Le SNPI CFE-CGC auditionné par la Commission Larcher

29 novembre 2007

Thierry Amouroux, le Président du syndicat infirmier de la CFE-CGC, a été auditionné le 22 novembre 2007 par la commission Larcher sur les missions de l’hôpital.

Le Sénateur Larcher a été mis­sionné par le Gouvernement pour rendre un rap­port autour de cinq thèmes de tra­vail :
  orga­ni­ser les soins de proxi­mité pour une meilleure per­ti­nence des recours à l’hôpi­tal ;
  amé­lio­rer le pilo­tage de l’hôpi­tal ;
  struc­tu­rer le ser­vice hos­pi­ta­lier de ter­ri­toire ;
  ren­for­cer l’attrac­ti­vité pour les pro­fes­sion­nels ;
  dyna­mi­ser la recher­che et l’ensei­gne­ment.

Thierry Amouroux a indi­qué que l’attrac­ti­vité pas­sait for­cé­ment par la reconnais­sance sala­riale et uni­ver­si­taire des pro­fes­sion­nels de santé :
 la car­rière d’une infir­mière est "tassée" sur 20 ans (classe nor­male) ou 24 ans (classe supé­rieure) : elle stagne ensuite jusqu’à la retraite au même indice. La grille est aléa­toire : les échelons sont de 2, 3 ou 4 ans, avec une hausse de 16 à 34 points d’indice. Le SNPI CFE-CGC sou­haite une car­rière linéaire avec une montée d’échelon tous les trois ans jusqu’à la retraite, afin de per­met­tre une réelle évolution de car­rière.
 l’évolution sala­riale d’une infir­mière est faible : le trai­te­ment net men­suel d’un infir­mier de classe nor­male dans la fonc­tion publi­que hos­pi­ta­lière va de 1.509 euros en début de car­rière, à 2.172 euros en fin de car­rière en classe nor­male (ou 2.394 euros en classe supé­rieure) primes et indem­ni­tés per­ma­nen­tes com­pri­ses. Selon les pro­pres études du Ministère (rap­port DREES) cinq ans après leur diplôme, tous les autres titu­lai­res d’un diplôme bac + 2 ou 3 tou­chent plus que les infir­miè­res, alors qu’ils n’en ont pas les contrain­tes (1 WE sur 2, tra­vail de nuit) et péni­bi­li­tés (phy­si­que et men­tale). Quelle autre pro­fes­sion à bac + 3 ne connait qu’une évolution sala­riale de 700 euros entre débu­tant et senior ?
 beau­coup de soi­gnants ont validé des diplô­mes uni­ver­si­tai­res (DU, mas­ters, etc.) sans reconnais­sance sala­riale ou fonc­tion­nelle : le SNPI CFE-CGC demande une valo­ri­sa­tion sala­riale des for­ma­tions qua­li­fian­tes.
 les contrain­tes sont ridi­cu­le­ment rétri­buées : un euro par heure de nuit entre 21h et 6h, et 0,31 euros de prime de conta­gion par jour !
Pour une juste rému­né­ra­tion des contrain­tes, nous sou­hai­tons le dou­ble­ment de la prime de nuit, ainsi que celle de diman­che et fériés (actuel­le­ment de 45 euros).

Mais l’attrac­ti­vité passe aussi par la reconnais­sance uni­ver­si­taire de notre niveau bac + 3 :
 le SNPI CFE-CGC réaf­firme sa volonté d’uni­ver­si­ta­ri­sa­tion des études autour d’un cursus unique et double diplô­mant, sanc­tionné à la fois par un grade uni­ver­si­taire de licence, et le main­tien d’un diplôme d’Etat d’infir­mier pour l’exer­cice de l’acti­vité,
 le SNPI CFE-CGC refuse le lien avec tout allon­ge­ment de la durée d’acti­vité, sur le modèle des infir­miè­res spé­cia­li­sées, qui sont pas­sées en caté­go­rie A en 2001, sans report de la date de départ en retraite. Toutes les études mon­trent la péni­bi­lité de notre pro­fes­sion, et l’usure pro­fes­sion­nelle qui en découle.
 le SNPI CFE-CGC ne se conten­tera pas du tra­vail sur le niveau licence : il faudra également mettre sur pied le niveau master pour les cadres et les infir­miè­res spé­cia­li­sées, ainsi qu’un doc­to­rat pour la recher­che en soins infir­miers.

