Les différentes formes de grèves

14 août 2012

Cet article traite avant tout du secteur privé. Pour plus de détails sur le droit de grève dans la fonction publique hospitalière : http://www.syndicat-infirmier.com/Droit-de-greve-dans-la-fonction.html

Les grèves per­lées

Les grèves per­lées consis­tent à exé­cu­ter
le tra­vail au ralenti ou dans des condi­tions
volon­tai­re­ment défec­tueu­ses, sans inter­rup­tion
véri­ta­ble de l’acti­vité. C’est une
inexé­cu­tion des obli­ga­tions décou­lant du
contrat de tra­vail enga­geant la res­pon­sa­bi­lité
contrac­tuelle du sala­rié.
Elles sont inter­di­tes.

Les grèves limi­tées à une obli­ga­tion par­ti­cu­lière du contrat

Ce sont des grèves où les sala­riés exé­cu­tent
leur contrat de manière clas­si­que,
à une excep­tion près.
Exemple : les sala­riés ne vien­nent plus tra­vailler
le samedi matin, alors que la reven­di­ca­tion
porte jus­te­ment sur le tra­vail le
samedi matin.
Elles sont inter­di­tes.

Les grèves « d’aver­tis­se­ment »

Les grèves « d’aver­tis­se­ment » sont des
grèves de courte durée. Elles sont auto­ri­sées
si elles pré­sen­tent un carac­tère col­lec­tif
et qu’elles ont un but pro­fes­sion­nel.
Les débraya­ges et les grèves de très
cour­tes durées sont donc légaux.
 SAUF
Si elles pré­sen­tent un carac­tère abusif
ou si elles entrai­nent une désor­ga­ni­sa­tion
de l’entre­prise, et non pas seu­le­ment de
l’acti­vité. Ces grèves sont aussi inter­di­tes
si elles pro­cè­dent de la volonté de nuire
à l’entre­prise.
 Exemple : Cassation sociale 26 février 1975
« 101 arrêts de tra­vail jusque 12 dans une
même jour­née a été qua­li­fié d’abus ».

Les grèves du zèle

Il s’agit d’appli­quer très
stric­te­ment les consi­gnes
don­nées pour l’exé­cu­tion
du tra­vail. Cela abou­tit à
ralen­tir, et par­fois, para­ly­ser
un ou plu­sieurs ser­vi­ces
car le tra­vail est exé­cuté
len­te­ment. Les condi­tions
de fait sont déter­mi­nan­tes
pour véri­fier la licéité de
cette grève.

Les grèves « bou­chons »

C’est un arrêt de tra­vail des sala­riés d’un
ser­vice se situant à un point névral­gi­que
de l’entre­prise et qui a pour consé­quence
d’en blo­quer tout ou partie du
fonc­tion­ne­ment.
En prin­cipe, ces grèves sont lici­tes,
SAUF si ces grèves désor­ga­ni­sent l’entre­prise,
lui infli­geant un pré­ju­dice exces­sif.

Les grèves tour­nan­tes

Les grèves tour­nan­tes
consis­tent en arrêts de
tra­vail affec­tant suc­ces­si­ve­ment
dans l’entre­prise
 Soit des caté­go­ries
pro­fes­sion­nel­les,
(grèves tour­nan­tes ver­ti­ca­les)
 Soit des sec­teurs
d’acti­vité. (grèves tour­nan­tes
hori­zon­ta­les)

 En prin­cipe, les grèves
tour­nan­tes sont lici­tes
SAUF si ces grèves
abou­tis­sent à la désor­ga­ni­sa­tion
de l’entre­prise.
 ATTENTION : les grèves tour­nan­tes sont
inter­di­tes dans le sec­teur public.

