Défense de l’hôpital public : la pétition du MDHP dépasse le million de signatures

1er février 2011

Communiqué du 27.01.11 du MDHP, collectif de médecins, soignants, personnels hopsitaliers, patients, pour la sauvegarde d’un service public hospitalier de qualité.

Après nous avoir dit que notre acti­vité était insuf­fi­sante et avoir incité les hôpi­taux à faire la course aux actes (T2A, ren­ta­bi­lité, etc.), voici que le minis­tère nous accuse main­te­nant de trop tra­vailler et envi­sage des quotas pour cer­tains actes (voir l’arti­cle du Figaro du 26 jan­vier 2011). Le ration­ne­ment des actes médi­caux est en marche : il vaut mieux être malade en début d’année.

L’inco­hé­rence de notre sys­tème de tari­fi­ca­tion à l’acti­vité au sein d’une enve­loppe glo­bale (ONDAM) est de plus en plus criante. Il est par ailleurs frap­pant de voir la Fédération hos­pi­ta­lière de France (FHF) pro­tes­ter, alors qu’elle a promu cette poli­ti­que d’allo­ca­tion des res­sour­ces.

Parmi ses nom­breux effets per­vers, la tari­fi­ca­tion à l’acti­vité incite les établissements à pra­ti­quer un codage à leur avan­tage. Les contrô­les des cais­ses d’assu­rance mala­die se tra­dui­sent par des redres­se­ments par­fois impor­tants, met­tant en désé­qui­li­bre le budget des établissements concer­nés. Etant juge et partie, la sécu­rité sociale a par­fois la main lourde (les contrô­leurs ont-ils des objec­tifs, comme les per­ven­ches ?).

Les cli­ni­ques pri­vées, rele­vant des tri­bu­naux civils, ont contesté cer­tai­nes deman­des de rem­bour­se­ment de sommes fac­tu­rées à l’assu­rance mala­die, et un juge­ment récent de la Cour de cas­sa­tion impose à la sécu­rité sociale d’appor­ter la preuve que les pres­ta­tions contes­tées lui ont été indû­ment fac­tu­rées. Pour les hôpi­taux publics, qui relè­vent de la juri­dic­tion admi­nis­tra­tive, des pro­cé­du­res conten­tieu­ses vont pro­ba­ble­ment s’ouvrir. Bientôt le budget des hôpi­taux se tran­chera au Conseil d’Etat.

D’aima­bles cau­se­ries se sont tenues der­niè­re­ment avenue Victoria et à l’Hôtel Scipion. Vous trou­ve­rez sur le site du syn­di­cat des méde­cins des hôpi­taux de Paris le compte rendu de la der­nière com­mis­sion médi­cale d’établissement (CME), et sur celui de l’AP-HP les vœux de la direc­trice géné­rale, du pré­si­dent du conseil de sur­veillance et du pré­si­dent de la CME de l’AP-HP. Une phrase à rete­nir, pro­non­cée par mon­sieur Raoul Briet : “Mon objec­tif sera aussi, soyez-en assu­rés, que les auto­ri­tés de tutelle [...] reconnais­sent que, par essence, la ges­tion res­sort du domaine du temps long. On n’a pas bâti Paris en un jour : on ne trans­for­mera pas l’AP-HP en quel­ques mois ! Il faut donc lui donner à la fois le temps et les moyens de s’adap­ter en pro­fon­deur.” Il rejoint ce que le MDHP lui avait dit lors d’une récente ren­contre, à savoir que rien de bien ne peut se faire dans la pré­ci­pi­ta­tion et que l’étau finan­cier doit se des­ser­rer si l’on ne veut pas détruire les emplois, l’accès aux soins et la qua­lité des soins. Espérons qu’il sera entendu.

