Plan Bayrou : l’austérité frappe les plus vulnérables

4 août 2025

Avec le plan Bayrou, le Premier minis­tre déploie une bat­te­rie de mesu­res d’aus­té­rité dont la vio­lence sociale ne fait aucun doute. Un budget d’une bru­ta­lité sans pré­cé­dent, qui fait payer la crise aux mêmes qu’hier  : les mala­des, les sala­riés, les retrai­tés, les jeunes, les chô­meurs, les plus vul­né­ra­bles.

Après la réforme des retrai­tes, reje­tée par un mou­ve­ment social d’ampleur his­to­ri­que, le gou­ver­ne­ment avait promis une «  nou­velle métho­de  ». L’inter­syn­di­cale uni­taire, qui réunit la CFDT, la CGT, FO, la CFE-CGC, la CFTC, l’UNSA, la FSU et Solidaires, dénonce un budget frap­pant d’abord ceux qui tra­vaillent, qui étudient, qui soi­gnent ou qui sur­vi­vent avec une pen­sion ou une allo­ca­tion.

Suppression de jours fériés, gel des pres­ta­tions socia­les, baisse dégui­sée des pen­sions, coupes dans l’assu­rance chô­mage, dou­ble­ment des fran­chi­ses médi­ca­les et asphyxie des ser­vi­ces publics  : le plan coche toutes les cases d’une aus­té­rité clas­si­que. Et sur­tout, il épargne soi­gneu­se­ment les plus hauts reve­nus et les gran­des entre­pri­ses.

La mesure la plus emblé­ma­ti­que – et la plus cho­quante – est sans doute la sup­pres­sion de deux jours fériés. Présentée comme un moyen de «  ga­gner en pro­duc­ti­vi­té  », elle revient en réa­lité à impo­ser deux jours de tra­vail gra­tuit.

Concrètement, pour des mil­lions de sala­riés men­sua­li­sés, cela signi­fie une baisse méca­ni­que du salaire horaire. Et pour ceux qui tra­vaillent déjà les jours fériés (soi­gnants, agents de sécu­rité, per­son­nels des trans­ports, du tou­risme ou de la grande dis­tri­bu­tion) la perte est dou­ble  : fin de la majo­ra­tion sala­riale et dis­pa­ri­tion du repos com­pen­sa­toire. Sur le fond, c’est une remise en cause du repos col­lec­tif, der­nier ves­tige des conquê­tes socia­les sur le temps libre.

L’argu­ment économique est fra­gile. La pro­duc­tion d’une entre­prise ne se décrète pas par le calen­drier, rap­pel­lent les économistes. Elle dépend des car­nets de com­man­des, pas du nombre de jours ouvrés. Cette mesure n’aug­men­tera ni la richesse du pays, ni la consom­ma­tion, mais elle réduit immé­dia­te­ment la valeur du tra­vail.

Deuxième pilier du plan  : le gel des pen­sions et des pres­ta­tions socia­les, pré­senté comme une mesure tech­ni­que . Dans les faits, c’est une baisse dégui­sée du pou­voir d’achat.

Avec une infla­tion annon­cée à 1,4 % pour 2026, chaque euro non reva­lo­risé est un euro qui perd de la valeur. Les consé­quen­ces sont très concrè­tes  :
 Pour un adulte han­di­capé vivant seul, 175 € en moins.
 Pour des retrai­tés modes­tes, plu­sieurs cen­tai­nes d’euros de niveau de vie amputé.
 Pour un béné­fi­ciaire du RSA, envi­ron 110 € de perte par an.

Ce gel touche direc­te­ment les famil­les qui bou­clent à peine leurs fins de mois. Et la méca­ni­que est impla­ca­ble  : en blo­quant les seuils d’accès aux aides, de nom­breux foyers per­dront leurs droits dès la moin­dre reva­lo­ri­sa­tion de revenu, même si elle est infé­rieure à l’infla­tion.

Dans un pays où le taux de pau­vreté atteint son plus haut niveau depuis trente ans, ces mesu­res cons­ti­tuent un coup de massue pour les plus fra­gi­les  : femmes seules avec enfants, famil­les mono­pa­ren­ta­les, jeunes pré­cai­res, per­son­nes en situa­tion de han­di­cap.

Troisièmement, le plan d’aus­té­rité frappe également dure­ment les mala­des la santé et les ser­vi­ces publics  :
 Le dou­ble­ment des fran­chi­ses médi­ca­les et par­ti­ci­pa­tions for­fai­tai­res, de 50 à 100 € par an,
https://syn­di­cat-infir­mier.com/Franchise-medi­cale-fausse-res­pon­sa­bi­li­sa­tion-vraie-injus­tice-sociale.html
 Une menace sur la prise en charge des affec­tions de longue durée (ALD),
 Un gel des bud­gets publics, qui équivaut à une baisse en euros cons­tants de 1,4 %.

Hôpitaux, uni­ver­si­tés, culture, col­lec­ti­vi­tés  : par­tout, le même effet ciseau. Moins de moyens, plus de fer­me­tu­res, davan­tage de sup­pres­sions de postes. Ce plan accé­lère l’asphyxie d’ins­ti­tu­tions déjà exsan­gues. L’étau se res­serre sur les hôpi­taux et les ser­vi­ces publics, déjà exsan­gues. L’inter­syn­di­cale pré­vient  : ce plan affai­blit la société à long terme, en détrui­sant les outils même de la cohé­sion sociale.

Le plan Bayrou s’atta­que aussi à l’assu­rance chô­mage, déjà sévè­re­ment ampu­tée par trois réfor­mes suc­ces­si­ves depuis 2021.

