Les 9 propositions du rapport HÉNART sur les métiers en santé de niveau intermédiaire
20 avril 2011
Cet article traite des propositions de la mission "Les nouveaux métiers en santé : une stratégie et un plan d’action"
Vous trouverez la synthèse du rapport relatif aux métiers en santé de niveau intermédiaire (Professionnels d’aujourd’hui et nouveaux métiers : des pistes pour avancer) présenté en janvier 2011 par
Laurent HENART (Député de Meurthe et Moselle), Yvon BERLAND (Professeur de médecine, Président de l’Université Aix-Marseille II)
et Danielle CADET (Coordonnatrice générale des soins à l’AP-HP)
dans l’article suivant : http://www.syndicat-infirmier.com/Synthese-du-rapport-HENART-sur-les.html
L’organisation et les principales caractéristiques des ressources humaines en santé doivent évoluer pour s’adapter à l’environnement changeant du système de santé et mieux répondre aux besoins de santé de la population, dans un contexte de finances publiques contraintes. La création de nouveaux métiers en santé de niveau intermédiaire est une des réponses possibles aux inadaptations constatées mais elle doit être soumise à de fortes exigences.
Autant la création de métiers en santé de niveau intermédiaire parait impérative, autant les conditions de leur genèse et de leur instauration doivent être rigoureuses. En santé comme ailleurs, l’offre (de métiers) crée et module la demande (en santé) alors que doit prévaloir le phénomène inverse.
Une clarification s’impose dont les enjeux sont considérables. Il s’agit en particulier :
d’éviter de reproduire, avec les nouveaux métiers en santé, les travers unanimement constatés avec le métier de médecin dont certaines activités ne correspondent pas à une formation de niveau bac + 9 ou bac +11 ;
d’écarter le risque de prolifération des métiers de la santé et de complexifier un peu plus un paysage qui l’est déjà ;
de ne pas multiplier outre mesure les intervenants auprès du patient (y compris à domicile), à un moment où la fluidité de la prise en charge est plus que jamais nécessaire ;
de s’inscrire dans une dynamique de complémentarité et non de concurrence entre les métiers.
Les nouveaux métiers en santé devront répondre à quelques critères simples mais impérieux.
Il paraît primordial que toute réflexion et toute proposition sur le sujet des nouveaux métiers en santé partent systématiquement de la réponse aux besoins de santé de la population. La mission se fonde, pour ses travaux, sur la définition de la santé retenue par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. ». Cette large acception de la santé, qui est aujourd’hui celle de nos concitoyens, renvoie à la notion de réponse globale aux besoins du patient, aux liens étroits entre les dimensions sanitaire, sociale et médico-sociale de la prise en charge, aux soins et actes aussi bien curatifs que préventifs, ces derniers étant encore insuffisamment développés dans notre pays. Elle renvoie également au champ de la médecine et des soins d’entretien de la santé, de la non-survenance d’une maladie.
La mission présente neuf propositions reposant sur quatre piliers :
Une priorité : mettre en place une politique modernisée des ressources humaines en santé ;
Une nouveauté : créer des professions de santé de niveau intermédiaire ;
Une méthode : adopter un système rigoureux de validation ;
Une nécessité : intégrer les formations à l’enseignement supérieur.
A) Une priorité : mettre en place une politique modernisée des ressources humaines en santé
Proposition n° 1. Imposer la démarche métier. Les professions de santé restent encore marquées par des lignes de force récurrentes telles que la primauté du diplôme, l’exigence d’un lien direct entre le diplôme détenu et la profession exercée ou la nette suprématie de la formation initiale. La question centrale est celle de la nature des besoins de la population et des différentes manières d’y répondre. A l’enchaînement diplôme → métier, la mission propose de substituer systématiquement le suivant : besoin → activités → compétences → métier → formation → diplôme.
Bien que schématique et donc forcément réductrice, cette présentation témoigne de la nécessité d’inverser le paradigme en cours s’agissant de l’utilisation du levier des métiers. La démarche métier consiste à penser le métier à partir du besoin en compétences, lui-même assis sur les besoins de la population, puis à en déduire les référentiels de formation et les diplômes nécessaires.
Proposition n° 2. Conforter et développer les métiers socles. La mission entend par métiers socles les métiers aujourd’hui existants, auxquels s’attache, sauf exception, un diplôme ou certificat. Partant du principe qu’il ne servirait à rien et qu’il pourrait même s’avérer contreproductif d’envisager la création de nouveaux métiers sans une remise en ordre dynamique des métiers existants, la mission appelle à une réflexion globale, portée en 2011 par le ministre de la Santé, sur les professions de santé actuelles, réunissant l’ensemble des parties prenantes, sous l’égide de la direction générale de l’offre de soins.
