Infirmières : 87 % de femmes, un rôle clé… et toujours une reconnaissance à défendre

7 mars 2025

Le 8 mars célè­bre la lutte pour les droits des femmes. Il rap­pelle l’égalité encore à conqué­rir, notam­ment sur le ter­rain pro­fes­sion­nel. Pourtant, cer­tai­nes iné­ga­li­tés pas­sent ina­per­çues, parce qu’elles sont ancrées dans l’his­toire, les men­ta­li­tés, les ins­ti­tu­tions.

La pro­fes­sion infir­mière en est l’un des exem­ples les plus fla­grants. 87 % des infir­miers en France sont des femmes, et cette forte fémi­ni­sa­tion a des consé­quen­ces bien réel­les :
🔹 Un salaire infé­rieur aux pro­fes­sions com­pa­ra­bles. Avec un Bac +3, une res­pon­sa­bi­lité cons­tante et des horai­res à ral­longe, une infir­mière gagne sou­vent moins qu’un sala­rié d’un autre sec­teur au même niveau d’étude. La raison ? Les métiers du soin sont encore perçus comme une exten­sion des rôles fémi­nins tra­di­tion­nels.
🔹 Des condi­tions de tra­vail parmi les plus dures. Travail de nuit, charge émotionnelle lourde, péni­bi­lité phy­si­que, stress, effec­tifs insuf­fi­sants… Le tout dans un envi­ron­ne­ment où l’usure pro­fes­sion­nelle est une norme, et non une alerte.
🔹 Un statut his­to­ri­que­ment déva­lo­risé. Longtemps asso­ciée aux reli­gieu­ses, la pro­fes­sion infir­mière traîne une image de dévoue­ment quasi-béné­vole. Considérée comme une exten­sion "natu­relle" des com­pé­ten­ces fémi­ni­nes (empa­thie, soin aux autres), ce qui contri­bue à leur déva­lo­ri­sa­tion économique. Un salaire d’appoint, censé com­plé­ter le revenu du foyer mais pas en être la colonne ver­té­brale. Cette vision pas­séiste per­siste aujourd’hui : pour­quoi mieux payer un tra­vail que cer­tains consi­dè­rent comme une « voca­tion » ?

Mais ce mépris envers les 700.000 infir­miè­res ne s’arrête pas là. Il se tra­duit dans les déci­sions poli­ti­ques et les prises de posi­tion des ins­tan­ces médi­ca­les.

Le 10 mars, l’Assemblée natio­nale exa­mi­nera une loi visant à ren­for­cer le rôle infir­mier. Une avan­cée atten­due, vu le déca­lage actuel entre nos com­pé­ten­ces réel­les et une régle­men­ta­tion obso­lète (loi de 1978, décret d’exer­cice de 2004). Mais res­sen­tie par d’autres comme une menace.

L’Ordre des méde­cins exprime ses crain­tes face à la reconnais­sance du diag­nos­tic infir­mier. Pourtant, ce diag­nos­tic est ins­crit comme tel dans le Code de la Santé Publique depuis des décen­nies (Article R4311-3 du Code de la Santé Publique). Evaluer l’état de santé d’un patient, iden­ti­fier ses besoins, orga­ni­ser les soins adap­tés : une exper­tise, pas une assis­tance. Mais dans un sys­tème struc­turé par la hié­rar­chie médi­cale, accor­der aux infir­miè­res un pou­voir de déci­sion leur reste impen­sa­ble.
https://www.egora.fr/actus-pro/poli­ti­ques/pro­po­si­tion-de-loi-infir­miere-inquiet-lordre-des-mede­cins-ecrit-fre­de­ric

L’Académie de méde­cine enfonce le clou. Selon elle, se passer du diag­nos­tic médi­cal doit rester une excep­tion. Comme si l’auto­no­mie des infir­miè­res était un risque, et non une solu­tion à la crise de l’accès aux soins.
Cette défiance illus­tre une réa­lité plus large : dans le sys­tème de santé, les com­pé­ten­ces fémi­ni­nes sont sys­té­ma­ti­que­ment sous-évaluées. Quand un méde­cin pose un diag­nos­tic, c’est une exper­tise. Quand une infir­mière en fait autant, c’est un pro­blème.
https://www.aca­de­mie-mede­cine.fr/se-passer-du-diag­nos­tic-medi­cal-doit-rester-une-excep­tion/

Cette remise en ques­tion des com­pé­ten­ces infir­miè­res se retrouve aussi dans les résis­tan­ces à faire évoluer leur for­ma­tion. Actuellement, les études d’infir­mier durent trois ans en France, et les syn­di­cats infir­miers deman­dent l’ajout d’une qua­trième année d’études. L’objec­tif ? Renforcer la pro­fes­sion­na­li­sa­tion, mieux pré­pa­rer les infir­miè­res aux réa­li­tés du ter­rain et assu­rer une meilleure inté­gra­tion dans le monde du tra­vail. Ce modèle a déjà fait ses preu­ves dans la plu­part des pays d’Europe, et toutes les études inter­na­tio­na­les démon­trent que les patients pris en charge par des infir­miè­res for­mées en quatre ans ont de meilleurs résul­tats de santé. Mais cette réforme se heurte à des résis­tan­ces. Certains refu­sent d’accor­der aux infir­miè­res une for­ma­tion plus appro­fon­die qui ren­for­ce­rait leur auto­no­mie. Comme si leur rôle devait rester subor­donné, et leur exper­tise limi­tée.

Cette situa­tion cons­ti­tue un exem­ple concret des iné­ga­li­tés de genre que la Journée inter­na­tio­nale des femmes cher­che à mettre en lumière et à com­bat­tre. Derrière ces résis­tan­ces, une ques­tion essen­tielle : qui a le pou­voir de soi­gner ? Et pour­quoi refuse-t-on aux 700.000 infir­miè­res la place qui leur revient, alors qu’elles sont les pre­miè­res à tenir le sys­tème debout ?

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