Grève sur­prise

Elles sont pos­si­bles, SAUF s’il y a abus de
droit. Il faut qu’au moins deux sala­riés soient en
grève, SAUF s’il existe un mot d’ordre au niveau
natio­nal.
Une frac­tion mino­ri­taire du per­son­nel peut
tou­jours conti­nuer la grève. Toutefois, il
faut regar­der si les reven­di­ca­tions ont été
satis­fai­tes. Les reven­di­ca­tions doi­vent être
pro­fes­sion­nel­les et non poli­ti­ques.

Occupation des locaux et Piquet de grève

L’occu­pa­tion des locaux n’est pas en
elle-même illi­cite. Le regrou­pe­ment des
sala­riés gré­vis­tes devant l’entrée de l’entre­prise
est permis. Le but est d’inci­ter les
sala­riés non gré­vis­tes à cesser le tra­vail
et à gêner le fonc­tion­ne­ment de l’entre­prise. Il ne faut pas abou­tir à la désor­ga­ni­sa­tion
totale de l’entre­prise ou à l’entrave de la
liberté du tra­vail.

Toutefois, s’il existe un risque pour la sécu­rité
des per­son­nes et des biens, l’employeur
peut deman­der en référé l’expul­sion des
gré­vis­tes.
Par exem­ple, il est pos­si­ble de blo­quer
une entrée si, et seu­le­ment si, les sala­riés
peu­vent ren­trer par d’autres portes.
Si l’occu­pa­tion est sym­bo­li­que, béni­gne
et très momen­ta­née, dans ce cas, la
grève ne sera pas abu­sive.

Moment de l’arrêt du tra­vail

La grève n’est pos­si­ble que pen­dant le
temps de tra­vail effec­tif.
L’arrêt de tra­vail peut inter­ve­nir à tout moment,
SAUF dans le sec­teur public.
Dans tous les cas, la CFE-CGC pré­co­nise
un délai de préa­vis de 5 jours.
Il faut pré­sen­ter des reven­di­ca­tions pro­fes­sion­nel­les
à l’employeur préa­la­ble­ment
au déclen­che­ment de la grève.

Limitation du droit de grève

Le droit de grève dans la fonc­tion publi­que
et dans les entre­pri­ses de ser­vi­ces
publi­ques néces­site un préa­vis de 5 jours
francs durant lequel les par­ties sont tenues
de négo­cier.
Les grèves tour­nan­tes sont inter­di­tes.

C’est aux Organisations Syndicales les plus
repré­sen­ta­ti­ves de dépo­ser le préa­vis,
sous peine d’enga­ger leur res­pon­sa­bi­lité.
Les sala­riés par­ti­ci­pant à une grève dont
le préa­vis est irré­gu­lier ne sont pas fau­tifs
si le délai de pré­ve­nance a été res­pecté.

Le juge peut déci­der que la grève est un
mou­ve­ment illi­cite ou qu’il y a abus du
droit de grève. Si la grève est qua­li­fiée d’illi­cite,
les sala­riés y ayant par­ti­cipé com­met­tent
une faute pro­fes­sion­nelle.
La grève est abu­sive si elle entraîne la désor­ga­ni­sa­tion
de l’entre­prise ou qu’il existe
un risque de désor­ga­ni­sa­tion.

Relation employeur et sala­riés non gré­vis­tes

L’employeur doit conti­nuer à four­nir du
tra­vail aux sala­riés non gré­vis­tes et à payer
leurs salai­res.
Dans l’hypo­thèse d’un piquet de grève empê­chant les sala­riés non gré­vis­tes de tra­vailler, l’employeur doit
intro­duire une action en jus­tice et deman­der la contri­bu­tion de la
force publi­que pour l’expul­sion des gré­vis­tes.

Relation employeur et sala­riés gré­vis­tes

La grève sus­pend le contrat de tra­vail. L’employeur n’a pas à
verser leurs salai­res aux gré­vis­tes. Ainsi, l’employeur n’a pas à verser
les salai­res affé­rents aux jours habi­tuels de repos ou aux jours fériés
chômés inclus dans cette période.
Par ailleurs, les gré­vis­tes ne sont pas cou­verts par la légis­la­tion des
acci­dents du tra­vail et des acci­dents de tra­jets.
Les sala­riés gré­vis­tes ne peu­vent pas être sanc­tion­nés SAUF en cas
de faute lourde.

