depuis 1978, de même que la "sur­veillance de la ten­sion arté­rielle" !

Voici plu­sieurs réu­nions où nous deman­dons qu’un nou­veau bilan de ces coo­pé­ra­tions art 51 soit effec­tué au HCPP, car en octo­bre 2013, sur les 27 pro­to­co­les qui avaient obtenu un avis favo­ra­ble, seuls 15 étaient en appli­ca­tion, les pro­mo­teurs ayant changé d’emploi entre-temps. Au final, sur 1 mil­lion de pro­fes­sion­nels, seuls 225 seraient enga­gés dans ces déri­ves léga­li­sées, brèche grande ouverte dans un dis­po­si­tif jusque là des­tiné à garan­tir la sécu­rité des patients : for­ma­tion ini­tiale basée sur un pro­gramme offi­ciel fixé par arrêté, évaluation des com­pé­ten­ces acqui­ses par le moyen d’un examen, et attri­bu­tion d’un diplôme d’Etat habi­li­tant à un exer­cice règle­menté et pro­tégé, au nom de la santé publi­que et de la sécu­rité des patients.

Le 16 mai, l’AP-HP orga­nise une « grand messe » autour de la coo­pé­ra­tion de can­cé­ro­lo­gie du CHU St Antoine, pour­tant condam­née par les asso­cia­tions de patients du CISS, et par des orga­ni­sa­tions pro­fes­sion­nel­les. Ce pro­to­cole fait également l’objet d’une sai­sine du Haut Conseil de la Santé Publique pour perte de chance et mise en danger d’autrui, car une infir­mière ne peut rem­pla­cer un can­cé­ro­lo­gue, moyen­nant 45 heures de for­ma­tion théo­ri­que vali­dées par une simple attes­ta­tion de pré­sence, pour pres­crire libre­ment 5 types de médi­ca­ments (antié­mé­ti­ques ; anxio­ly­ti­ques ; anti­bio­ti­ques de la classe des cycli­nes, anti-diar­rhéi­ques, topi­ques cuta­nés).

Pour sa part, notre HCPP avait adopté la motion sui­vante : « Les études inter­na­tio­na­les sur les pra­ti­ques avan­cées mon­trent que pour assu­rer le suivi des patients chro­ni­ques, avec une pres­crip­tion infir­mière de médi­ca­ments, il est néces­saire que l’infir­mière dis­pose d’une for­ma­tion sup­plé­men­taire de niveau master. Et ce sur la base de tra­vaux por­tant sur envi­ron 330.000 infir­miè­res de pra­ti­ques avan­cées dans 25 pays (avec pour les USA 220.000 infir­miè­res en fonc­tion depuis les années 1960, soit 50 ans de recul).

Dans sa séance du 29 mai 2013, le HCPP, Haut Conseil des Professions Paramédicales, a consi­déré que le pro­to­cole de « Consultation infir­mière de suivi des patients trai­tés par anti­can­cé­reux oraux à domi­cile, délé­ga­tion médi­cale d’acti­vité de pres­crip­tion », auto­risé le 28.12.12 par l’Agence Régionale de Santé d’ile de France dans le cadre de l’arti­cle 51 de la loi HPST, ne répond pas à ces recom­man­da­tions de bonnes pra­ti­ques, et demande son retrait. »

Thierry Amouroux, Déclaration limi­naire de la CFE-CGC, au HCPP du 14.05.14

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ORDRE DU JOUR DU HCPP du 14.05.14
 1/ Approbation du compte-rendu de la séance du 3 avril 2014
 2/ Examen pour avis du projet de décret rela­tif aux condi­tions d’auto­ri­sa­tion d’un pro­gramme d’éducation thé­ra­peu­ti­que du patient
 3/ Examen pour avis du projet d’arrêté rela­tif au cahier des char­ges des pro­gram­mes d’éducation thé­ra­peu­ti­que du patient et à la com­po­si­tion du dos­sier de demande de leur auto­ri­sa­tion et modi­fiant l’arrêté du 2 août 2010 modi­fié rela­tif aux com­pé­ten­ces requi­ses pour dis­pen­ser ou coor­don­ner l’éducation thé­ra­peu­ti­que du patient
 4/ Examen pour avis du projet de décret rela­tif aux droits et à la pro­tec­tion des per­son­nes fai­sant l’objet de soins psy­chia­tri­ques et aux moda­li­tés de leur prise en charge
 5/ Examen pour avis du projet d’arrêté modi­fiant l’arrêté du 1er février 2011 rela­tif aux pro­fes­sions de pro­thé­siste et orthé­siste pour l’appa­reillage des per­son­nes han­di­ca­pées
 6/ Examen pour avis du projet de décret rela­tif à la for­ma­tion et à la liste des exa­mens men­tion­née à l’arti­cle L. 6211-4 du CSP (exa­mens de détec­tion anti­gé­ni­que du palu­disme en Guyane)
 7/ Communication de Mme Clara de BORT rela­tive à l’Etablissement de pré­pa­ra­tion et de réponse aux urgen­ces sani­tai­res (EPRUS)

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