Décret infirmier : quand le ministère efface des avancées votées par le Parlement

12 septembre 2025

En juin 2025, le Parlement a voté une loi ambi­tieuse sur la pro­fes­sion infir­mière. Elle devait reconnaî­tre les com­pé­ten­ces, moder­ni­ser l’exer­cice et amé­lio­rer l’accès aux soins.

Trois mois plus tard, le projet de décret pré­senté par le minis­tère en gomme plu­sieurs avan­cées.

🔎 Accès direct : la loi ouvrait la voie. Le décret reste muet. La consul­ta­tion infir­mière est décrite, mais rien n’indi­que qu’un patient puisse y accé­der sans pres­crip­tion. Pour des mil­lions de patients sans méde­cin trai­tant, il repré­sen­tait un espoir : celui d’accé­der rapi­de­ment à un pro­fes­sion­nel de santé com­pé­tent, sans passer par un par­cours admi­nis­tra­tif com­pli­qué. Les infir­miè­res ne deman­dent pas un pri­vi­lège, mais un outil pour répon­dre à la demande de soins. Ouvrir cet accès direct, c’est sou­la­ger le sys­tème et rap­pro­cher les patients du soin dont ils ont besoin.

🔎 Orientation : les par­le­men­tai­res avaient reconnu le rôle d’aiguillage des infir­miè­res. Le texte se limite à la « coor­di­na­tion », un mot admi­nis­tra­tif qui ne tra­duit pas leur fonc­tion de guide dans le par­cours de soins. Le sys­tème de santé fran­çais est devenu un véri­ta­ble laby­rin­the. Les patients s’y per­dent, enchaî­nent les rendez-vous, man­quent des exa­mens, renon­cent par­fois aux soins. Sur le ter­rain, ce sont les infir­miè­res qui gui­dent, ras­su­rent, coor­don­nent. L’orien­ta­tion doit être reconnue comme un acte pro­fes­sion­nel à part entière. C’est une réponse simple et effi­cace pour flui­di­fier les par­cours, réduire les délais et éviter les rup­tu­res de prise en charge.

🔎 Soins rela­tion­nels  : promis dans le décret après le rejet par le Sénat de l’amen­de­ment voté par l’Assemblée Nationale, ils sont men­tion­nés, mais sans défi­ni­tion ni contenu, donc invi­si­bi­li­sés. Le soin rela­tion­nel, c’est ce qui permet d’établir un climat de confiance, de faire accep­ter un trai­te­ment, de sou­te­nir une per­sonne en fin de vie. C’est la part invi­si­ble du soin, celle qui ne se mesure pas en actes cotés, mais qui déter­mine l’effi­ca­cité de toute la prise en charge.

🔎 Prescription : la loi don­nait un cadre déro­ga­toire large. Le décret res­treint le champ à ce qui relève du « domaine des soins infir­miers », for­mule floue et poten­tiel­le­ment res­tric­tive. Or, la loi visait pré­ci­sé­ment à donner un cadre déro­ga­toire pour pres­crire ce qui est néces­saire au patient, dans le res­pect de ses com­pé­ten­ces (plaies, dou­leurs), sans limi­ter arti­fi­ciel­le­ment le champ d’action. Réduire la pres­crip­tion infir­mière, c’est mul­ti­plier les allers-retours inu­ti­les pour obte­nir une signa­ture médi­cale. C’est ralen­tir la prise en charge, encom­brer les cabi­nets et retar­der les trai­te­ments.

🔎 Délégation d’actes : inno­va­tion régle­men­taire sans base légale. Jamais dis­cu­tée par les par­le­men­tai­res, elle trans­fère une partie du rôle propre aux aides-soi­gnants et AES, au risque de diluer la res­pon­sa­bi­lité infir­mière et la sécu­rité des patients. Les actes du rôle propre ne sont pas de sim­ples gestes tech­ni­ques : ils repo­sent sur une évaluation cli­ni­que en temps réel. Les trans­fé­rer, c’est courir le risque de passer à côté d’un signe d’alerte, de retar­der un diag­nos­tic, de com­pro­met­tre la conti­nuité du soin.

Ainsi, ce projet de décret ne se contente pas de pré­ci­ser la loi : il en cor­rige l’esprit, dans un sens res­tric­tif. Le risque est clair : une réforme vidée de sa sub­stance, et des patients qui n’en ver­ront pas les béné­fi­ces.

La concer­ta­tion est ouverte. Les infir­miè­res, leurs repré­sen­tants et les patients doi­vent rap­pe­ler que la loi a été votée pour chan­ger la donne – pas pour rester lettre morte.

Détails sur : https://syn­di­cat-infir­mier.com/Acces-direct-orien­ta­tion-soins-rela­tion­nels-les-grands-absents-du-nou­veau.html

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