Infirmières de Pratique Avancée (Master) payées 3300 euros brut/mois en GB

21 octobre 2017

Face au déserts médi­caux, d’un coté la France a inventé les "pro­to­co­les de coo­pé­ra­tions" (art 51 de la loi HPST) entre deux pro­fes­sion­nels de santé (le méde­cin demande à l’infir­mière de réa­li­ser des actes qu’il ne veut plus faire, mais qui ne sont pas dans le "décret d’actes infir­miers", le tout gra­cieu­se­ment et sans for­ma­tion vali­dante). Le pre­mier minis­tre a pré­senté le 13.10.17 son plan pour lutter contre les déserts médi­caux : prin­ci­pa­le­ment déve­lop­per les "pro­to­co­les de coo­pé­ra­tions art 51", et deux lignes sur la "pra­ti­que avan­cée".

De l’autre, au Royaume-Uni, comme il manque des mil­liers de méde­cins géné­ra­lis­tes, depuis près de 30 ans, l’Infirmière de Pratique Avancée (Master) cons­ti­tue la pro­fes­sion inter­mé­diaire entre l’infir­mière (Licence) et le méde­cin (bac+9). Formée à l’uni­ver­sité, et ayant le même niveau d’études que la sage-femme, l’"Infirmière de Pratique Avancée" réa­lise des diag­nos­tics, pres­crit des médi­ca­ments. Selon leur spé­cia­lité, ces infir­miè­res Master peu­vent pra­ti­quer une biop­sie, une radio­gra­phie ou une opé­ra­tion chi­rur­gi­cale bégnine.

Voir la vidéo de France 2 sur l’IPA en Grande Bretagne : http://www.fran­cet­vinfo.fr/monde/royaume-uni/grande-bre­ta­gne-quand-les-infir­mie­res-rem­pla­cent-les-mede­cins_2427667.html

Dans 25 pays, 330.000 infir­miè­res en pra­ti­que avan­cée peu­vent dis­po­ser de nou­vel­les com­pé­ten­ces après deux années d’études sup­plé­men­tai­res vali­dées par un Master. Toutes les études scien­ti­fi­ques ont prou­vées l’inté­rêt de ce métier inter­mé­diaire entre l’infir­mière à Bac +3 et le méde­cin à bac +9 ou +12. L’exem­ple a été donné par les USA dans les années 1960, et il y a aujourd’hui 158.348 « infir­miè­res pra­ti­cien­nes » et 59.242 « infir­miè­res cli­ni­cien­nes spé­cia­li­sées », toutes titu­lai­res d’un Master. En Europe, de l’Irlande à la Finlande, ces infir­miè­res diplô­mées d’un Master peu­vent pres­crire des médi­ca­ments et assu­rer le suivi des patients chro­ni­ques.

En France, le cadre légal de l’infir­­mière de pra­­ti­­que avan­­cée IPA est l’arti­­cle 119 de la loi n° 2016-41 du 26 jan­­vier 2016 de moder­­ni­­sa­­tion de notre sys­­tème de santé. Hélas, aucun texte d’appli­ca­tion n’est paru, et les tra­vaux n’ont même pas com­mencé (réfé­ren­tiel d’acti­vité, de com­pé­ten­ces, de for­ma­tion, cadre sta­tu­taire et grille sala­riale).

Environ 200 infir­miè­res de pra­ti­que avan­cée ont déjà été for­mées à l’Université d’Aix Marseille, le Master scien­ces cli­ni­ques infir­miè­res (can­cé­ro­lo­gie, géron­to­lo­gie, par­cours com­plexes de soins) et à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, le Master Sciences cli­ni­ques en soins infir­miers (santé men­tale, mala­dies chro­ni­ques, dou­leur et soins pal­lia­tifs). Il faut étendre ces Masters, en com­bi­nant la valo­ri­sa­tion de la VAE et la for­ma­tion uni­ver­si­taire pro­fes­sion­na­li­sante.

