Grande conférence de santé : 22 mesures
12 février 2016
Les 22 mesures de la feuille de route de la Grande Conférence de Santé du 11.02.05. Deux sont très attendues, deux autres sont à surveiller de près.
Pour préparer l’avenir, et former des professionnels infirmiers à répondre aux besoins de santé de la population (vieillissement, maladies chroniques), il est important de
– Concourir à l’émergence d’un corps d’enseignants chercheurs pour les formations paramédicales (mesure 15) : pour le SNPI, il faut que ces enseignants chercheurs soient des infirmiers avec une formation universitaire, et non des universitaires non-infirmiers
– Développer les pratiques avancées (mesure 20) : pour le SNPI, il faut définir le cadre statutaire de ce nouveau métier (référentiels d’activités, de compétences et de formation, débouchant sur un master et une grille salariale spécifique, comme pour les infirmiers anesthésistes)
Deux autres mesures sont à surveiller de près, tant le diable est dans les détails :
– Mesure 9 : Développer et mieux organiser les interactions entre les étudiants des différentes formations de santé. Pour le SNPI, qu’en 3ème année de formation, il y ait des cours sur des sujets communs (éthique, travail en équipe, réflexions sur le travail pluridisciplinaire…) améliorerait surement les relations par la suite, pour le plus grand bénéfice des soignés. Par contre, 68 % de des professionnels infirmiers sont hostiles à une première année commune aux 14 formations paramédicales.
– Mesure 13 : Confier – à moyen terme – aux universités l’encadrement pédagogique des formations paramédicales. Le SNPI est pour l’universitarisation de la formation, dans le cadre d’une filière LMD en Sciences Infirmières, comme dans 47 pays du monde, où des universitaires titulaires d’un diplôme d’infirmier, puis d’un doctorat en sciences managent la formation. Mais pas question de passer sous la coupe de bureaucrates universitaires ou de médecins qui décident souverainement de ce qui leur semble bien pour leur petit personnel, précise Thierry Amouroux, le Secrétaire Général du syndicat infirmier de la CFE-CGC.
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Innover pour mieux former les professionnels de santé
Mieux accompagner l’accès aux études de santé
– Mesure 1 : Introduire une modulation régionale du numerus clausus national
– Mesure 2 : Augmenter et diversifier les offres de formation accessibles au terme de la PACES
– Mesure 3 : Poursuivre et renforcer les expérimentations de la première année commune aux études de santé
– Mesure 4 : Favoriser les passerelles entre les études paramédicales et médicales
– Mesure 5 : Renforcer les prestations sociales des étudiants des formations paramédicales
– Mesure 6 : Etudier les conditions de déploiement d’une offre publique de formation pour toutes les professions de santé
Mieux préparer les étudiants à l’exercice professionnel
– Mesure 7 : Mieux organiser les études autour de la préparation du projet professionnel
– Mesure 8 : Finaliser la réforme du troisième cycle des études médicales
– Mesure 9 : Développer et mieux organiser les interactions entre les étudiants des différentes formations de santé
– Mesure 10 : Généraliser les outils numériques dans les formations en santé
– Mesure 11 : Développer l’accès des étudiants en santé aux formations à la recherche
Mieux encadrer les étudiants tout au long de leur formation
– Mesure 12 : Renforcer durablement la filière universitaire de médecine générale
– Mesure 13 : Confier – à moyen terme – aux universités l’encadrement pédagogique des formations paramédicales
– Mesure 14 : Etendre la logique d’évaluation de l’enseignement supérieur aux écoles et instituts de formation paramédicaux
– Mesure 15 : Concourir à l’émergence d’un corps d’enseignants chercheurs pour les formations paramédicales
Innover pour un meilleur exercice professionnel tout au long de la carrière
Améliorer les conditions d’exercice
– Mesure 16 : Prévenir les risques psycho-sociaux
– Mesure 17 : Conforter l’attractivité de l’exercice en secteur 1 et soutenir l’activité à tarif opposable
– Mesure 18 : Assurer une vision plus intégrée entre formation, conditions d’exercice et aides à l’installation des jeunes professionnels dans les régions
– Mesure 19 : Mieux intégrer les professionnels et les usagers dans la construction d’une offre territoriale
Favoriser les perspectives d’évolution de carrière
– Mesure 20 : Développer les pratiques avancées
– Mesure 21 : Mettre en place la recertification des professionnels de santé
– Mesure 22 : Décloisonner les modes d’exercice entre la ville et l’hôpital et diversifier les parcours professionnels
Innover pour mieux former les professionnels de santé
Les étudiants de toutes les filières de santé veulent pouvoir construire progressivement leur orientation. Ils n’entendent pas être assignés à vie dans tel ou tel statut, territoire ou spécialité. Cette aspiration n’est pas propre aux étudiants des filières santé ; elle est partagée par l’ensemble d’une génération. Elle est légitime. A partir de là, personne ne peut souhaiter maintenir le cadre ancien, stable, immuable car aller contre les aspirations légitimes de la société serait aussi vain que contraire aux principes-mêmes d’un service public moderne.