L’employeur a l’inter­dic­tion de recou­rir aux CDD ou CTT mais il peut
orga­ni­ser l’entre­prise pour la conti­nuité du ser­vice public.
Le Conseil d’Etat a jugé le 12 décem­bre 2003 que le préfet peut
requé­rir des gré­vis­tes d’un établissement, même privé, sous réserve
que cette mesure soit impo­sée par l’urgence et reste pro­por­tion­née
aux néces­si­tés de l’ordre public.

Les repré­sen­tants du per­son­nel : DP/CE/DS

La grève ne sus­pend pas les man­dats repré­sen­ta­tifs. Pendant la
grève, les élus et les délé­gués syn­di­caux peu­vent même dépas­ser
leurs cré­dits d’heures.
Ils ne peu­vent pas être pré­su­més res­pon­sa­bles du com­por­te­ment
des autres sala­riés. Il faut carac­té­ri­ser leur faute per­son­nelle.

Réglementation de la grève dans les ser­vi­ces publics

La régle­men­ta­tion du droit de grève dans le sec­teur public est appli­ca­ble
aux per­son­nels des entre­pri­ses, orga­nis­mes et établissements
char­gés de la ges­tion d’un ser­vice public. Le mode de ges­tion importe
peu, public ou privé, dès lors que l’orga­nisme assure une mis­sion
de ser­vice public. La néces­sité est d’assu­rer la conti­nuité du
ser­vice public.

L’arti­cle L. 2512-2 du Code du tra­vail dis­pose qu’un préa­vis de grève
doit par­ve­nir à l’auto­rité hié­rar­chi­que ou la direc­tion de l’entre­prise,
de l’établissement ou de l’orga­nisme 5 jours francs avant le déclen­che­ment
de la grève.

Exemple : Cassation sociale 11 jan­vier 2007
 « La grève déclen­chée moins de 5 jours francs avant la récep­tion
du préa­vis est illé­gale. Les sala­riés qui s’y asso­cient, même après
l’expi­ra­tion de ce délai, en dépit d’une noti­fi­ca­tion de l’employeur
atti­rant leur atten­tion sur l’obli­ga­tion de préa­vis, com­met­tent une
faute dis­ci­pli­naire pou­vant être sanc­tion­née par l’employeur. »
Si l’employeur n’a pas noti­fié, il n’y a pas de faute.
 L’arti­cle L. 2512-2 du Code du tra­vail dis­pose que le préa­vis doit
pré­ci­ser les motifs du recours à la grève et fixer le lieu, la date et
l’heure de la grève envi­sa­gée, ainsi que sa durée, limi­tée ou non.
 Toutefois, les sala­riés ne sont pas obli­gés de s’arrê­ter pen­dant toute
la durée du préa­vis.

La com­bi­nai­son des arti­cles L. 2512-2 et L. 2512-3 du Code du tra­vail
inter­dit les grèves tour­nan­tes dans le sec­teur public. Il faut que le
préa­vis pré­cise une heure com­mune à tous les mem­bres du per­son­nel
dans les ser­vi­ces publics, peu impor­tant que cer­tains sala­riés ne
tra­vaillent pas à cette heure, dès lors qu’ils peu­vent se join­dre au
mou­ve­ment en cours.

Cette règle a été atté­nuée dans la mesure où chaque orga­ni­sa­tion
syn­di­cale peut dépo­ser un préa­vis de grève dif­fé­rent.

Pour plus de détails sur le droit de grève dans la fonc­tion publi­que hos­pi­ta­lière : http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Droit-de-greve-dans-la-fonc­tion.html

Fanny Seviran
Conseillère tech­ni­que CFE-CGC

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