Les infirmières ont-elles un métier si pénible ?

12 octobre 2010

Article paru sur L’Expansion.com avec AFP - publié le 08/04/2010
http://www.lex­pan­sion.com/eco­no­mie/les-infir­mie­res-ont-elles-un-metier-si-peni­ble_230070.html

Le métier d’infir­mière n’est pas péni­ble puisqu’elles ne sont pas plus inva­li­des et qu’elles ne meu­rent pas plus tôt que la moyenne des femmes... C’est ce qu’affirme Roselyne Bachelot. Un point de vue que ne par­ta­gent pas les per­son­nes concer­nées. Les témoi­gna­ges de nos inter­nau­tes.

Les dépu­tés de la majo­rité ont adopté jeudi 8 avril l’échange pro­posé par le gou­ver­ne­ment : accor­der aux infir­miè­res du public des salai­res plus élevés contre une retraite plus tar­dive. Les per­son­nels infir­miers et para­mé­di­caux devront donc choi­sir, à partir de juin, entre une meilleure rému­né­ra­tion mais un départ à la retraite à 60 ans, ou le main­tien de leur droit à la retraite à partir de 55 ans mais mais une reva­lo­ri­sa­tion sala­riale beau­coup plus faible. S’ils optent pour la pre­mière solu­tion, ils per­dent de facto la boni­fi­ca­tion - un an de coti­sa­tion pour dix ans tra­vaillés - qui leur avait été accor­dée en 2003 par la loi Fillon sur les retrai­tes, comme reconnais­sance de la péni­bi­lité de la pro­fes­sion.

Il y a la polé­mi­que des chif­fres...

Il faut dire que Roselyne Bachelot a balayé d’un revers de chif­fres la ques­tion de la péni­bi­lité du métier d’infir­mière. Selon la minis­tre de la Santé, l’espé­rance de vie des infir­miè­res à 55 ans est dans la moyenne des femmes fran­çai­ses et le taux de celles qui par­tent à la retraite avec une inva­li­dité n’est "que" de 4,7%, contre 6,7% dans la tota­lité de la fonc­tion publi­que hos­pi­ta­lière. "Ce sont les chif­fres de la vérité", assure-t-elle, alors que les syn­di­cats pré­ten­dent qu’une infir­mière retrai­tée sur quatre est en inva­li­dité.

Les chif­fres cités par Roselyne Bachelot, publiés dans une annexe au projet de loi en ligne sur le site de l’Assemblée natio­nale, font réfé­rence au pour­cen­tage d’infir­miè­res qui sont mises à la retraite pour inva­li­dité totale. Les syn­di­cats évoquent quant à eux le pour­cen­tage d’infir­miè­res qui par­tent à la retraite avec une inva­li­dité par­tielle reconnue.

Ainsi, selon les sta­tis­ti­ques de la Caisse natio­nale de retrai­tes des agents des col­lec­ti­vi­tés loca­les (CNRACL), "la conces­sion d’une rente d’inva­li­dité concerne 9,8% des nou­vel­les pen­sions hos­pi­ta­liè­res accor­dées en 2008". Par ailleurs, tou­jours selon la CNRACL, l’âge moyen des femmes hos­pi­ta­liè­res retrai­tées décé­dées en 2008 est de 78,8 ans, soit envi­ron 22 ans après leur départ à la retraite. Leur espé­rance de vie n’est donc pas de 31,6 ans comme l’a affirmé la minis­tre de la Santé.

... et la réa­lité du ter­rain

"Comme beau­coup d’infir­miè­res, je suis cho­quée par les propos de notre minis­tre de tutelle qui témoi­gnent d’une totale méconnais­sance et d’un mépris de notre pro­fes­sion", déplore Nathalie Depoire, pré­si­dente de la Coordination Nationale Infirmière (CNI).

"Si François Fillon a accordé la boni­fi­ca­tion aux infir­miè­res en 1993, c’est que le métier rem­plit plus de la moitié des cri­tè­res de péni­bi­lité", rap­pelle de son côté Philippe Crepel, res­pon­sa­ble de la CGT Santé, qui cite notam­ment le tra­vail de nuit, les horai­res en 3/8, le stress, le contact avec des pro­duits toxi­ques et des mala­des et le port de char­ges lour­des.

"Notre minis­tre oublie de dire qu’une infir­mière sur deux dans l’hôpi­tal public arrête d’exer­cer au bout de cinq ans en raison des condi­tions de tra­vail", note Thierry Amouroux, pré­si­dent du SNPI.

Selon une enquête réa­li­sée en 2008 par la Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance des Infirmiers, 51% des infir­miers jugent leur métier très dif­fi­cile phy­si­que­ment - ils por­tent en moyenne 9 char­ges de patients dépen­dants par jour -, 32% très dif­fi­cile psy­cho­lo­gi­que­ment. Certes, l’étude porte sur le sec­teur libé­ral, mais le métier n’est sûre­ment plus aisé dans l’hôpi­tal public. Comme en témoi­gnent de nom­breux inter­nau­tes de L’Expansion.com, qui ne sont pas, mais alors pas du tout d’accord avec Roselyne Bachelot.

Partager l'article
     

Rechercher sur le site


Dialoguer avec nous sur Facebook
Nous suivre sur Twitter
Nous suivre sur LinkedIn
Suivre notre Flux RSS

Quelle partie du rôle propre infirmier peut être confiée à une aide-soignante ?

Depuis l’entrée en vigueur du décret n° 2021-980 du 23 juillet 2021, le périmètre d’intervention (…)

Des médicaments dans l’eau, et personne pour les filtrer ?

L’eau du robinet contient aujourd’hui plus de résidus médicamenteux que de pesticides. Et tout (…)

Oxyde d’éthylène : l’ombre toxique de la stérilisation plane sur les soignants

La stérilisation sauve des vies. Mais quand elle empoisonne ceux qui soignent, qui protège les (…)

Formation infirmière : la France choisit l’impasse pendant que le monde avance

Mieux formés, les infirmiers sauvent plus de vies. C’est prouvé, documenté, validé. Mais la (…)

Partout où la guerre détruit, les soins reconstruisent

La paix ne commence pas dans les traités, mais dans les gestes quotidiens. C’est l’un des (…)

Redéfinir l’infirmière, c’est refonder la santé

À quoi reconnaît-on une infirmière ? Par la blouse ? Les soins prodigués au chevet ? Trop (…)