Nouvelle Gouvernance : enjeux et risques
18 janvier 2006
(Texte paru dans le bulletin fédéral de juin 2005)
L’Ordonnance simplifiant la gestion et le régime juridique des établissements de santé est enfin parue le 2 mai 2005 (n°2005-406). C’est le support légal de la "Nouvelle Gouvernance Hospitalière", que vous pouvez télécharger dans le dossier "textes juridiques".
Cette Ordonnance redéfinit d’abord le rôle des instances :
Le conseil d’administration est recentré sur un rôle de définition des orientations stratégiques, d’évaluation et de contrôle de leur mise en œuvre.
Un conseil exécutif est créé. Cette instance est composée à parité de médecins et de responsables administratifs et présidée par le directeur de l’hôpital.
Elle associe étroitement les partenaires médicaux et administratifs dans l’élaboration de tous les projets importants de l’hôpital.
La commission médicale d’établissement (représentant les personnels médicaux) et le comité technique d’établissement (représentant les personnels hospitaliers) sont plus étroitement associés aux orientations stratégiques et au fonctionnement de l’établissement.
La commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques voit ses compétences élargies et renforcées, notamment dans le domaine de la politique d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins.
L’Ordonnance vise en second lieu à donner davantage de souplesse et d’adaptabilité à l’organisation médicale en évitant les cloisonnements préjudiciables à la prise en charge des patients :
La mise en place de pôles d’activité, unité de taille suffisante pour être dotées d’autonomie et de responsabilité, contribuera à la déconcentration de la gestion. Dirigés par des praticiens, ces pôles disposant d’une masse critique sont, dans cet esprit, engagés dans une démarche de contractualisation interne pour simplifier la gestion quotidienne et assurer la mise en œuvre des objectifs stratégiques de l’établissement.
Le conseil de pôle composé de représentants médicaux et administratifs permet l’association des personnels et favorise l’élaboration des orientations et des projets du pôle. Au sein des pôles, des structures internes, services, unités fonctionnelles ou autres structures, ont pour mission d’assurer l’organisation de la prise en charge médicale des malades et de participer à l’évaluation des pratiques professionnelles.
L’Ordonnance permet enfin de refonder, dans les CHU, la collaboration hospitalo-universitaire en renforçant par la conclusion de nouvelles conventions les missions d’enseignement, de recherche et d’innovation. Ainsi l’université sera partie prenante au contrat d’objectif et de moyens des centres hospitalier universitaires et l’hôpital pourra être appelé à participer au processus d’élaboration du contrat quadriennal entre les universités et l’Etat.
Cette modernisation indispensable pour l’hôpital a été précédée d’une anticipation dans 110 établissements volontaires. Beaucoup d’articles des décrets renvoient au règlement intérieur de l’établissement, pour laisser une souplesse locale. L’expérience de ces établissements permettra de faire un choix éclairé entre divers modèles possibles.
Si elle est bien utilisée, l’Ordonnance peut donner un nouvel élan au service public hospitalier pour l’adapter aux enjeux de la santé publique et du progrès médical et aux attentes de qualité d’accueil et de soins des malades. Inversement, elle peut être exploitée pour renforcer des potentats locaux. C’est pour veiller à sa bonne application que notre Fédération Santé Social CFE-CGC est membre du Comité de Suivi de ce protocole, afin que l’esprit de la nouvelle gouvernance soit respecté.
Le fait que, grâce à ce texte, les membres des Conseils de Pôles, et de la Commission des Soins soient enfin élus, permettra une meilleure expression démocratique des salariés, au plus près des réalités.
Dans le dernier numéro de ce bulletin, nous avions alerté sur les risques qui pesaient sur les cadres supérieurs qui ne seraient pas coordonnateurs de pôles, et les répercutions qui en découleraient sur les perspectives de carrières des cadres de santé.
Le contre exemple de l’AP-HP est la parfaite illustration de la mauvaise utilisation de ce texte. La Direction Générale utilise le prétexte de la mise en place des pôles pour appliquer son plan d’économie. Au nom de la mutualisation des moyens, elle décide de tailler en pièce l’encadrement, en supprimant 400 postes de cadres, et la moitié des postes de cadres supérieurs, d’ici 2009 !
Du coup, l’encadrement de l’AP-HP devient hostile à la mise en place des pôles, alors que son rôle est central pour la mise en place à l’hôpital de la nouvelle gouvernance et de la tarification à l’activité.
A considérer les cadres comme une variable d’ajustement de son plan d’économies, la Direction Générale de l’AP-HP montre son peu de considération pour l’encadrement.