Infirmiers en pratique avancée : une note ordinale pour clarifier l’exercice IPA
12 juillet 2025
En plein essor depuis leur reconnaissance légale en 2016, les infirmiers en pratique avancée (IPA) représentent une réponse attendue à la crise de l’accès aux soins. Pourtant, près de dix ans après leur inscription dans le Code de la santé publique, leur exercice reste entravé par une série d’incertitudes réglementaires. Dans ce contexte, une nouvelle note publiée par l’ONI en juin 2025 vient rappeler les bases du droit en vigueur et lever plusieurs zones d’ombre. Une initiative bienvenue à l’heure où les demandes d’installation se multiplient sur le terrain.
Préciser le droit, sécuriser les pratiques
La note ordinale se veut d’abord un outil d’aide à la décision, tant pour les IPA eux-mêmes que pour les conseils départementaux de l’Ordre chargés de leur enregistrement. Elle vise à « faciliter la compréhension et l’application des règles encadrant la pratique avancée », notamment dans un contexte de multiplication des projets mixtes ou multi-sites.
Le rappel initial est fondamental : les IPA disposent de « compétences élargies » par rapport aux infirmiers diplômés d’État, dans un cadre strictement encadré par les articles R.4301-1 et suivants du Code de la santé publique. La note souligne que l’exercice est à la fois interdisciplinaire et interprofessionnel, au service d’une meilleure fluidité des parcours de soins.
Un exercice possible en double domaine
L’un des apports les plus concrets du document concerne la possibilité d’exercer en double domaine. Le texte rappelle que la loi autorise un IPA, s’il est diplômé dans plusieurs mentions, à pratiquer dans les champs correspondants : soins primaires et psychiatrie, ou oncologie et maladies rénales, par exemple. Un point crucial pour les territoires sous-dotés, où la polyvalence devient une nécessité pour répondre aux besoins des patients.
La question du lieu d’exercice revient régulièrement dans les dossiers d’installation. La note précise que, comme tout infirmier libéral, un IPA doit respecter le principe du lieu unique d’exercice. Néanmoins, une dérogation est possible : l’exercice en site distinct peut être autorisé par le Conseil (inter)départemental de l’Ordre (CIDOI), à condition de démontrer une carence de soins dans la zone concernée.
À noter : cette demande, une fois formulée, peut donner lieu à une autorisation tacite au bout de trois mois en l’absence de réponse. Une précision bienvenue pour accélérer certains projets restés en suspens.
Exercice mixte : une réalité encadrée
Nombreux sont les professionnels qui souhaitent conserver une activité d’infirmier en soins généraux tout en développant une pratique avancée. Le cumul IDEL/IPAL est possible, au sein d’un même cabinet, à condition de respecter le Code de déontologie. La note met en garde contre les risques de compérage, de détournement de clientèle ou de conflits d’intérêts, soulignant l’importance d’une éthique rigoureuse dans ces situations hybrides.
L’avenant n°7 à la convention nationale des infirmiers signé le 4 novembre 2019, reconnait l’existence de deux modes d’exercice en pratique avancée en libéral : les infirmiers exerçant une activité libérale exclusive en pratique avancée et les infirmiers exerçant une activité libérale mixte (infirmier libéral en soins généraux/infirmier libéral en pratique avancée).
Conformément aux articles L. 1110-8 et R. 4312-74 du Code de la santé publique le principe du libre choix du professionnel de santé par le patient doit être respecté en ce qu’il s’agit d’un droit fondamental du patient. A cet égard, l’IPA peut cumuler une activité libérale en tant qu’IPAL et en tant qu’IDEL, au sein d’un même cabinet.
Un point de vigilance s’impose également concernant le zonage conventionnel : un IPA en exercice exclusif n’est pas soumis aux règles des zones sur-dotées. En revanche, s’il reprend une activité d’infirmier libéral classique, ces règles s’appliquent à nouveau.
Un enregistrement à simplifier
Le dernier chapitre de la note s’attarde sur la procédure d’enregistrement des IPA. Pour être autorisé à exercer, le professionnel doit justifier de son diplôme, de trois ans d’expérience en tant qu’infirmier et déposer un dossier complet auprès de son conseil ordinal. Pour éviter les allers-retours chronophages, la note fournit une liste exhaustive des pièces justificatives attendues, en fonction des situations : exercice salarié, libéral, à l’étranger…
Elle rappelle également les équivalences possibles pour les IPA formés dans un pays de l’Union européenne, avec évaluation par la DRIEETS, et les éventuelles mesures de compensation (formation complémentaire ou stage) en fonction du niveau de qualification.
Au-delà de ses précisions juridiques, cette note constitue un support de dialogue entre les IPA et les instances de régulation. En encadrant plus clairement les pratiques, elle permet aussi de mieux les faire reconnaître. Car si les IPA sont encore peu nombreux en France (3.800 IPA sur 640.000 infirmières), leur montée en puissance est inéluctable. Et à l’heure où l’on parle d’évolution du décret d’actes et de réforme des études, sécuriser leur exercice, c’est sécuriser l’avenir des soins de proximité.
Voir la note sur le site ordinal :
– https://www.ordre-infirmiers.fr/fiches-juridiques
– https://www.ordre-infirmiers.fr/system/files/inline-files/Note%20sur%20les%20IPA.pdf