Logique parlementaire : méfions nous des infirmières de pratique avancée, mais l’auxiliaire de vie peut faire du valium !

23 mars 2015

Déqualification des soins pour les handicapés !

A l’Assemblée Nationale, le débat sur la loi de santé aura connu de grands moments, avec des dépu­tés à la logi­que sur­pre­nante !

Jeudi 19 mars 2015, la com­mis­sion des affai­res socia­les de l’Assemblée natio­nale a adopté le projet de loi rela­tif à la santé, rebap­tisé sur amen­de­ment gou­ver­ne­men­tal projet de loi de moder­ni­sa­tion de notre sys­tème de santé.

S’agis­sant de la pré­pa­ra­tion aux métiers de demain, l’arti­cle 30 crée un exer­cice en pra­ti­que avan­cée pour les pro­fes­sions para­mé­di­ca­les. Mais un amen­de­ment gou­ver­ne­men­tal (AS1505) réaf­firme le rôle du méde­cin en qua­lité de coor­don­na­teur de l’équipe. Le lobby médi­cal a fonc­tionné à plein régime pour que des infir­miè­res Bac +3, qui vont faire deux années de Master après cinq années d’exer­cice pro­fes­sion­nel, res­tent de sim­ples auxi­liai­res médi­ca­les sans grande auto­no­mie. Dans 25 autres pays (aux USA depuis un demi-siècle), 330.000 infir­miè­res de pra­ti­que avan­cée exer­cent comme le fait la sage-femme en France (Master, pres­crip­tion).

Les rai­sons de ses fri­lo­si­tés : http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Loi-sante-pra­ti­ques-avan­cees-en.html

Mais dans le même temps, nos bons dépu­tés ajou­tent un arti­cle après l’arti­cle 30 (amen­de­ment AS872) afin de per­met­tre la délé­ga­tion d’actes de soins infir­miers à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux. L’exposé des motifs pré­cise que l’amen­de­ment vise à per­met­tre à des pro­fes­sion­nels sala­riés non soi­gnants de réa­li­ser des actes tels que l’admi­nis­tra­tion de valium en cas de crise d’épilepsie convul­sive chez une per­sonne han­di­ca­pée ou encore des aspi­ra­tions tra­chéa­les. Bref, la, aucun pro­blème pour que l’auxi­liaire de vie uti­lise des médi­ca­ments ! Le diplôme d’Etat d’auxi­liaire de vie sociale (DEAVS) est de niveau CAP, la for­ma­tion a lieu en alter­nance et aucun diplôme n’est requis.

Le pas­sage le plus mépri­sant envers notre pro­fes­sion est à lire dans l’AMENDEMENT N°AS845 heu­reu­se­ment rejeté, pré­senté par M. Accoyer

ARTICLE 30 : Supprimer cet arti­cle.

EXPOSÉ SOMMAIRE

"L’arti­cle 30 vise à déve­lop­per la pra­ti­que avan­cée pour les pro­fes­sions para­mé­di­ca­les, créant par la même occa­sion le métier d’infir­mier cli­ni­cien.

Ce dis­po­si­tif pré­voit le trans­fert, aux infir­miè­res, de com­pé­ten­ces qui appar­tien­nent aux méde­cins. Ainsi, elles pour­ront établir un diag­nos­tic, pres­crire des pro­duits de santé non soumis à pres­crip­tion médi­cale obli­ga­toire, et renou­ve­ler, voir adap­ter des pres­crip­tions médi­ca­les. Or, ces mis­sions font par­ties du cœur de métier des méde­cins et répon­dent à un socle de for­ma­tion, par consé­quent ces trans­ferts de tâches ne sont pas accep­ta­bles. C’est d’autant plus inac­cep­ta­ble que ces auto­ri­sa­tions de pres­crip­tions concer­nent des patho­lo­gies com­plexes néces­si­tant une prise en charge plu­ri­dis­ci­pli­naire et l’exper­tise des méde­cins. De plus, à mul­ti­plier les pres­crip­teurs on ajoute un risque de rup­ture ou de conflit dans le par­cours de soins du patient.

