Rapport IGAS sur Mayotte permettre aux infirmiers de "pratiquer de manière autonome certains actes médicaux et de prescrire des médicaments"

20 novembre 2016
L’Inspection générale des affaires sociales (Igas) a rendu public le 15.11.16 le rapport final de sa mission d’appui au département de Mayotte sur le pilotage de la protection de l’enfance.
L’Igas invite le ministère de la Santé et des Affaires sociales à "aménager un cadre législatif et règlementaire permettant, à titre dérogatoire, aux infirmiers exerçant leur profession à Mayotte de pratiquer de manière autonome certains actes médicaux et de prescrire, le cas échéant, des médicaments".
On manque d’infirmiers à Mayotte, qui ne disposait, selon l’ARS Océan indien de 625 professionnels en activité au 1er janvier 2012, soit un infirmier pour 340 habitants, une densité trois fois inférieure à celle de la profession au niveau national.
"S’agissant des normes de qualification exigées pour agir, il apparaît à l’expérience que la pénurie des ressources conduit de nombreux professionnels à se substituer au quotidien à des personnes plus qualifiées, notamment lorsqu’il s’agit de réaliser des actes courants et répétitifs.
L’exemple des infirmiers exerçant au sein de la PMI est topique : le suivi de tous les enfants âgés de moins de six ans et leur vaccination ne sont effectivement assurés que parce que ces infirmiers acceptent d’aller au delà des compétences qui leurs sont reconnues par la loi. Pour autant, il ne serait pas matériellement possible de faire assurer ce suivi et ces vaccinations par un médecin, puisque, même à effectif complet, leur nombre n’est pas suffisant pour une présence médicale dans tous les centres de PMI. "
"Du point de vue de la mission, les infirmiers de la PMI en particulier, devraient être autorisés à prescrire les médicaments nécessaires au traitement des maladies banales de la
petite enfance, qu’ils sont capables de diagnostiquer et de traiter, même si le droit ne les y autorise plus. Il faut à ce propos se souvenir que les infirmiers mahorais étaient investis, jusqu’en 2006, de
responsabilités de cette nature dans les dispensaires et à l’hôpital. Cette fonction d’infirmier "trieur" permettait alors aux médecins de se consacrer aux situations les plus délicates."
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« Il s’agit d’une approche du partage des tâches comparable à celle qui est expérimentée depuis une quarantaine d’années dans des pays anglo-saxons (Etats-Unis, Royaume Uni, Canada), avec l’émergence du concept d’infirmier-praticien (nurse practitioner). Il consiste à permettre à un professionnel qualifié, ayant suivi une formation appropriée, de travailler de manière autonome, tant sur le plan diagnostique que thérapeutique. Les consultations de première ligne accueillent des patients avec des problèmes indifférenciés non diagnostiqués. L’infirmier procède à l’examen clinique et prend en charge le patient de manière autonome, au besoin en prescrivant des médicaments inscrits sur une liste limitative, ou en le renvoyant vers un médecin référent s’il l’estime nécessaire.
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La loi de modernisation de notre système de santé aménage désormais la possibilité de « pratiques avancées » pour les auxiliaires médicaux ; ceci ouvre une perspective intéressante pour la reconnaissance d’infirmier clinicien. Ce nouveau métier, situé entre le « bac+8 » du médecin et le « bac+3/4 » des paramédicaux actuels, élargit les compétences du métier socle à « la formulation d’un diagnostic, la réalisation d’une analyse clinique, l’établissement de prescription, ou l’accomplissement d’activités d’orientation ou de prévention ». S’agissant des prescriptions, il s’agit toutefois d’un champ limité aux médicaments non soumis à prescription médicale obligatoire ou au renouvellement ou adaptation de médicaments prescrits préalablement par un médecin. Ceci ne peut suffire à répondre complètement aux besoins de premier recours à Mayotte. Il conviendrait d’élargir encore les compétences de l’infirmier clinicien récemment définies à celles d’un infirmier praticien.
Recommandation n°1 :
Aménager un cadre législatif et règlementaire permettant, à titre dérogatoire, aux infirmiers exerçant leur profession à Mayotte de pratiquer de manière autonome certains actes médicaux et de prescrire, en première intention le cas échéant, des médicaments soumis à prescription médicale obligatoire
Source http://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/2015-087R_TOME_1_Mission_d_appui_MAYOTTE_.pdf