Refus de soins discriminatoires sur les sites de prise de rendez-vous médicaux en ligne

18 décembre 2018

Le Défenseur des droits a été alerté par plu­sieurs asso­cia­tions concer­nant les pro­fils indi­vi­duels de cer­tains méde­cins sur les sites de prise de rendez-vous médi­caux fai­sant appa­raî­tre des condi­tions par­ti­cu­liè­res pour les béné­fi­ciai­res de la cou­ver­ture mala­die uni­ver­selle com­plé­men­taire (CMU-C), de l’aide à l’acqui­si­tion d’une com­plé­men­taire santé (ACS) et de l’aide médi­cale de l’État (AME).

La prise en compte du béné­fice d’un de ces sta­tuts peut cons­ti­tuer un refus de soins illi­cite direct ou indi­rect et peut carac­té­ri­ser une dis­cri­mi­na­tion au sens du code de la santé publi­que en raison du statut de la sécu­rité sociale ainsi qu’au sens de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 por­tant diver­ses dis­po­si­tions d’adap­ta­tion au droit com­mu­nau­taire dans le domaine de la lutte contre les dis­cri­mi­na­tions et des arti­cles 225-1 et 225-2 du code pénal en raison de l’ori­gine ou de la par­ti­cu­lière vul­né­ra­bi­lité résul­tant de la situa­tion économique.

Il peut s’agir de refus directs : le pro­fes­sion­nel refuse de rece­voir le patient en raison de sa cou­ver­ture mala­die ou de refus indi­rects, comme l’orien­ta­tion sys­té­ma­ti­que vers l’hôpi­tal, le refus de dis­pense d’avance des frais ou de consul­ta­tion si les per­son­nes n’ont pas de carte Vitale.

Ces pra­ti­ques dis­cri­mi­na­toi­res, vécues quo­ti­dien­ne­ment par les per­son­nes, ont été affi­chées sur cer­tai­nes pla­te­for­mes de prise de rendez-vous en ligne via les pages de cer­tains pro­fes­sion­nels de santé. Sur ces pages, ces pro­fes­sion­nels men­tion­nent expli­ci­te­ment refu­ser cer­tains patients par les men­tions « pas de CMU » ou « pas d’AME ».

Après un cons­tat d’écran des men­tions liti­gieu­ses et une enquête menée auprès de plu­sieurs méde­cins et deux exploi­tants de pla­te­for­mes de prise de rendez-vous, le Défenseur des droits cons­tate l’enca­dre­ment insuf­fi­sant du fonc­tion­ne­ment des pla­te­for­mes sus­vi­sées. Il rap­pelle le cadre légal des refus de soins et sou­li­gne le carac­tère dis­cri­mi­na­toire et / ou stig­ma­ti­sant de toutes les men­tions visant expres­sé­ment les sta­tuts des béné­fi­ciai­res de la CMU-C, de l’ACS et de l’AME. Il pré­cise ainsi que ces men­tions doi­vent être neu­tres même si elles sont affi­chées afin d’infor­mer les patients et de garan­tir le bon dérou­le­ment de la consul­ta­tion.

Décision cadre 2018-269 du 22 novem­bre 2018 rela­tive aux dis­cri­mi­na­tions à l’égard des béné­fi­ciai­res de la CMU-C, de l’ACS et de l’AME sur les pla­te­for­mes de prise de rendez-vous en ligne et com­por­tant des recom­man­da­tions géné­ra­les  : https://juri­di­que.defen­seur­des­droits.fr/index.php?lvl=notice_dis­play&id=26822

Le Défenseur des droits recom­mande aux pla­te­for­mes notam­ment de mettre en place un fonc­tion­ne­ment dans le res­pect du prin­cipe de non-dis­cri­mi­na­tion et d’empê­cher les refus de soins dis­cri­mi­na­toi­res via les pro­fils des pro­fes­sion­nels de santé.

Il recom­mande au minis­tre de la santé et au secré­taire d’État du numé­ri­que de fixer un cadre légal en vue d’un bon fonc­tion­ne­ment de la prise de rendez-vous en ligne dans le res­pect du prin­cipe de la non-dis­cri­mi­na­tion.

Il recom­mande une réflexion afin de sim­pli­fier les sta­tuts de la sécu­rité sociale sus­vi­sés.

Il demande à être tenu informé des suites réser­vées aux recom­man­da­tions dans un délai de six mois à comp­ter de la noti­fi­ca­tion de la pré­sente déci­sion.

Indépendamment de cette enquête, le Défenseur des droits a créé deux outils d’infor­ma­tion pour pré­ve­nir les refus de soins en col­la­bo­ra­tion avec dif­fé­rents acteurs dont trois ordres de pro­fes­sion­nels de la santé (CNOM, ONCD et ordres des sages-femmes).
- Le pre­mier outil est un dépliant qui s’adresse aux béné­fi­ciai­res d’une pres­ta­tion santé sus­cep­ti­bles d’être vic­ti­mes de refus de soins afin de les aider à faire valoir leurs droits. https://www.defen­seur­des­droits.fr/fr/depliants/depliant-agir-contre-les-refus-de-soins
- Le second outil est une fiche à des­ti­na­tion des pro­fes­sion­nels de santé leur rap­pe­lant leurs obli­ga­tions léga­les tout en fai­sant des recom­man­da­tions pour l’amé­lio­ra­tion de leurs pra­ti­ques. https://www.defen­seur­des­droits.fr/fr/fiches-the­ma­ti­ques/fiche-pra­ti­que-les-refus-de-soins

Dans le cadre de son acti­vité, le Défenseur des droits traite de nom­breu­ses sai­si­nes rela­ti­ves à des refus de soins dis­cri­mi­na­toi­res. Ces situa­tions mon­trent que le droit à la santé n’est pas encore plei­ne­ment effec­tif pour les per­son­nes en situa­tion de pré­ca­rité.

Comment réagir en cas de refus de soins ?

Contactez :
- La Direction et/ou la com­mis­sion de conci­lia­tion de votre caisse locale d’Assurance mala­die (CPAM),
- Le Conseil dépar­te­men­tal de l’Ordre du pro­fes­sion­nel de santé concerné
ou la Direction géné­rale de la concur­rence, de la consom­ma­tion et de la répres­sion des frau­des (DGCCRF)
- Vous pouvez également saisir le Défenseur des droits : https://www.defen­seur­des­droits.fr/fr/saisir

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