2 infirmières sur 3 hostiles au dextro fait par des aides-soignants

2 mars 2016

Aujourd’hui, un aide-soi­gnant ne peut effec­tuer d’injec­tions, car "l’effrac­tion de la bar­rière cuta­née" relève du Code Pénal. Seul un méde­cin, et par délé­ga­tion une infir­mière, peut effec­tuer une injec­tion. Du fait du manque d’infir­miè­res en EHPAD, le minis­tère s’inter­roge sur l’oppor­tu­nité de faire réa­li­ser des dex­tros (gly­cé­mie capil­laire) par les aides-soi­gnants, sans pré­sence d’infir­mière dans le ser­vice ou l’établissement. Se posera alors le pro­blème de l’éventuelle injec­tion d’insu­line.

Une très large consul­ta­tion : 31.658 répon­ses !

Le SNPI CFE CGC, syn­di­cat des infir­miers sala­riés, a sou­haité lancer une consul­ta­tion auprès des pro­fes­sion­nels, au tra­vers de son site inter­net. Du 9 au 28 février 2016, 31.658 infir­miè­res, cadres infir­miers ou infir­miè­res spé­cia­li­sées se sont expri­més.

Des mil­liers d’infir­miè­res répon­daient chaque jour, signe d’un inté­rêt cer­tain sur la ques­tion. C’est la pre­mière fois qu’autant de pro­fes­sion­nels infir­miers répon­dent à un son­dage de ce type. On cons­tate une varia­tion :
 Selon le sec­teur d’exer­cice : entre les infir­miè­res qui exer­cent en cli­ni­ques (2285 répon­ses, 49% non), et celles qui vont à domi­cile (5481 répon­ses en libé­ral ou SSIAD, 80% non), 11.526 en hôpi­tal public (56% non), 2951 en privé non lucra­tif (60% non), 2717 en EHPAD (54% non), 2583 en médico-social (58% non), 1896 en ins­ti­tut de for­ma­tion (60% non)
 Selon la fonc­tion : l’oppo­si­tion est plus forte chez les IDE (24.273 répon­ses, 66% non) que chez les cadres infir­miers (5652 répon­ses, 53% non) et les for­ma­teurs (1377 répon­ses, 60% non). Par ailleurs, 82% des 341 aides-soi­gnants ayant répondu sou­hai­tent pou­voir faire des dex­tros.
 Selon l’ancien­neté de diplôme : les infir­miè­res qui ont moins d’un an de diplôme (70% non) et celles qui ont plus de cinq ans (65% non) se dis­tin­guent de celles un ou deux ans de DE (46% non) ou deux à cinq ans (49% non).

(Détails et gra­phi­ques dans le docu­ment en télé­char­ge­ment en bas de page)

« Qu’on ne parle pas de cor­po­ra­tisme, 83 % des répon­dants sont sala­riés, donc que les AS effec­tuent de tels actes n’a aucune inci­dence sur leur salaire, observe Thierry Amouroux, secré­taire géné­ral du SNPI. Les infir­miè­res refu­sent une déqua­li­fi­ca­tion des soins liée à des motifs économiques. Les bureau­cra­tes rai­son­nent en actes, mais der­rière il faut une réflexion cli­ni­que et un trai­te­ment adapté. Qui sera res­pon­sa­ble en cas d’erreur d’inter­pré­ta­tion ou de soins réa­li­sés à tort ? »

Santé low cost : la ten­ta­tion économique de la déqua­li­fi­ca­tion des soins

Formé en 10 mois, et titu­laire d’un Diplôme d’Etat, l’aide-soi­gnant dis­pense, dans le cadre du rôle propre de l’infir­mier, en col­la­bo­ra­tion avec lui et sous sa res­pon­sa­bi­lité, des soins de pré­ven­tion, de main­tien, de rela­tion et d’éducation à la santé.

L’objec­tif du minis­tère n’est pas d’aug­men­ter le temps de for­ma­tion des aides-soi­gnants, en ajou­tant de nou­vel­les com­pé­ten­ces. Ils répon­dent juste au lobby des EHPAD pour aug­men­ter la charge de tra­vail déjà impor­tante des aides-soi­gnants, et réduire les coûts de fonc­tion­ne­ment, en mutua­li­sant davan­tage les postes infir­miers et en rédui­sant l’inter­ven­tion des infir­miè­res libé­ra­les. Cette ten­ta­tive sur le dextro n’est qu’un pre­mier pas vers d’autres glis­se­ments de tâches.

Aucun argu­ment ne peut jus­ti­fier de relé­guer la sécu­rité des patients au second plan, en faveur d’impé­ra­tifs comp­ta­bles. Dans cer­tains établissements sociaux et médico-sociaux, la pré­sence d’infir­mière n’est pas sys­té­ma­ti­que­ment assu­rée. Permettre que cer­tains pro­fes­sion­nels puis­sent effec­tuer des actes infir­miers en l’absence d’un infir­mier ou d’un méde­cin pré­sente un risque dérai­son­na­ble. Au-delà du geste tech­ni­que lui-même, il faut avoir les com­pé­ten­ces pour détec­ter les symp­tô­mes d’alerte chez les per­son­nes par­ti­cu­liè­re­ment fra­gi­les, en EHPAD ou en SSIAD.

Le 19 mars 2015, en Commission des Affaires Sociales, les dépu­tés avaient adopté un arti­cle 30 bis à la loi de santé, des­tiné à per­met­tre la délé­ga­tion d’actes de soins infir­miers à des pro­fes­sion­nels des établissements et ser­vi­ces médico-sociaux. L’exposé des motifs pré­ci­sait que l’amen­de­ment visait à per­met­tre à des pro­fes­sion­nels sala­riés non soi­gnants de réa­li­ser des actes tels que l’admi­nis­tra­tion de valium en cas de crise d’épilepsie convul­sive chez une per­sonne han­di­ca­pée ou encore des aspi­ra­tions tra­chéa­les. Les per­son­nes les plus fra­gi­les, per­son­nes âgées et han­di­ca­pées encou­raient un risque majeur pour leur sécu­rité. Suite à la mobi­li­sa­tion des orga­ni­sa­tions infir­miè­res, le 9 avril cet amen­de­ment de déqua­li­fi­ca­tion des soins a été sup­primé du texte. http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Loi-sante-EHPAD-et-han­di­ca­pes.html

Loin d’être cor­po­ra­tiste, le syn­di­cat infir­mier de la CFE-CGC a dénoncé un autre exem­ple de méde­cine low cost avec l’expé­ri­men­ta­tion sur le CHU Saint Antoine de l’orga­ni­sa­tion de consul­ta­tions en can­cé­ro­lo­gie réa­li­sées par des infir­miè­res pour le suivi des patients, com­pre­nant la pres­crip­tion directe de cinq types de médi­ca­ments (antié­mé­ti­ques ; anxio­ly­ti­ques ; anti­bio­ti­ques de la classe des cycli­nes, anti-diar­rhéi­ques, topi­ques cuta­nés) et le renou­vel­le­ment des ordon­nan­ces de chi­mio­thé­ra­pie. L’Agence régio­nale de santé d’Île-de-France, qui a auto­risé ce sys­tème, rem­place le can­cé­ro­lo­gue formé en douze années après le Bac, par une infir­mière dis­po­sant d’une simple for­ma­tion théo­ri­que de 45 heures vali­dée par une attes­ta­tion de pré­sence ! http://www.syn­di­cat-infir­mier.com/Cancerologie-low-cost-45h-de.html

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