L’attrac­ti­vité repose enfin sur la reconnais­sance des com­pé­ten­ces pro­fes­sion­nel­les des infir­miè­res en éducation de la santé, pré­ven­tion et santé publi­que : le SNPI CFE-CGC sou­haite la valo­ri­sa­tion du tra­vail des infir­miè­res cli­ni­cien­nes et des infir­miè­res de pra­ti­que avan­cée. Les consul­ta­tions infir­miè­res doi­vent être reconnues et fac­tu­rées comme telles.

Il convient également d’orga­ni­ser les secondes par­ties de car­rière, pour tenir compte à la fois de l’usure pro­fes­sion­nelle et du pro­blème de la trans­mis­sion des savoirs issus de l’expé­rience :
 pen­dant long­temps, le bras­sage dans les ser­vi­ces entre les nou­veaux savoirs théo­ri­ques appor­tés par les nou­vel­les diplô­mées et les savoirs pra­ti­ques issus de l’expé­rience acquise par les infir­miè­res expé­ri­men­tées per­met­tait une bonne qua­lité des soins,
 aujourd’hui, on cons­tate déjà un désé­qui­li­bre démo­gra­phi­que, avec beau­coup d’infir­miè­res qui ont moins de cinq ans de diplôme, et des IDE à dix ans de la retraite,
 d’ici 2015, 55 % des IDE par­tent à la retraite avec un pic vers 2012, alors que la durée de vie pro­fes­sion­nelle d’une IDE reste faible (12 ans), et que la charge de tra­vail limite les échanges pro­fes­sion­nels (dimi­nu­tion de la durée moyenne de séjour, hausse de la gra­vité des cas, les mala­des "plus légers" étant pris en charge en HAD ou en hôpi­tal de jour) : le "com­pa­gnon­nage" natu­rel ne sera donc plus assuré, ce qui va jouer sur les IDE, mais également les inter­nes (lors de leur stage de six mois ils sont certes formés par les méde­cins du ser­vice, mais également "conseillés" par les IDE expé­ri­men­tées pré­sen­tes dans le ser­vice depuis des années)

Le SNPI CFE-CGC pro­pose donc que les infir­miè­res expé­ri­men­tées, lors de leur fin de car­rière, soient à mi-temps en poste dans leur ser­vice, et à mi-temps assu­rent :
 le tuto­rat des nou­vel­les diplô­mées, des infir­miè­res de l’équipe de sup­pléance, des infir­miè­res inté­ri­mai­res,
 l’enca­dre­ment des étudiants en soins infir­miers en stage dans le pôle,
 des cours en IFSI sur leur domaine d’exper­tise,
 des consul­ta­tions infir­miè­res pour assu­rer l’accom­pa­gne­ment et l’éducation thé­ra­peu­ti­que des patients.

Le SNPI CFE-CGC sou­haite que la for­ma­tion conti­nue assure des for­ma­tions d’enri­chis­se­ment des pra­ti­ques cli­ni­ques infir­miè­res. En effet, de plus en plus les for­ma­tions sécu­ri­tai­res ou ins­ti­tu­tion­nel­les (incen­die, accré­di­ta­tion, sys­tème infor­ma­ti­que, nou­velle gou­ver­nance, tari­fi­ca­tion, etc.) concen­trent les efforts de for­ma­tion, aux dépends des besoins des pro­fes­sion­nels.