Il nous faut bâtir un cadre de régulation des professions de santé adapté aux enjeux contemporains et conforme aux valeurs qui sous-tendent le système de santé français.
Il faudra accompagner le changement, procéder par étapes. Mais il convient d’emblée de fixer quelques objectifs clairs :
– Progressivité : les études médicales sont longues mais cette durée n’est pas suffisamment mise à profit pour construire un projet professionnel ;
– Mobilité : l’organisation des études doit permettre, voire encourager la mobilité, source d’enrichissement et de développement des compétences des étudiants ;
– Transversalité : on ne peut pas revendiquer la coopération entre professionnels de santé en les traitant en communautés séparées dès la formation, avec des droits différenciés ;
– Territorialité : il est temps de rapprocher la gestion des emplois et des compétences de l’analyse des besoins, sans altérer pour autant la mobilité des étudiants et des professionnels sur le territoire national.
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A SURVEILLER Mesure 9 : Développer et mieux organiser les interactions entre les étudiants des différentes formations de santé
Enjeux
La division du travail au sein des professions de santé progresse inexorablement. Cette évolution n’est pas propre au champ de la santé ; elle est portée par les évolutions technologiques, la spécialisation, voire l’hyperspécialisation des formations, les pratiques de tarification. En même temps, la division du travail appelle mécaniquement la montée des interdépendances et leur reconnaissance. Le parcours de soins des patients atteints de maladies chroniques est caractéristique de ces évolutions :
– d’un côté, les interventions sont de plus en plus diversifiées auprès des personnes tout au long de la chaîne de soin (même si certaines évolutions technologiques permettent a contrario d’élargir le périmètre d’intervention de certains professionnels) ;
– d’un autre côté, cette diversité appelle un besoin d’intégration, de coopération, de coordination pour ne pas laisser aux patients la charge de gérer la dispersion.
Déployer un socle commun de formation contribuera à améliorer l’interconnaissance des professionnels indispensable au développement des coopérations.
Objectifs
Développer la culture de l’inter-professionnalité et du travail en équipe.
Mesures
– Mettre en place des temps de formation théorique et pratique (étude de cas, stages interprofessionnels ou croisés) regroupant les étudiants des différentes filières de santé.
– Créer un groupe de travail collaboratif (doyens, présidents d’université, enseignants, organismes de formation paramédicale, représentants professionnels, organisations étudiantes...) afin d’identifier les enseignements qui peuvent être mutualisés et les modalités pratiques de cette mutualisation.
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A SURVEILLER : Mesure 13 : Confier – à moyen terme – aux universités l’encadrement pédagogique des formations paramédicales
Enjeux
Une des particularités des formations paramédicales françaises, très ancrée dans l’histoire pour la plupart d’entre elles, est leur éloignement de l’Université. Cela explique l’aspiration très massivement entendue dans les débats de la Grande conférence de la santé à « l’universitarisation ». Le processus est de fait engagé depuis un certain nombre d’années. Il recouvre un ensemble d’éléments, en termes de référentiel de compétences, de formation, de diplômation, de gouvernance des formations (et definancement), de droits des étudiants, de statut des personnels formés, de statut des enseignants, de débouchés…, qui n’ont pas progressé au même rythme globalement et selon les filières.
Le rapprochement entre l’Université et ces formations importantes en termes d’effectifs et d’utilité sociale, privilégiées en termes de débouchés et diversifiées en termes de profil social des étudiants, apparaît a priori légitime. Pour autant que l’on s’entende sur le sens, les conditions et les limites de cette évolution.