Alors que les allo­ca­tions ont chuté de 17 % en moyenne, selon l’Unédic, per­met­tant de réa­li­ser 25 ­mil­liards d’économies sur le dos des deman­deurs d’emploi. Et que le nombre de per­son­nes en fin de droits a bondi de 70 % en deux ans, attei­gnant 79 000 en décem­bre 2024. Le nou­veau projet aggrave cette logi­que  puni­tive.

L’idée sous-jacente reste la même  : les chô­meurs doi­vent être contraints d’accep­ter n’importe quel emploi, même pré­caire, au lieu de pré­ten­dre à une allo­ca­tion. Mais les chif­fres rap­pel­lent une réa­lité méconnue  :
 Seules 4 per­son­nes sur 10 sont indem­ni­sées.
 La moitié de ces allo­ca­tai­res tra­vaillent déjà chaque mois, en inté­rim ou en CDD courts.

Durcir encore ces règles ne fera pas bais­ser le chô­mage. Cela ne pro­duit aucun emploi sup­plé­men­taire, mais aggrave la pau­vreté, accen­tue la pré­ca­rité et creuse la défiance envers les ins­ti­tu­tions.

Ce qui indi­gne l’inter­syn­di­cale, c’est l’angle mort volon­taire de ce plan : l’injus­tice fis­cale. Derrière cette aus­té­rité, un silence assour­dis­sant  : les plus hauts reve­nus et les gran­des entre­pri­ses sont épargnés.
 211 ­mil­liards d’euros d’aides publi­ques sont versés chaque année aux entre­pri­ses, sans condi­tion ni contrôle.
 Les divi­den­des bat­tent des records, même dans des entre­pri­ses qui délo­ca­li­sent ou licen­cient.
 Les plus hauts reve­nus et patri­moi­nes conti­nuent d’échapper à une contri­bu­tion équitable.

Le pro­blème de la dette n’est pas le coût du tra­vail. C’est le manque de recet­tes fis­ca­les lié à des décen­nies de cadeaux fis­caux et d’opti­mi­sa­tion non enca­drée. Refuser de tou­cher à cette injus­tice, tout en pres­su­rant les plus modes­tes, c’est un choix poli­ti­que inac­cep­ta­ble.
https://syn­di­cat-infir­mier.com/Protection-sociale-les-exo­ne­ra­tions-creu­sent-le-defi­cit-pas-les-soins.html

La culpa­bi­li­sa­tion comme ligne poli­ti­que

Derrière ce plan d’aus­té­rité se des­sine une logi­que cons­tan­te  : dési­gner des cou­pa­bles plutôt que cher­cher des solu­tions struc­tu­rel­les. Depuis des années, le dis­cours gou­ver­ne­men­tal s’arti­cule autour de la culpa­bi­li­sa­tion des plus fra­gi­les  :
 Les patients sont invi­tés à être «  res­pon­sa­bles  » de leur santé. Les fran­chi­ses médi­ca­les dou­blées et les mena­ces sur les ALD tra­dui­sent l’idée que si le sys­tème coûte cher, c’est d’abord parce que les mala­des consul­tent «  trop  ».
 Limiter les arrêts de tra­vail, réduire les indem­ni­tés jour­na­liè­res, ren­for­cer les contrô­les : le même dis­cours accu­sa­teur. Celui d’un sys­tème trop géné­reux, d’un corps médi­cal laxiste, de patients peu scru­pu­leux.
https://syn­di­cat-infir­mier.com/Sous-l-arret-de-tra­vail-la-souf­france-au-tra­vail-qu-on-refuse-de-voir.html
 Les chô­meurs sont sys­té­ma­ti­que­ment soup­çon­nés d’oisi­veté. La dégres­si­vité des allo­ca­tions et les dur­cis­se­ments suc­ces­sifs n’ont qu’un objec­tif  : faire passer le mes­sage qu’être au chô­mage est une faute morale à sanc­tion­ner.
 Les retrai­tés, enfin, sont régu­liè­re­ment décrits comme des «  pri­vi­lé­giés  » vivant au détri­ment des actifs, alors même que beau­coup sur­vi­vent avec des pen­sions modes­tes et que la désin­dexa­tion les appau­vrit chaque année.

Cette rhé­to­ri­que est dan­ge­reuse socia­le­ment. Elle oppose les caté­go­ries entre elles, stig­ma­tise les plus vul­né­ra­bles et détourne le regard des vrais leviers   : la fis­ca­lité, les iné­ga­li­tés, et la contri­bu­tion des plus riches et des gran­des entre­pri­ses.

Une péti­tion uni­taire pour dire «  ça suf­fit  »

Face à ce cons­tat, com­ment agir en tant que citoyen ? Les syn­di­cats ont su s’enten­dre, pour avan­cer ensem­ble. En atten­dant une mobi­li­sa­tion à la ren­trée, l’inter­syn­di­cale lance une péti­tion uni­taire pour exiger l’aban­don immé­diat de ces mesu­res.

Dans un pays où la colère sociale n’est jamais retom­bée depuis la réforme des retrai­tes, ce plan d’aus­té­rité est un pari dan­ge­reux. Il menace notre cohé­sion sociale et plonge encore plus de famil­les dans l’insé­cu­rité économique.

Parce que l’aus­té­rité ne doit pas deve­nir notre hori­zon, il est temps de dire col­lec­ti­ve­ment  : ça suffit.

➡️ La péti­tion uni­taire inter­syn­di­cale est ouverte à la signa­ture : https://stop­bud­get­bay­rou.fr/

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