Solidarité avec notre consœur infirmière libérale agressée à Vénissieux

18 mai 2025
Le SNPI tient à exprimer son plus profond soutien et sa solidarité envers notre consœur infirmière agressée, pendant sa tournée du matin, par un jeune à Vénissieux, samedi 17 mai. Cet acte de violence est inacceptable et nous condamnons fermement toute forme d’agression à l’encontre des professionnels de la santé.
Au quotidien, les infirmières libérales sont confrontées à des violences verbales, psychologiques mais aussi physiques. "Ces violences ne font pas partie des risques du métier. Il y a un interdit universel, dans toute culture, à toute époque : ne pas agresser celui qui porte secours. Toute violence est inacceptable, mais s’en prendre à une infirmière ou un pompier qui vient soigner dans une cité est d’une gravité extrême." précise Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI.
Cette infirmière a été agressée lors de sa tournée du matin à Vénissieux. Alors qu’elle venait soigner. Parce qu’elle était là, simplement.
https://www.bfmtv.com/lyon/venissieux-une-infirmiere-agressee-par-un-guetteur-lors-d-une-intervention_AN-202505170175.html
Chaque semaine, l’actualité en livre un nouvel exemple. Chaque semaine, un soignant est frappé, menacé, humilié. Et pourtant, le silence règne. Comme si cette violence était devenue une variable d’ajustement du soin moderne.
Pourtant, ce n’est pas un « risque du métier ». Ce n’est pas un dommage collatéral. Il y a, un interdit fondamental : ne pas s’en prendre à celui qui porte secours. Quand cet interdit s’effondre, ce n’est pas seulement l’infirmière qui est atteinte. C’est la société tout entière qui chancelle.
Les soignants sont confrontés à une violence de plus en plus fréquente. Et de plus en plus grave :
– En 2014, on recensait 15 agressions de soignants chaque jour. Aujourd’hui, on dénombre 35 actes de violence par jour dans les hôpitaux français.
– Et ce ne sont plus seulement des insultes. Ce sont des coups de poing, des étranglements, des projections d’objets. Des menaces de mort. Des armes parfois sorties dans les couloirs. Des soignantes en pleurs sur un parking. Des services qui ne tiennent plus que par la peur et l’endurance.
Aux urgences, en psychiatrie, en gériatrie : les tensions s’accumulent là où la souffrance est la plus aiguë, et où les délais d’attente deviennent des étincelles dans un baril de poudre.
Les infirmières libérales sont aussi en première ligne. Elles interviennent seules, sans alerte, dans des quartiers où la méfiance peut basculer en violence. Et quand l’une d’elles est frappée, une question se pose : pendant que l’infirmière libérale est prise en charge par les secours, qui va s’occuper du reste des patients de sa tournée ? Qui soignera ses patients à sa place ?
Dans les établissements de santé, certaines directions d’établissement évoquent des boutons d’alerte, des caméras de surveillance, ou des vigiles en horaires décalés. Mais un système de sécurité, ce n’est pas un gadget. Ce n’est pas un couvercle posé sur une marmite bouillante.
Les soignants doivent être formés à la gestion des violences : repérage des signes avant-coureurs, posture corporelle, techniques verbales de désescalade. En psychiatrie, ce savoir-faire s’acquiert par l’expérience, le compagnonnage, le retour d’expérience entre pairs. Pourquoi ne pas le généraliser ? Au contraire, les départs en formation sont de plus réduits, entre les baisses de budget et le sous-effectif.
Loin des grandes déclarations, les soignants veulent surtout du concret. Ils veulent que leur sécurité soit prise au sérieux. Ils veulent pouvoir finir leur service sans blessure. Ils veulent être soutenus quand ils signalent une agression.
Trop peu de professionnels savent qu’ils bénéficient d’un statut de protection spécifique. Agresser un soignant dans l’exercice de ses fonctions relève du code pénal. Une plainte peut aboutir à une condamnation, une amende, et des dommages-intérêts. Mais la peur du procès, le manque de temps, le sentiment d’isolement freinent encore beaucoup de victimes.
Le SNPI appelle à un changement radical de culture :
– dépôt de plainte systématique en cas d’agression,
– soutien psychologique et juridique immédiat,
– plainte parallèle de la direction auprès du procureur, pour marquer un appui institutionnel,
– accompagnement administratif pour alléger les démarches.
Et dans le cas particulier de la santé mentale, poursuivre un patient ne signifie pas renoncer au soin. Au contraire, dans certains cas, la sanction pénale fait partie du cadre thérapeutique, et peut jouer un rôle de rappel à la loi bénéfique.
L’hôpital est par nature un lieu où l’angoisse, la tension et l’émotion sont toujours très présentes, ce qui peut parfois conduire à des actes de violence. Pourtant, ces actes sont d’autant plus intolérables dans un environnement où le personnel hospitalier a pour mission principale d’aider et de soutenir les patients et leurs proches. Les agressions violentes sont une source d’incompréhension profonde et peuvent engendrer de réelles difficultés professionnelles chez les soignants.
"La sécurité au travail doit être garantie à tous les personnels hospitaliers, précise Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers (SNPI CFE-CGC) Les directions d’établissements doivent tout mettre en œuvre pour sanctuariser l’hôpital. Elles sont responsables d’organiser les conditions d’un exercice professionnel serein."
Les salles d’attente des urgences sont par définition des lieux dans lesquels la tension peut vite monter et où des passages à l’acte (verbal ou physique) sont possibles. Il faut donc réfléchir avec le personnel à l’organisation matérielle des salles d’attente (circuit des patients et des accompagnants, téléviseurs, diffusion d’informations, indication des temps d’attente, etc.). Des affiches doivent rappeler que les comportements agressifs sont passibles de poursuites. Et qu’agresser un soignant, ce n’est pas un conflit ordinaire : c’est une atteinte à la chaîne de soins.
Les personnels, notamment féminins, mettent souvent en avant un sentiment d’insécurité lorsqu’ils prennent ou quittent leur poste : il faut donc travailler à l’organisation d’une présence de vigiles aux moments clés d’utilisation des parkings, à l’augmentation des zones de vidéosurveillance, etc.
La violence use. Elle n’abîme pas seulement les corps, mais la confiance, le sens, l’envie de soigner. Dans les services les plus exposés, c’est souvent la solidarité entre collègues qui fait la différence. Un regard complice, un mot échangé après un incident, un soutien hiérarchique qui ne banalise pas l’inacceptable. Sans cette cohésion, les soignants tombent deux fois : physiquement, puis psychologiquement.
Dans les cités comme dans les hôpitaux, les soignants tombent. Pas par épuisement. Pas sous la charge de travail. Mais sous les coups. Combien d’agressions faudra-t-il encore pour que la sécurité des soignants cesse d’être un angle mort des politiques de santé ?