Ce nou­­veau métier ne concer­­nera que quel­­ques mil­­liers de per­­son­­nes, sur l’ordre de gran­­deur des effec­­tifs actuels d’infir­­miè­­res spé­­cia­­li­­sées (IADE, IBODE, pué­­ri­­cultri­­ces). A l’étranger seu­le­ment 5% des infir­miè­res font de tels mas­ters, mais cet échelon inter­mé­diaire entre l’infir­mière à Bac +3 et le méde­cin à Bac +9 est indis­pen­sa­ble, en par­ti­cu­lier pour la prise en soins des patients chro­ni­ques et des per­son­nes âgées.
http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/-Observatoire-Emplois-Metiers-.html

Le Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI CFE-CGC consi­dère que pour élargir les com­pé­ten­ces infir­miè­res :
 soit c’est juste rajou­ter un acte tech­ni­que,
et il faut alors le rajou­ter au décret d’acte des 600.000 infir­miè­res, intro­duire ce nouvel appren­tis­sage offi­ciel­le­ment dans la for­ma­tion ini­tiale et le vali­der par le diplôme d’État
 soit c’est une nou­velle com­pé­tence, avec une pres­crip­tion médi­cale limi­tée, sur le modèle de la sage-femme, et il faut deux années uni­ver­si­tai­res sup­plé­men­tai­res pour vali­der ces com­pé­ten­ces, dans le cadre du métier d’infir­mière de pra­ti­que avan­cée, validé par un Master, dans un cadre sta­tu­taire clair, sur le modèle de l’IADE.

Par contre, le Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI CFE-CGC est hos­tile à l’arti­cle 51 de la loi Bachelot du 21 juillet 2009, por­tant réforme de l’hôpi­tal et rela­tive aux patients, à la santé et aux ter­ri­toi­res (loi HPST) qui auto­rise les « coo­pé­ra­tions entre pro­fes­sion­nels de santé », c’est-à-dire un pro­to­cole entre pro­fes­sion­nels, accepté par l’Agence Régionale de Santé ARS, pour effec­tuer la mise en place, à titre déro­ga­toire et à l’ini­tia­tive des pro­fes­sion­nels sur le ter­rain, de trans­ferts d’actes ou d’acti­vi­tés de soins qui ne figu­rent pas dans notre décret d’actes (dit décret de com­pé­ten­ces).

Le refus d’un simple trans­fert d’actes pour gagner du temps médi­cal

En décem­bre 2012, un son­dage auprès de 13.234 infir­miè­res a montré que 87 % de ces pro­fes­sion­nels infir­miers sont hos­ti­les aux moda­li­tés de ces coo­pé­ra­tions art 51. http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/87-des-infir­mie­res-hos­ti­les-aux.html

Cette mesure déro­ga­toire est mas­si­ve­ment reje­tée car :
 1) la for­ma­tion n’est pas vali­dante (sou­vent sur le tas, par le méde­cin qui sou­haite délé­guer cette tâche), et dif­fé­rente d’un endroit à l’autre. Les com­pé­ten­ces sont donc dis­cu­ta­bles, en par­ti­cu­lier la capa­cité de réagir cor­rec­te­ment en cas de pro­blème ou de com­pli­ca­tion.
 2) ces nou­veaux actes sont pra­ti­qués sans reconnais­sance sta­tu­taire. C’est d’ailleurs une fonc­tion « klee­nex », dans la mesure où si le méde­cin s’en va, le pro­to­cole tombe, et l’infir­mière retourne à la case départ.
 3) La déro­ga­tion consiste à auto­ri­ser des pro­fes­sion­nels de santé à effec­tuer des acti­vi­tés ou des actes de soins qui ne sont pas auto­ri­sés par les textes régis­sant leur exer­cice pro­fes­sion­nel : si c’est utile, pour­quoi ne pas le rajou­ter au décret d’acte et à la for­ma­tion ini­tiale ?

« Ces pro­to­co­les de coo­pé­ra­tion per­met­tent juste de régu­la­ri­ser des situa­tions exis­tan­tes, de léga­li­ser de petits arran­ge­ments locaux » selon Thierry Amouroux, le Secrétaire Général du SNPI CFE-CGC. Mais ces pro­to­co­les ne com­por­tent aucune garan­tie pour les usa­gers sur les qua­li­fi­ca­tions et les com­pé­ten­ces des pro­fes­sion­nels impli­qués, ainsi que sur la régu­la­rité et les moda­li­tés de leur exer­cice. Le déve­lop­pe­ment sou­hai­ta­ble des par­ta­ges de com­pé­ten­ces entre pro­fes­sion­nels de santé, ne doit pas être le pré­texte à faire n’importe quoi, juste pour libé­rer du temps médi­cal.

Avec les "coo­pé­ra­tions", ce sont des com­pé­ten­ces per­son­nel­les qui seront attri­buées à des infir­miè­res par­ti­cu­liè­res pour faire des actes à la place des méde­cins. Il y aura des infir­miè­res auto­ri­sées à faire ... et des infir­miè­res non auto­ri­sées dans la même unité d’hos­pi­ta­li­sa­tion ! Qui s’y retrou­vera ? Le patient sera informé du pro­to­cole, mais ensuite il ne saura plus qui peut faire quoi dans une même unité de soins.

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