Ce pré-requis consiste à stabiliser d’abord les métiers socles, à en faire évoluer les contours et l’envergure et si nécessaire les niveaux de formation, bref à en tirer tout le potentiel au regard des nouveaux besoins en santé. La réflexion doit être pluri disciplinaire et intégrer l’ensemble des métiers engagés dans les prises en charge concernées. Il faut éviter une analyse isolée de chacun des métiers. La mise à jour d’un métier existant et même une certaine évolution de son portefeuille de compétences et de son champ d’action ne sauraient constituer pour la mission un critère unique et suffisant de création d’un nouveau métier. S’il semble nécessaire que certains professionnels paramédicaux accèdent à un niveau universitaire plus élevé que la licence, il ne paraît pas justifié d’élever systématiquement l’ensemble des diplômes actuels au niveau du master. En effet, l’évolution des professions paramédicales ne peut s’envisager qu’au regard de la réponse aux besoins de santé de la population, et non l’inverse, et les formations doivent être pensées à partir de l’envergure du champ et des modalités d’exercice professionnels.
B) Une nouveauté : créer des professions de santé de niveau intermédiaire
Proposition n° 3. Cerner le champ des nouveaux metiers en sante. Pour la mission, les nouveaux métiers en santé se spécifient par leur champ d’intervention, leur caractère à la fois inédit et de haute technicité et par un niveau élevé de compétences et de qualification (master), conduisant à une prise de responsabilité identifiée. L’espace des nouveaux métiers en santé comprend deux grands champs : les professions de santé stricto sensu et les professions au service de la santé. Il recouvre soit quelques grands domaines de santé (premier recours, vieillissement et personnes âgées, maladies chroniques, cancer) soit d’autres secteurs plus ciblés : certaines spécialités ou filières médicales (vision, audition, soins dentaires etc.), chirurgie, imagerie…
Les nouveaux métiers ont pour point de clivage entre eux l’existence ou non d’un contenu de soin. La mission s’intéressera plus particulièrement aux premiers (métiers du soin) mais ne pouvait ignorer la nécessaire émergence de professionnels hautement qualifiés au service de la santé.
Confrontée à un espace de déploiement potentiellement assez vaste, y compris dans le champ du soin, et en l’absence d’analyses médico-économiques complètes sur le sujet, la mission fait le choix d’une double délimitation – champs d’activité et activités elles-mêmes - du périmètre des nouveaux métiers en santé.
Le contexte le plus approprié pour un déploiement rapide des premiers nouveaux métiers paraît ainsi mieux cerné. C’est d’une part celui des domaines de santé prioritaires relevés par la mission et qui se sont également dégagés lors des auditions et tables rondes : premier recours, maladies chroniques, cancer, vieillissement et personnes âgées. C’est d’autre part celui d’un mode d’intervention du nouveau professionnel en seconde intention, c’est à dire en relais du médecin.
Les futurs nouveaux métiers en santé doivent obéir à quelques principes incontournables :
ils sont construits à partir des métiers paramédicaux d’aujourd’hui ;
ils ne sont pas redondants avec un métier existant ;
ils correspondent à un mode d’exercice professionnel et des responsabilités identifiées ;
ils ont vocation à constituer à terme des professions médicales à compétence définie.
Proposition n° 4. Valoriser les parcours professionnels. La mission ne mésestime pas les difficultés inhérentes à la mise en place de nouveaux métiers dont il faudra légitimer la place par rapport aux métiers existants et qui ne devront pas se substituer à ceux-ci mais véritablement représenter un chainon manquant aujourd’hui dans la gradation de la prise en charge des patients. Il convient de raisonner en termes de parcours professionnels et d’évolution de carrières. Ceux des professions paramédicales doivent pouvoir se concevoir dans le soin et non se limiter comme c’est le cas actuellement à la gestion ou à l’encadrement.
Un double bénéfice en est attendu : une meilleure attractivité pour les filières et une fidélisation pour leurs métiers. Le nouveau métier, dès lors qu’il implique des compétences très élargies dans un champ donné d’activité et une qualification nettement supérieure, valorise l’ensemble de la filière. La question du mode de rémunération de ces nouveaux métiers est, bien évidemment, un enjeu majeur. Cette rémunération doit être, sur le fond, principalement liée aux responsabilités supplémentaires, conséquences des compétences accrues.