Par ailleurs, le dis­po­si­tif va créer un nouvel acteur dans le par­cours de soins du patient, qui est déjà suf­fi­sam­ment com­plexe. C’est une nou­velle pro­fes­sion qui va néces­si­ter une for­ma­tion spé­ci­fi­que, via la créa­tion d’un diplôme uni­ver­si­taire de for­ma­tion en pra­ti­que avan­cée, et de nou­vel­les com­pé­ten­ces à rému­né­rer, ce qui coû­tera au sec­teur public envi­ron 4,3 M€ par an, en année pleine, et plus de 6 M€ pour le sec­teur privé.

Pour mémoire, Monsieur le pre­mier minis­tre, Manuel Valls, a indi­qué qu’il enga­ge­rait une Grande Conférence de l’avenir du métier médi­cal et du mode d’exer­cice, il est sou­hai­ta­ble de repor­ter à cette concer­ta­tion, entre les pro­fes­sion­nels de santé, les dis­cus­sions sur les trans­ferts des com­pé­ten­ces.
C’est pour­quoi il convient de sup­pri­mer cet arti­cle."

Source : http://www.assem­blee-natio­nale.fr/14/dos­siers/sante.asp


AMENDEMENT N°AS872, hélas alopté
pré­senté par Mme Poletti, M. Door, Mme Louwagie, M. Perrut et M. Aboud

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L’ARTICLE 30, insé­rer l’arti­cle sui­vant :

L’arti­cle L. 313‑26 du code de l’action sociale et des famil­les est com­plété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret pré­cise les condi­tions dans les­quel­les les actes de soins infir­miers peu­vent être délé­gués à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux men­tion­nés à l’arti­cle L. 312‑1. ».

EXPOSÉ SOMMAIRE

La pré­sence de méde­cins ou d’infir­miers dans les établissements médico-sociaux n’est pas tou­jours sys­té­ma­ti­que. Aussi, les struc­tu­res médico-socia­les peu­vent être ame­nées à deman­der une réo­rien­ta­tion vers une autre réponse à la sur­ve­nue d’une patho­lo­gie néces­si­tant des soins infir­miers par exem­ple.

Comme Denis Piveteau le pré­cise dans son rap­port « Zéro sans solu­tion » l’objec­tif doit être d’accroî­tre la capa­cité de tous à porter dans la durée des situa­tions plus lour­des, par une montée en com­pé­ten­ces et savoir-faire inter­nes. L’inté­rêt des per­son­nes est, par prin­cipe, que leur accom­pa­gne­ment de long court se déroule tou­jours dans l’envi­ron­ne­ment le moins spé­cia­lisé pos­si­ble, mais bien le plus proche de la vie ordi­naire.

C’est pour­quoi, le pré­sent amen­de­ment vise à per­met­tre à des pro­fes­sion­nels sala­riés non soi­gnants de réa­li­ser des actes tels que l’admi­nis­tra­tion de valium en cas de crise d’épilepsie convul­sive chez une per­sonne han­di­ca­pée ou encore des aspi­ra­tions tra­chéa­les ou des nutri­tions par gas­tro­to­mie et de garan­tir la réa­li­sa­tion des soins néces­sai­res à la qua­lité de vie dans les meilleu­res condi­tions pos­si­bles.

Néanmoins, ces actes res­tent des actes de soin dont la réa­li­sa­tion est chaque fois que pos­si­ble effec­tuée par un per­son­nel soi­gnant, cepen­dant sa réa­li­sa­tion peut être délé­guée par un méde­cin à tout per­son­nel sala­rié de l’établissement sous condi­tion :
 d’une for­ma­tion adap­tée et régu­liè­re­ment actua­li­sée ;
 d’une infor­ma­tion spé­ci­fi­que sur la pro­cé­dure et ses condi­tions d’uti­li­sa­tion.

Un décret vient pré­ci­ser les condi­tions stric­tes d’enca­dre­ment de tels gestes.

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