Le SNPI CFE-CGC estime qu’une for­ma­tion d’exper­tise en santé men­tale va deve­nir indis­pen­sa­ble, entre des besoins qui aug­men­tent (psy­chia­trie, vieillis­se­ment de la popu­la­tion) et le fait que les ISP, infir­miers de sec­teur psy­chia­tri­que soient en voie d’extinc­tion. Alors que chacun peut cons­ta­ter la valeur ajou­tée appor­tée par un ISP dans un ser­vice d’urgence par exem­ple.

Pour amé­lio­rer le pilo­tage de l’hôpi­tal, le SNPI CFE-CGC estime incontour­na­ble de revoir la place des cadres de santé. La nou­velle gou­ver­nance a oublié ce troi­sième pilier de l’hôpi­tal, alors que tout doit passer par la colonne ver­té­brale que cons­ti­tue l’enca­dre­ment. Les cadres de santé oscil­lent entre colère et démo­ti­va­tion face à un sys­tème qui les igno­rent en tant que déci­deurs, mais leur demande tout, en tant qu’exé­cu­tants !

Le dis­cours sur les cadres de santé, consi­dé­rés par la tech­no­struc­ture comme des "petits A" ou des "A moins" (que rien ?), est inad­mis­si­ble. Il convient donc de les mettre sur la grille "A type", au regard du nombre d’agents qu’ils enca­drent.

Enfin, les soins de proxi­mité sont à recons­truire, la France ayant tout misé sur le cura­tif. On voit là l’absence d’Ordre Infirmier capa­ble de faire enten­dre la vision infir­mière de la santé. Contrairement aux autres pays, dans les­quels la pro­fes­sion infir­mière a pu faire valoir son point de vue, les soins de santé pri­maire sont en jachère en France. Il convient de réor­ga­ni­ser la méde­cine de quar­tier (dis­pen­sai­res, mai­sons médi­ca­les), la méde­cine sco­laire, et la santé au tra­vail.

La Commission est com­po­sée de :
 M. Gérard LARCHER, Sénateur, Président
 M. AUBERT Jean Marc, Directeur délé­gué de la ges­tion et de l’orga­ni­sa­tion des soins de la CNAMTS
 M. BASTE Jean-Marc, Chef de cli­ni­que CHU de Bordeaux
 M. BAUGE Jean-Pascal, Médecin PH CH de Romans
 M. BRUN Nicolas, repré­sen­tant des usa­gers UNAF
 M. CATHELINEAU Gérard, coo­pé­ra­tion entre ville et hôpi­tal dans l’Aisne
 M. CHOLLET Pierre, méde­cin PH CH d’Agen
 M. CHOUPIN Philippe, Directeur des nou­vel­les cli­ni­ques Nantaises
 M. DARTEVELLE Philippe, Chirurgien Marie Lannelongue (92)
 M. DAUMUR Bernard, Directeur CH Montauban
 M. ESCAT Jean, Médecin PUPH CHU Toulouse
 Mme GUINGOUAIN Marylène, Directrice des soins à l’hôpi­tal European Georges Pompidou
 Mme LYAZID Maryvonne, Directrice adjointe de la fon­da­tion des cais­ses d’épargne
 M. MARCHIOL Fabrice, Maire de La Mûre
 M. MILLOUR Patrick, Médecin libé­ral géné­ra­liste à Fréjus
 M. MOINARD Daniel, Directeur CHU Toulouse
 M. MOLINIE Eric, Vice Président de l’APF
 M. MOREL Francis, Directeur PSPH, Hôpital Belle-Ile à Metz
 M. MUNINI Thierry, Infirmier Libéral à Orange
 M. PIRIOU Philippe, Médecin PUPH hôpi­tal Raymond Poincaré
 Mme RIVE Christine, Médecin spé­cia­liste libé­ral Angers
 M. SCHWEYER François-Xavier, Sociologue ENSP
 M. SEGADE Jean-Paul, Directeur CHU Clermont Ferrand

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