Résidus de médicaments dans l’eau : un comité et un plan PNRM
24 novembre 2009
Les infirmières exclues du Comité de Pilotage : médecins, pharmaciens et vétérinaires suffisent, pourquoi s’adresser à du "petit personnel d’exécution" ? Comment saboter une bonne idée en niant l’existence des professionnels en première ligne !
Afin d’élaborer le Plan National sur les Résidus de Médicaments dans l’Eau (PNRM) un comité national de pilotage est mis en place afin de permettre une concertation entre les institutionnels (ministères de la Santé, du Développement durable, de la Recherche et de l’Agriculture, agences de sécurité sanitaire, etc.), chercheurs, professionnels de santé (Ordres nationaux des médecins, des pharmaciens, des vétérinaires, etc.) et les associations de professionnels (Fédération professionnelle des entreprises de l’eau, Fédération nationale des collectivités concédantes et régies), d’usagers (UFC-Que choisir, de malades (Collectif interassociatif sur la santé) et de défense de l’environnement (WWF, Robin des bois, France nature environnement), ainsi qu’avec les industriels (Leem, Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire). Alors que ce comité comporte des syndicats de pécheurs, nous aurions trouvé logique d’assurer une représentation des 500.000 infirmières de France ! Une nouvelle marque du mépris du ministère pour notre profession.
La France est le 4ème consommateur mondial de médicaments. Plus de 3.000 médicaments humains et 300 médicaments vétérinaires sont actuellement disponibles sur le marché français. Ce sont des substances biologiquement actives qui se caractérisent par une grande diversité de structure chimique. Les résidus de médicaments, lorsqu’ils ne sont pas
totalement dégradés dans l’organisme, sont excrétés dans les selles et les urines sous leur forme initiale ou sous la forme d’un ou plusieurs métabolites.
Antibiotiques, antidépresseurs, bêtabloquants… mais aussi médicaments à usage vétérinaire (antibiotiques, hormones, antiparasitaires) sont autant de substances qui sont rejetées dans les milieux aquatiques. Les concentrations dans le milieu récepteur varient selon la biodégradabilité des molécules et les performances des stations d’épuration.
Depuis plusieurs années, la communauté scientifique, les pouvoirs publics et le public s’interrogent sur la présence dans les milieux aquatiques (eaux de surface, eaux souterraines) et dans l’eau potable, à l’état de traces, de résidus de médicaments, ainsi que sur leurs effets sur l’environnement et la santé humaine.
Ainsi la faune aquatique connaît aujourd’hui des diminutions de population importantes liées tant aux modifications physico-chimiques que biologiques des eaux, mais également des modifications dans les sex ratio des populations qui pourraient être liées aux résidus
médicamenteux.
La maîtrise des risques liés aux résidus de médicaments dans les eaux fait partie des conclusions des tables rondes du Grenelle Environnement. Cet engagement du Grenelle (n° 103) a été intégré dans le Plan nation al Santé Environnement 2 dont le comité chargé de suivre et d’orienter la mise en oeuvre de ses actions a été installé le 22 octobre dernier.
L’une des 12 actions « phares » du PNSE 2 vise à : « Améliorer la
connaissance et réduire les risques liés aux rejets de médicaments de
l’environnement ». Afin de mener à bien ces objectifs, il a été décidé par les ministères en charge de la santé et de l’environnement de mettre en place un Plan National sur les Résidus de Médicaments dans l’Eau (PNRM) pour développer et coordonner les actions à mettre en place tant dans le champ sanitaire qu’environnemental.
Afin d’élaborer le Plan National sur les Résidus de Médicaments dans l’Eau (PNRM) un comité national de pilotage est mis en place afin de permettre une concertation avec les institutionnels, chercheurs, professionnels de santé et également associations de professionnels, d’usagers, de malades et de défense de l’environnement, mais aussi industriels. Le but dans un premier temps est d’élaborer un plan cohérent et impliquant tous
les acteurs concernés, puis de suivre et de rendre compte du degré d’avancement des mesures qui auront été prises et de proposer d’éventuelles adaptations.
Les enjeux et les attentes des autorités sanitaires et environnementales par rapport au plan d’actions
Attentes dans le domaine de la santé humaine
Dans le champ sanitaire, l’évaluation et la gestion des risques sanitaires pour la consommation d’eau du robinet pouvant contenir des traces de médicaments constituent une priorité.