Les réor­ga­ni­sa­tions et les restruc­tu­ra­tions, dont la néces­sité n’est contes­tée par per­sonne, doi­vent s’appuyer sur une évaluation ration­nelle et ne sont pas bonnes en elles-mêmes, même si ceux qui se gar­ga­ri­sent de ces mots le lais­sent enten­dre. Dans une note de veille du centre d’ana­lyse stra­té­gi­que datée du 22 juin 2010 et inti­tu­lée “Y a-t-il encore des marges d’effi­cience à l’hôpi­tal ?”, on peut lire page 8 : “Le bilan des recom­po­si­tions hos­pi­ta­liè­res n’a pas été entre­pris en France, notam­ment faute de suivi sta­tis­ti­que. La confé­rence des pré­si­dents de Commissions médi­ca­les d’établissements (CME) de cen­tres hos­pi­ta­liers a néan­moins mené une enquête d’opi­nion, entre juin et sep­tem­bre 2004, auprès de pré­si­dents de CME impli­qués dans 106 opé­ra­tions de restruc­tu­ra­tions hos­pi­ta­liè­res public-public et public-privé. Les enquê­tés ont observé une réduc­tion des coûts dans 20 % des cas, une aug­men­ta­tion dans 31 % des cas et une sta­bi­lité dans 27 % des cas (nsp 22 %).”

Il faut tirer les leçons des réor­ga­ni­sa­tions et restruc­tu­ra­tions menées récem­ment à l’AP-HP, et cher­cher à com­pren­dre pour­quoi cer­tai­nes ont réussi et d’autres ont échoué. Le mana­ge­ment hos­pi­ta­lier et les pro­jets de réor­ga­ni­sa­tion doi­vent repo­ser sur l’expé­rience (voir à ce sujet le blog d’Antoine Flahault sur le mana­ge­ment par les preu­ves), et non sur le copi­nage et l’impro­vi­sa­tion comme cela s’est fait trop sou­vent au cours de ces der­niè­res années dans notre ins­ti­tu­tion.

La direc­trice géné­rale de l’AP-HP a été inter­ro­gée par le maga­zine Challenges. Le titre : “La direc­trice de l’AP-HP fait du patient un client”. Au pas­sage l’arti­cle rap­pelle la sup­pres­sion de 4000 emplois annon­cées par Benoît Leclercq, alors que la direc­tion géné­rale contes­tait cette pers­pec­tive il y a seu­le­ment deux semai­nes lors­que le MDHP annon­çait un chif­fre de plus de 1300 sup­pres­sions de postes en 2011 (voir dépê­che AFP ci-jointe). Madame M. Faugère affirme aussi que “c’est en aug­men­tant les volu­mes d’acti­vi­tés que les coûts s’amor­ti­ront” au moment où la tutelle veut enca­drer le nombre d’actes : allez y com­pren­dre quel­que chose ! Il est impos­si­ble de bien cerner ce que sont un malade et un hôpi­tal en quel­ques semai­nes quand on vient d’un autre sec­teur d’acti­vité comme la SNCF. La direc­trice géné­rale affirme qu’elle est “têtue”. Il serait dom­mage qu’elle per­siste dans cette appro­che indus­trielle et com­mer­ciale, contraire à la nature et à l’éthique de l’acti­vité médi­cale.

De son côté, de façon fort per­ti­nente, le pré­si­dent du conseil de sur­veillance rap­pe­lait dans ses vœux que nous for­mions ”une com­mu­nauté fondée sur des valeurs. Des valeurs qui ne se ven­dent pas, des valeurs qui ne s’échangent pas, des valeurs qui ne se cotent pas, mais des valeurs qui s’affir­ment, qui se défen­dent et qui s’incar­nent dans des actes et dans des pro­jets, dans une ambi­tion pro­fes­sion­nelle col­lec­tive.”

Pour com­pren­dre les rai­sons du ”petit moral” des “gens” dont parle la direc­trice géné­rale dans son entre­tien à Challenges, on peut lire le texte ci-joint de notre col­lè­gue Jean-Pascal Devailly, et consul­ter son blog.

Nos conci­toyens ont bien pris cons­cience de la néces­sité de défen­dre l’hôpi­tal public. Notre péti­tion a déjà été signée par plus d’un mil­lion de per­son­nes.
Pour la signer vous aussi : http://peti­tion-mdhp.fr/

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