Il s’inscrit dans le processus d’harmonisation européen et correspond aux aspirations à la mobilité des professionnels. Il ouvre la possibilité de poursuivre des études en master et en doctorat pour une partie des effectifs en formation et des professionnels, en désenclavant les formations paramédicales.
Il est par ailleurs rationnel de rapprocher les systèmes de formation de professions que l’on prétend voir coopérer, de les placer sous un même régime de gouvernance académique et de rehausser la formation de professions destinées à se déployer sur des paliers intermédiaires entre les positions auxiliaires traditionnelles et les fonctions médicales.
S’agissant du rapprochement entre le monde de la formation paramédicale et l’Université, il faut donc fixer le cap (l’intégration à l’Université) et travailler les jalons et les transitions. Mais il doit être clair que l’on ne peut rester au milieu du gué.
Objectifs
Faire des formations paramédicales des formations universitaires à part entière.
Mesures
Confier à terme l’encadrement pédagogique des formations paramédicales aux universités. Ce processus sera conduit en plusieurs étapes :
– 1) inciter les universités à poursuivre le travail de conventionnement avec les établissements de formation paramédicale concernant les aspects pédagogiques (élaboration des maquettes, critères de qualité des enseignements…) et la diplômation (critères d’exigence, référentiel de compétences ...) sur la base d’une politique de site ;
– 2) permettre aux universités à terme de délivrer un diplôme universitaire aux étudiants en formation paramédicale correspondant aux critères définis par elles.
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TRES ATTENDUE Mesure 15 : Concourir à l’émergence d’un corps d’enseignants chercheurs pour les formations paramédicales
Enjeux
Le rapprochement entre les formations paramédicales et l’Université nécessite de constituer un vivier d’enseignants-chercheurs paramédicaux, de façon à inscrire ces formations dans les standards justifiant la délivrance du grade ou du diplôme de master, à développer des capacités de recherche parmi les personnels paramédicaux et à constituer une filière complète en matière de formation et de recherche.
Objectifs
Faire émerger un corps d’enseignants-chercheurs paramédicaux.
Mesures
– Favoriser l’accès des étudiants paramédicaux aux écoles doctorales existantes dans le domaine des sciences de santé.
– Favoriser l’émergence de nouvelles écoles doctorales à la demande des universités.
– Structurer des parcours d’accès aux études doctorales, repérer et accompagner les étudiants ayant une appétence et un potentiel académique…
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TRES ATTENDUE Mesure 20 : Développer les pratiques avancées
Enjeux
– Il existe aujourd’hui différentes possibilités d’évoluer dans son métier pour un professionnel para médical, en particulier l’expertise dans un domaine (par exemple infirmier hygiéniste), la spécialisation (Infirmier anesthésistes ou de bloc opératoire).
– L’exercice en pratique avancée sera une autre voie pour développer son parcours professionnel.
Cet exercice va au-delà du champ de compétence défini réglementairement pour sa profession et nécessite de mettre en oeuvre certaines décisions relevant habituellement de la compétence médicale (prescription, suivi de patients, coordination de parcours).
La loi de modernisation de notre système de santé a défini le cadre général de cet exercice et du développement des formations en pratique avancée.
– Il convient sur ces bases de favoriser le déploiement d’activités en pratique avancée adaptées aux besoins prioritaires de prise en charge des patients atteints de maladie chronique et d’accompagner les parcours des professionnels intéressés.
Objectifs
Elaborer un cadre global pour former des professionnels paramédicaux en pratique avancée et définir les conditions d’exercice de ces professionnels
Mesures
Un groupe de travail associant les ministères de la santé et de l’enseignement supérieur et de la recherche définira dans un délai de 6 mois
– 1) les champs pertinents de développement des pratiques avancées,
– 2) les modalités d’exercice et de valorisation des pratiques avancées en ville et à l’hôpital,
– 3) les conditions de mise en oeuvre des formations concernées au sein des universités,
– 4) la méthode de calibrage territorial pluriannuel des effectifs concernés, compte tenu des besoins de santé.
L’intégralité de la feuille de route avec ses 22 mesures est en téléchargement ci-dessous :