Il s’agit d’un exercice visant à anticiper un risque éventuel pour l’Homme tout en prenant en compte le fait que le médicament est un micropolluant à distinguer des autres micropolluants chimiques de l’eau de par sa fonction thérapeutique.
Le futur plan devrait explorer notamment les associations et interactions potentielles avec d’autres molécules chimiques, l’exposition chronique à faible dose et la mesure des effets sur l’Homme par des tests biologiques ou biochimiques, en accordant une attention particulière aux anticancéreux et dérivés hormonaux.
Deux axes prioritaires doivent donc être explorés dans ce domaine :
Le premier axe est d’apprécier la pertinence du passage d’une surveillance exploratoire par des campagnes de mesures passées et présentes à une surveillance réglementaire de nouvelles substances.
Le second axe attendu porte sur les mesures de gestion des risques sanitaires et plus particulièrement les actions possibles de réduction des émissions à la source concernant autant les sources de pollution diffuses que ponctuelles.
Attentes dans le domaine de l’environnement
Le futur plan s’inscrit dans la stratégie globale de réduction des pollutions des milieux aquatiques par les micropolluants. La priorité est d’engager des actions de réduction des émissions de substances à la source, afin de répondre aux exigences de la directive cadre sur l’eau (DCE), de la directive cadre "stratégie pour le milieu marin" et plus particulièrement
aux objectifs fixés par le Grenelle Environnement ; dans le domaine de l’eau, le premier objectif est d’atteindre ou de conserver d’ici à 2015 le bon état écologique ou le bon potentiel, au sens de l’article 2 de la directive cadre sur l’eau de l’ensemble des masses d’eau, tant continentales que marines. L’Etat se fixe l’objectif de ne pas recourir aux reports
de délais, autorisés par cette directive, pour plus d’un tiers des masses d’eau.
A l’aube de l’année 2010, année internationale de la biodiversité ce plan est particulièrement important pour la faune aquatique.
Le plan devra donc participer à la prise en compte des substances à risque émergent tant au niveau national, qu’européen ou international.
Trois axes semblent nécessaires d’explorer :
Améliorer les connaissances scientifiques (métrologie, écotoxicologie, modélisation, etc.) ;
Améliorer et renforcer la surveillance des milieux (identification de lacunes éventuelles) ;
Renforcer les actions de réduction des émissions à la source.
Des enjeux et des attentes communes peuvent ainsi être
dégagés :
Intensifier le partage des connaissances et des savoir-faire entre les acteurs des domaines de la santé et de l’environnement ;
Identifier les passerelles et objectifs communs dans ces deux domaines et la manière de partager les outils de surveillance et d’évaluation des risques, dans le respect des compétences de chacun ;
Développer l’acquisition de connaissances sur l’écotoxicité de ces molécules ;
Réfléchir à des mesures de gestion pertinentes afin d’éviter autant que possible l’intrusion de ces substances dans le cycle de l’eau.
Les lignes directrices du futur Plan National sur les Résidus de Médicaments dans l’Eau (PNRM)
Le futur PNRM devra s’articuler autour de deux axes majeurs qui visent à :
Evaluer les risques environnementaux et sanitaires par l’acquisition des
connaissances scientifiques et techniques relatives à la présence, au devenir et aux effets de ces médicaments sur l’environnement et la santé humaine ;
Mettre en place des mesures de gestion des risques environnementaux et
sanitaires par des actions de contrôle et de réduction des émissions de
médicaments dans l’environnement.
Cette démarche s’appuiera sur les trois étapes suivantes :
L’acquisition des connaissances tant de l’état des milieux que de l’exposition aux résidus de médicaments et leurs effets sur l’environnement et la santé des populations ;
Le développement de programmes de recherche visant à développer des outils métrologiques et analytiques, des paramètres de toxicité environnementale ou sanitaire, de modélisation prédictive de l’exposition ;
La formation et l’information du grand public comme des acteurs
professionnels.
Enfin, elle devra permettre de répondre à la question d’un risque environnemental ou sanitaire éventuel lié à la présence de résidus de médicaments dans les eaux, d’en préciser les impacts sur l’environnement et la santé humaine ainsi que les coûts associés notamment en terme de recherche et de réduction des émissions, comme de la limitation des
expositions.