PLFSS 2025 : la Sécurité sociale est un pilier. Alors pourquoi l’amputer pour faire des économies ?

8 octobre 2024

On dit que l’accès aux soins est un droit fondamental. Mais que se passe-t-il quand ce droit devient un luxe pour beaucoup ?

C’est exactement ce qui est en jeu avec les orientations du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2025. Parmi les mesures les plus redoutées : la réduction de la prise en charge des affections de longue durée (ALD). Ces pathologies concernent un Français sur cinq et permettent à ceux qui en sont atteints d’être exonérés de nombreux frais médicaux. Mais un rapport IGAS-IGF propose de retirer certaines maladies de cette liste, réalisant ainsi des économies comprises entre 540 et 870 millions d’euros. Derrière cette froide équation budgétaire, c’est une réalité brutale qui se cache : des patients déjà fragilisés par la maladie, risquant de voir leurs coûts de santé exploser.

Une autre réflexion vise à augmenter les franchises. Pour les malades, cela signifierait un coût supplémentaire, dans un contexte où les franchises médicales ont déjà doublé en 2024. À force de rogner sur les remboursements, on pousse les patients à retarder, voire à renoncer à des soins essentiels. Combien devront choisir entre une prothèse ou un fauteuil roulant et d’autres besoins quotidiens ?

Les arrêts maladie sont aussi dans le viseur. Le gouvernement réfléchit à rallonger le délai de carence de trois à huit jours. Pour beaucoup de salariés, notamment les plus précaires, c’est une catastrophe annoncée. Pendant une semaine, aucune indemnité ne viendrait compenser la perte de salaire, et l’incitation à travailler tout en étant malade devient évidente. Faut-il vraiment prendre le risque de dégrader la santé des travailleurs pour quelques millions d’euros économisés ?

Les réformes des dernières années ont déjà laissé des traces profondes. En 2023, les remboursements des soins dentaires ont été réduits, en 2024, les franchises médicales ont grimpé. Maintenant, le spectre des coupes budgétaires s’étend à toutes les consultations médicales, dont les remboursements pourraient encore baisser. Face à cette situation, la solution proposée serait que les complémentaires santé prennent le relais. Mais cette logique a une limite. Aujourd’hui, 12 % des personnes les plus modestes n’ont pas de couverture complémentaire, et ce chiffre risque de s’aggraver. Les cotisations des mutuelles augmentent chaque année, +8 % en moyenne en 2024, et rien ne semble freiner cette tendance. Ceux qui n’ont pas accès à des contrats collectifs – chômeurs, indépendants, contrats précaires – seront les premiers à subir cette double peine : payer plus pour être moins couverts.

Et pourtant, dans toutes ces mesures d’économies, on ne parle jamais des 74 milliards d’exonérations de cotisations sociales accordées chaque année aux entreprises. Cette somme colossale prive la Sécurité sociale de ses ressources. Pourquoi ce silence sur cette question ? Pourquoi les assurés, déjà éprouvés par l’augmentation du coût de la vie, devraient-ils supporter seuls les efforts pour redresser les comptes publics ? D’autant que les exonérations n’ont pas montré d’effet spectaculaire sur l’emploi ou la compétitivité.

L’Assurance maladie, pour sa part, tente aussi de réduire la facture. Dans un rapport, elle avance 30 propositions pour économiser 1,56 milliard d’euros en 2025. Parmi ces mesures, plus d’un milliard proviendrait de la nouvelle convention signée avec les médecins libéraux. Mais une fois encore, l’ajustement passerait par un alourdissement du reste à charge pour les patients, qui devront faire face à une prise en charge réduite de leurs consultations. Les plus riches pourront probablement s’en sortir avec des assurances plus coûteuses. Mais qu’en est-il de ceux qui vivent déjà sous le seuil de pauvreté, ou qui peinent à boucler les fins de mois ?

"À force de réduire les garanties et de multiplier les obstacles à l’accès aux soins, n’est-on pas en train de transformer notre système de santé universel en un privilège réservé à une élite ? Le droit à la santé, pour tous, est-il encore une priorité dans la France de 2025, ou est-ce un rêve qui s’efface peu à peu, submergé par la logique des économies ?" dénonce Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI

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Voir aussi :
 Baisse du remboursement des consultations médicales et de l’indemnisation des arrêts de travail : en 2025, vous êtes priés de ne pas être malade !
https://www.france-assos-sante.org/bon_mauvais_point/baisse-du-remboursement-des-consultations-medicales-et-de-lindemnisation-des-arrets-de-travail-en-2025-vous-etes-pries-de-ne-pas-etre-malade/

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